•   ... Suite de l'arrondissement de Coutances :

    Cantons de Bréhal et de Gavray.

    Sinon, pour revenir aux précédents cantons, aller ici. [NdB].

     

    CANTON DE BRÉHAL.

     

         En suivant la côte, ce canton est le plus méridional de l'arrrondissement de Coutances il ne contient pas de châteaux considérables du moyen âge mais on y trouve le berceau de plusieurs familles qui se rattachent à l'époque de la conquête et qui ont joué un rôle distingué en Angleterre, aussi bien qu'en Normandie.
          Au chef-lieu du canton, à Briqueville-les-Salines, à Bréville à Cérences à Chanteloup à la Meurdraquière, à Saint-Sauveur-de-Ia-Pommeraye on peut retrouver les habitations des Paynels, des BrIquevilIes des Brevilles des Carbonnels des Chanteloups des Montgomerys, des Meurdracs, des Pomeroys dont les noms figurent souvent dans le Domesday-Book et dans les registres du temps des Ducs de Normandie qui régnèrent en Angleterre.

    60. CHATEAU DE BRÉHAL.

     

         Dès le temps des Ducs de Normandie Foulques Paisnel possédait les seigneuries de Hambye et de Brehal (Lib. féod. Dni. Regis Philip. penès nos p. 4.)
          J'avoue que c'est une bien faible indications pour lui chercher un château ailleurs qu'au chef-lieu de sa baronnie mais l'antiquité de l'église antérieure à celle de l'abbaye de Hambye, m'a porté à croire qu'il y avait un seigneur particulier au temps de la conquête. Si ma conjecture est sans fondement si les curieux ne réussissent par mieux que moi à trouver ici l'emplacement d'un château j'abandonne volontiers la prétention de grossir ma liste du nom de cette paroisse.


    61. BRICQUEVILLE-LES-SALINES.

     

         S'Il y a des doutes sur l'emplacement d'un ancien cliâteau à Bréhal, il n'y en a au moins pas pour celui de Bricqueville-sur-mer. Les ruines de cette forteresse sont visibles au loin quoique sur un terrain plat et qu'on a pu jadis monter avec les eaux de la mer. Au commencement de la révolution, ces ruines étaient encore considérables aujourd'hui même elles sont assez évidentes pour qu'on puisse les retrouver sans en demander la place.
          Je présume que ce château fut jadis le berceau de la famille qui en porte le nom et dont je vous ai parlé à l'article du château de Laune(V. sup. page 241) ; mais ceci n'est peut-être qu'une conjecture. Les plus anciens possesseurs dont j'aie une connaissance authentique sont les Paynels barons très puissants de cette contrée.
          En parlant du château de Hambye (Infra) je donnerai des détails sur cette famine ici j'indiquerai seulement quelques- uns de ceux qui possédèrent Briqueville.
          Je vois dans le registre des fiefs de Philippe-Auguste qu'au commencement du 13e siècle, Fouques Paynel le tenait du mont Saint-Michel et devait le service d'un chevalier : Fulco paganellus tenet indè (de abbate montis). Briquevill., etc... per servicium 1 militis (Penès nos p. 4).

         Dans un état des fiefs de l'élection de Coutances rédigé en 1327 par le grand Bailly de Cotentin je vois que Gilbert de Malesmains avait alors cette seigneurie (Penès nos p. 1).
          En1388, Nicolas Paynel, seigneur de Briqueville obtint du roi Charles VI le droit de relever son château, et il en rebâtit les tours (Mss. de M. le Franc).
          Il était fils de Fouqnes Paynel troisième du nom et d'Agnès de Chanteloup. Il épousa vers 1393 Jacqueline de Varenne veuve de Raoul Tesson, seigneur du Grippon (La Chesnée des Bois, verbe Paynel branche de Bricqueville). Leur fils Jean, seigneur de Briqueville fut père de Guillaume dont le fils Jacques se maria en 1463 et fut père d'un autre Jacques dont le fils aîné, seigneur de Briqueville marié à Jeanne du Mesnildot mourut sans postérité.
          Nicolas Paynel qui était seigneur de Briqueville en 1418 resta fidèle à la France. Henri V confisqua ses terres et son château, qu'il donna au comte de Huntingdon (Mss. de M. le Franc).
           Par un mariage dans la famille Paynel la seigneurie de Briqueville passa aux de Piennes (Généal. des de Piennes de Normandie) qui la vendirent en 1473 à Elisabeth de Montboucher veuve de Jean de Montgommery. Son fils Jean de Montgommery la possédait en 1491.  Elle fut vendue de nouveau en 1769 par madame la marquise de Thiboutot, née Montgommery, à M. Duprey de Coutances, dont la fille l'a portée en mariage a M. Abaquesney de Parfouru.
          Les ruines du château de Briqueville sont sur un terrain plat près de la mer au milieu des salines ( il y en a plus de soixante sur ce point ).
           Elles offrent particulièrement les restes de deux tours dont la démolition est très avancée. Ces tours n'avaient ni crénaux ni machicoulis. Leur hauteur était à peu près de trente pieds. Je n'y ai vu ni tertre ni douves. Le propriétaire actuel, qui a pris l'emplacement à fieffe de M. de Parfouru, a tellement comblé les fossés, qu'on en devine a peine la place. L'enceinte était de forme carrée et contenait environ quarante ares. Je ne crois pas que ce château ait jamais pu soutenir un siège quoiqu'il ne fût commandé d'aucun côté. Le nommé Godefroy, qui le fit démolir il y a 50 ans par les habitants qu'il mettait en réquisition, m'en a tracé le plan sur le sable. Il m'a assuré qu'il en fit enlever plus de mille charretées de décombres.
          L'enceinte était flanquée de quatre tours circulaires aux quatre angles.
          Il faut avoir été sur l'emplacement de ce chateau pour se faire une idée du mouvement et de l'activité des innombrables voitures qui fourmillent dans ce havre et dans ceux de Lessay, de Portbail, du Pont-de-Ia-Roque et du mont Saint-Michel par un beau jour d'été. Ces havres sont les principales sources de la richesse agricole de notre département.


    [ Ce château possède son article dans ce blog à cette adresse : http://rempartsdenormandie2.eklablog.com/les-remparts-de-bricqueville-sur-mer-manche-a212487865 ]


    62. CHATEAU DE CERENCES.

     

         La cour de Cerences fut une de celles que Richard III duc de Normandie donna en dot a sa femme Adèle en 1026 (Curtem quœ appellatur Cerencis supra fluvium Senae. Acherii spicil tome VII in 4° p. 203). On voit par-là que Cerences faisait alors partie du domaine ducal de Normandie. Je ne trouve pas le nom de celui qui en possédait la seigneurie en 1066. Il n'est pas improbable qu'elle était encore une dépendance du domaine du duc Guillaume. Quelques personnes pensent cependant qu'elle en avait été distraite pour faire une partie de l'apanage du comte de Mortain,frère utérin de ce duc.
           Dans le siècle suivant elle était possédée par un seigneur du nom de Carbonnel dont un ancêtre avait aidé à conquérir l'Angleterre.
    Sous le règne de Henri II, il paraît qu'il y avait à Cerences deux fiefs de la dépendance du comte de Mortain un était tenu par Hugues de Carbonnel l'autre par Olivier de Tracy l'un et l'autre devaient service au comte de Mortain (Lib. rub. Scaccarii penès nos, p. 3 et 4).
           Dans le registre des fiefs de Philippe-Auguste, je trouve un Henri de Cerences qui devait service au château de Moyen (Penès nos p. 7 lib. feod. domini regis Philippi).
           En1327, Alice de Courcy veuve d'Olivier Paynel, tenait à Cerences, de Guillaume de Montfort, un quart de fief de Haubert appelé le fief de la Guelle (Etat des fiefs de I'élection de Coutances en 1327, penès nos.).
    Je ne crois pas que ce fût là le principal fief de Cerences. Je présume qu'il était encore dans la famille de Carbonnel il y avait été auparavant il y fut longtemps après. Jean de Carbonnel qui mourut en 1414 et qui fut inhumé dans la cathédrale de Coutances était seigneur de cette paroisse (Billy hist. Mss. du Cotentin, penès nos p. 131. – Laroque, hist. de la mais. d'Harcourt, p. 1154). Henri de Carbonnel l'était encore en 1500.
          Depuis longtemps la seigneurie de Cerences appartenait aux mêmes propriétaires que celles de Briqueville et de Chanteloup. Bien des années avant la révolution M. Duprey lieutenant particulier au présidial de Coutances les avait acquises de madame la marquise de Thiboutot elles ont passé par un mariage dans la famille de Parfouru.
    Cerences est compté parmi les châteaux que Geffroy Plantagenêt prit en 1141 au parti d'Étienne de Blois : ipse autem moven exercitum cerentias venit, quo sine ferro recepto ad Bricatim (Avranches) civitatem venit. (Joh. maj. Monast. gest. Gaufrid comit. Andegav lib. II p. 111. édit. Bochel).
          Jusqu'à présent je n'ai pu trouver d'une manière positive l'emplacement de ce château. Il existe dans la commune de Cerences sur la route de Bourrey et de la Haie-Paynel un lieu nommé la Motte-Billart, dont le nom est une espèce d'indication mais la tradition locale porte l'emplacement du câtel auprès de la rivière au sud du Bourg non loin du petit Valencey, sur un tertre nommé le Mont de Souris.

     

          D'un autre côté M. de Parfouru dernier seigneur de Cerences m'a assuré que ce château était contigu à la grande rue par où l'on arrive de Brehal derrière l'emplacement des anciennes halles tout près de l'église.
    Les armes des Carbonnel anciens seigneurs de Cerences étaient d'azur au chef de gueules à trois tourteaux d'argent.

    63. CHANTELOUP.

     

          Je n'éprouve pas pour cette paroisse l'embarras où je me trouvais il n'y a qu'un instant. Le château de Chanteloup est parfaitement connu de tout le canton. Depuis longtemps c'était la principale résidence d'une famille considérable qui possédait plusieurs belles seigneuries et entr'autres celles de Cerences et de Briqueville. Aujourd'hui même ce château n'a pas cessé d'être habité. Il offre la réunion d'une habitation moderne et d'une ancienne forteresse.
           La suite des seigneurs de Chanteloup est d'ailleurs très bien ëtablie. Si nous avions à nous occuper particulièrement de ce château et de la liste de ses possesseurs je crois qu'on pourrait le faire sans laisser de ces grandes lacunes qui sont si fréquentes dans mes recherches, mais je dois me borner à indiquer sommairement et à mettre sur la voie ceux qui voudront approfondir.
           Dans quelqnes catalogues des seigneurs qui furent à la conquête d'Angleterre (Brompton Duchesne Hollingshed), je trouve un Cantetou c'est évidemment le seigneur de la paroisse qui nous occupe. Il y a bien dans le canton de Saint-Pierre une commune de Canteloup mais elle ne conserve ni anciennes traditions ni traces de château tandis que celle ci est pour ainsi dire historique.
           Masseville (Hist. de Normand. tome I.p. 248) ne cite pas un seigneur de Chanteloup sur la liste de la conquête mais parmi ceux qui en 1096 allèrent à la croisade avec le duc Robert, fils du Conquérant, l'auteur de la vie de St.-Thomas de Chantelou (M. Rouault, p. 28) donne le nom de Guillaume à ce compagnon du duc Robert. Sa famille était établie en Angleterre où l'on voit figurer plusieurs seigneurs de son nom depuis la conquête jusqu'au temps ou Mathieu Paris écrivait son histoire. Thomas qui fut d'abord chancelier de l'Université d'Oxford devint évêque de Hereford et occupa ce siège jusqu'a sa mort arrivée en 1282 (Matth. Paris hist. Passim - Godwin de praesulibus Herefordiensib).
          La famille qui possédait des biens dans le comté de Dorset et entr'autres Stokewood y était venue des comtés de Hereford et de Worcester mais elle avait ses principaux établissements dans le comté de Warwick. Elle y avait donné son nom à la paroisse d'Aston-Cantilupe, chef-lieu de sa résidence (HutchinsDorset, tom/ II, p.465.Dugdale Warwicksh, tome II, p.833). La plupart des Chanteloup d'Angleterre ont été inhumés au prieuré de Studely, auquel ils avaient fait de grandes donations (Dugdale, ibid).
          On trouve encore dans le Pairage éteint d'Angleterre (Collins éd. 1711, tome II, part II, p. 182. – Banks tom. 1, p. 50. ibid. p. 254) de grands détails sur cette famille depuis la fin du 12e siècle jusqu'au commencement du 14e. On y voit que Guillaume fut un des partisants du roi Jean contre ses barons que Gautier un de ses fils, fut évêque de Worcester que Thomas, son petit-fils, était évêque de Hereford (c'est celui dont M. Rouault a écrit la vie) (Il existe en Angleterre une autre vie du même : en voici le titre Thé life and gests of St.-Thomas Cantilupe Bisbop of Hereford and sometime before lord chancellor of England extracted out of the authentique records of his canonisation as to the maine part anonymous. Matth. Parlis : Capgeave Harpsfield and others. Collected by B. S. S. J. At Gant printed by Robert Wafker 1674. V. Hearnes preface to C. Langtofts Chronic. p.13..... 16) qu'il fut canonisé la trente-quatrième année du règne d'Édouard Ier et que sa famille s'éteignit en Angleterre ou au moins cessa de figurer parmi les barons du royaume au commencement du 14e siècle.
           L'attachement de Guillaume Chanteloup au Roi Jean-sans-terre, pour lequel il abandonna le parti du prince Louis fils de Philippe-Auguste, explique naturellement pourquoi sa famille cessa de posséder la seigneurie dont elle portait le nom. Cependant je vois qu'elle fut possédée par une femme de la même famille qui la porta en mariage à Fouques Paynel, troisième du nom, qui vivait en 1295. Les grands biens réunis des Chanteloups et des Paynels passèrent, par un autre mariage dans la maison d'Estouteville (V. pour tes détails mes familles Anglo-Norm. p. 115) au commencement du 15e siècle.
          A la fin du même siècle Chanteloup appartenait encore à un d'Estouteville. Après cette famille il appartint pendant quelque temps aux Bouillés parmi lesquels le plus remarquable était Regney de Bouillé capitaine de cinquante hommes d'armes de l'ordonnance du roi Louis XIII. Jean de Montgommery possédait cette terre en ï655 et son fils Louis en 1691 ( Renseignements donnés par M. de Parfouru). Madame de Thiboutot héritière des Montgommery la vendit au mois .de décembre 1761 à M. Duprey juge au présidial de Coutances dont la fille l'a portée en mariage dans la maison de Parfouru où elle a subsisté jusqu'à ce jour avec celles de Cérences et de Briqueville.
          Le château de Chanteloup est compté parmi ceux que reprirent aux Anglais en 1449 les troupes du connétable de Richemont (Gruel. Vie du connétable p. 132 à 139 Monstrelet Chartier).
          En 1594, il soutint contre M. Viques, chef des Ligueurs, un siège de plusieurs mois. Nicolas Fortin qui en était gouverneur fut annobli par le Roi Henri IV (Titres communiquée. Nicolas Fortin était de la paroisse
    de Cuves
    ).
          L'état actuel du château qui est encore habité par le gendre de M. de Parfouru est tel qu'on a peine à comprendre comment il a pu soutenir un siège de sept mois. Il n'est pas facile de croire qu'il ait été attaqué bien vivement.
          Les armes des Chantelou suivant un armorial tiré des archives de la cathédrale de Bayeux et cité par Dumoulin, hist. de Normandie, étaient losangé d'or et de sable celles des Cantilupes d'Angleterre données par Banks, tome 1, p. 20 et 254 sont très différentes mais ce n'est pas une raison pour les rapporter à une autre famille. Les anciennes familles Normandes en Angleterre y ont presque toutes changé leurs armoiries. Les armes des autres possesseurs se trouvent presque toutes dans l'histoire des grands officiers de ta couronne.

     

    [ Ce château possède son article dans ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-chanteloup-manche-a130149670 ]

     
     64. LA MEURDRAQUIÈRE.

     

         Le nom de cette paroisse signifie incontestablement habitation de Meurdrac. C'est assez vraisemblablement le berceau de la famille de ce nom qui a été très étendue et très riche en Normandie et en Angleterre. Elle a possédé dans notre département les seigneuries de Trèly de Contrières, de Lingreville, de Graignes, de Tribehou, de Grenneville, de la Meurdraquière, de Beauchamp, de Saint-Denis-le-Gast etc...
           Henri Meurdrac, disciple et compagnon de St-Bernard, fut nommé archevêque d'York en 1143, et mourut avec cette dignité en 1153 (Godwin de prœsulib. Eborac. Laroque, hist. de la mais. d'irfarc, p.1411 La Chesnée des bois, art. Meurdrac.). Godwin, auteur protestant, dit qu'il fut mis au nombre des saints et qu'il se fit des miracles à son tombeau. Cette famille existait au temps de la conquête.
          Robert, fils de Murdrac, souscrivit a la conffirmation des donations faites par le conquérant à l'abbaye de Saint-Ëvroult en 1080 il est nommé dans le Domesday-Book parmi les possesseurs de terres en Angleterre, sous ce Roi.
          Jusqu'à présent, je ne puis indiquer la place d'un ancien château à la Meurdraquière je ne puis même assurer qu'il y en ait jamais eu un mais dans le doute j'ai cru devoir signaler cette paroisse comme un but de recherches.

      
    65. SAINT-SAUVEUR-DE-LA-POMMERAYE.

     

          Si je donne des indications incertaines d'un château à la Meurdraquière, il est au moins constant que cette paroisse est la seule en Normandie qui ait un nom indicatif du berceau de Meurdrac, mais nous n'avons pas même cette ressource pour indiquer le point du dëpsrt des Pomerays qui, pendant longtemps furent distingués en Angleterre et en Normandie car il y a dans notre Normandie, deux autres paroisses du nom de la Pommeraye l'une dans le diocèse de Séez, l'autre dans celui de Rouen. Quoiqu'il en soit, je vais dire ce que je sais de cette famille, ne fut-ce que pour provoquer des recherches sur son berceau.

     

          On trouve le nom de Pommeroy dans la liste de Brompton (Apd. Twysden collect. X script. Apd. Normau. script. antiq.) et dans celle de Duchesne, et celui de la Pommeraye, qui est le même dans le catalogue alphabétique de Hollingshed. Voici un passage du livre rouge de l'échiquier, qui prouve que cette famille subsistait sous le règne de Henri II, et qu'elle possédait un château de la Pommeraye. Henricus de Pomaria terciam partem mil. De feodo de Vado et tenet castrum de Pomaria de... rege. (Traduct. de Ducarel, p. 233, de honore de mort. de bailliva de Hosa). Il y a dans ce passage la preuve de l'existence d'un château de la Pomaeraye, et une forte présomption en faveur du département de la Manche, puisqu'il dépendait du baillage de la Heuze et de l'honneur de Mortain.
          Par le Domesday-Book on voit que sous le règne de Guillaume le conquérant les Pomeroys possédaient en Angleterre plus de cinquante fiefs et, que la plupart étaient dans le comté de Devon ou Bury Pomeroy était leur principale résidence (V. Polwhele history of Devonshire - Beauties of Engl. Devon). Ils subsistaient encore dans le même comte sous le règne de Henri VI avec le titre de Barons du royaume.
    Banks, dans son premier volume du baronage éteint (Pag. 162 et 63), donne la suite de cette famille depuis Raoul, qui vivait sous le règne du Conquérant, jusqu'à Jean Pomerai qui résidait à Stokely-Pomeray, dans le comté de Devon.
          Les armes des Pomerais d'Angleterre suivant le même auteur, étaient d'or au lion léopardé de gueules, armé et lampassé d'azur à la bordure dentelé de sable.


    CANTON DE GAVRAY.


    66. CHATEAU DE VER.

     

         Ce canton, le dernier que nous ayons à parcourir dans l'arrondissement de Coutances, est un des plus stériles du département mais il. n'en fournira pas moins une assez forte contribution d'anciens châteaux.
          En allant de Bréhat à Gavray on trouve au confluent des rivières de Sienne et d'Airou, la paroisse de Ver qui a fourni au moins un compagnon au duc Guillaume quand il entreprît son expédition d'Angleterre.
          Quarante ans avant la conquête Ver faisait partie du domaine ducal : il est nommé parmi les terres que le duc Richard III donna en dot à la fille du roi Robert (Apd Acherii spicil. loco sœpe citato. v. supr.) ; curtem quae dicitur Ver supra fluviumSenae. Par le nom de la rivière de Sienne (Senae), il est évident que ce ne peut être un autre Ver comme on a voulu le faire entendre. Mais Ver dans le diocèse de Bayeux n'aurait-il point plus de droits à revendiquer le berceau de la famille qui, depuis la conquête jusqu'au commencement du 18e siècle fut une des plus
    illustres de l'Angleterre ? C'est ce que nous allons examiner. On voit par le livre rouge de l'échiquier, que sous le règne de Henri II, Raoul de Ver devait le service d'un chevalier (Radus de Ver 1 mil. in balliva de Gravreyo (Apud Ducarel traduct. page 232).
          Si le livre rouge laissait quelque doute entre l'arrondissement de Coutances et celui de Bayeux qui a aussi sa paroisse de Ver toute incertitude serait écartée par le registre des fiefs de l'élection de Coutances, dressé en 1327 par le grand bailly du Cotentin et par le livre des fiefs de Philippe-Auguste rédigé vers 1208 (Radutfus de Thevilla Guillelmus de Ver, Agnes de Valence et Guillelmus de Monte acuto debent servic. trium militum et dimid. ad custodiam Gavray. Lib. féod. Phil. Aug. penes nos p. 1. En 1327, c'était un Louvel qui possédait Ver (plein fief de Haubert) il devait toujours le service au château de Gavray. Penès nos) Par l'état des fiefs de l'élection de Coutances
    en 1327, je vois que la famille Louvel avait remplacé à Ver celle des anciens seigneurs que c'était un plein fief de Haubert et qu'il devait service en temps de guerre, au château de Gavray.
          Après les Louve! le fief de Ver fut possédé par une autre famille également ancienne. Ces deux familles ont été distinguées en Angleterre aussi bien qu'en Normandie. Le juge intrépide qui eut le courage de faire arrêter et mettre en prison le prince qui devint si fameux sous le nom de Henri V appartenait à la même famille que les Gascoins de Ver.
          Ceux-ci n'ont cessé de posséder cette seigneurie que peu d'années avant la révolution l'héritière de leur fortune épousa M. le Forestier de Mobec dont le fils est maintenant propriétaire de cette terre.
          La famille de Ver a subsisté en Angleterre bien plus longtemps qu'en Normandie et avec bien plus d'illustration. Voici le précis de ce que j'en ai pu retouver Dans quelques listes de la conquête (Brompton, Duchesne), le nom de Vere se trouve d'une manière incontestable dans quelques autres, il est dénaturé ou douteux. Quoiqu'il en soit il est certain que le seigneur de cette paroisse était à cette expédition on sait même qu'il s'appelait Aubrey (Alberic) et ce nom de baptême a été, pour ainsi dire, héréditaire pour les aînés de la famille qui n'a pas cessé d'être illustre en Angleterre depuis la conquête jusqu'au commencement du 18e siècle après avoir possédé pendant six cents cinquante ans le titre de comte d'Oxford, sans interruption (V. Norris Brewer Oxforshire, page 52 et suiv. Collins peerage édit. de 1711, tome 2 part. 1, page 270 jusqu'à 279. Banks Baronage vol. 3 pag. 582 jusqu'à 594). On trouve dans les pairages et les baronages d'Angleterre des détails étendus et curieux sur cette famille mais aucun des auteurs de cet ouvrage n'en a soupçonné le berceau (Un voyageur anglais de nos jours (M. Dibdin dans son voyage bibliographique, page 202 et 3 du tome de la traduction de. M. Liquet) les fait venir de Granville. M. Dibdin voyage si iegerement, qu'il ne ne fait pas autorité quand il est question de renseignement positifs même quand il parle de ce qu'il a vu). Cependant sans le savoir, l'historien du comté de Somerset s'en est beaucoup approché en disant que Geoffroy deVer figurait à la conquête, parmi les chevaliers de Guillaume de Moyon (Collinss on Somerset on hire).
    Je trouve dans Orderic Vital qu'en 1135, Robert de Ver conduisit en Angleterre le corps du roi Henri 1er (Ord. Vital. apd. Normann. script., p. 901).
           L'année suivante le même seigneur signa la chartre de joyeux avènement qu'Étienne de Blois donna à Oxford. Cette chartre est rapportée entièrement dans l'ouvrage intituté : regis, par un prieur de Hexham (Hist. ric. prioris Hagulstad ap. Twysden X Angl. Script. Col 314 et 315).
           Je ne poursuivrai pas plus loin en Angleterre cette famille distinguée cet article serait hors de proportion avec tous les autres. On peut en voir beaucoup de détails dans le Baronage de Banks qui les suit depuis le règne du Conquérant jusqu'au commencement du 18e siècle et qui en donne une très-longue généalogie (Banks ub. supr. tome 3, p. 580 jusqu'à 595).
          Leurs armes suivant lui sont écartelé de gueules et d'or, une molette d'argent dans le premier canton.
           Suivant l'auteur de l'histoire généalogique d'Harcourt, ces armes sont simplement écartelé d'or et de gueules (Hist. d'Harcourt, p.1929 et 30).
          Celles de Louvel sont de gueules au griffon d'or. La famille Gascoin de Ver portait d'argent à trois feuilles de laurier en pairie de sinople, accompagné de trois molettes d'éperon de gueules. M. le Forestier, propriétaire actuel, porte d'argent au lion de sable armé, lampassé et couronné de gueules.
          Jusqu'à présent toutes mes recherches pour retrouver l'ancien château de Ver ont été infructueuses. Si celui qui portait le nom de cette paroisse à la conquête, eût été un de ceux qui figurent à peine sur la liste de la bataille et qui ne reparaissent plus je ne serais pas surpris d'avoir cherché inutilement un château qui n'a peut-être jamais existé mais quand on songe que les seigneurs de Ver ont, dès le temps du conquérant, pris rang parmi les premiers Barons d'Angleterre qu'ils ont été comtes d'Oxford pendant plusieurs siècles sans interruption, il est difficile de croire qu'ils n'ont pas aussi cherché à décorer leur berceau d'une manière proportionnée à l'importance extraordinaire qu'ils acquirent tout-à-coup en Angleterre.

         D'un autre côte s'ils n'avaient pas jugé a propos d'orner d'un château le lieu d'où leur famille tirait son nom et son origine cela pourrait facilement s'expliquer. Peut-être dirait-on celui qui jouait à la conquête un rôle subalterne, puisqu'il y servait sous la bannière du seigneur de Moyen, ne se sera-t-il pas soucié de vouloir entrer en concurrence avec son ancien supérieur ; peut-être aussi le service qu'il devait au château de Gavray ne lui permettait-il pas d'ériger château contre château, de chercher pour ainsi dire, à éclipser son suzerain peut-être les seigneurs de Ver n'avaient-ils réellement pas le droit d'y avoir un château pour leur propre compte. Quoiqu'il en soit, je n'y ai rien trouvé qui m'annonce l'emplacement : d'un ancien château. S'il y en avait un c'était probablement tout près de l'habitation actuelle du propriétaire : j'engage les amateurs à le chercher là plutôt qu'ailleurs.
          L'Eglise de Ver est du 12e siècle. La présentation de la cure appartenait autrefois au chapitre de la cathédrale de Bayeux, et se faisait par le chanoine qui possédait la prébende dite de Gavray. J'en parle ici pour engager à rechercher l'origine de la donation au chapitré de Bayeux, de cette église de celles de Gavray et du Mesnil-Amand elle pourrait jetter de la lumière sur l'histoire incertaine des anciens seigneurs de Ver.
          Il existe près de Bayeux une autre commune de Ver. Il ne serait peut-être pas inutile de savoir si elle a toujours porté le même nom et si celui qu'elle porte aujourd'hui ne lui serait point venu de ce qu'elle a été jadis possédée par une branche de la famille de Ver près de Gavray. Ce ne serait pas le premier exemple d'un pareil changement de dénomination : j'en citerais facilement plusieurs dans le moyen âge, et même à des époques très-rapprochées.


    67. VALENCE.

     

         Je n'ai pu encore offrir que des doutes sur l'emplacement du château de Ver et pourtant il n'est pas impossible qu'il y en ait eu deux dans le moyen âge. Sans affirmer qu'il ait existé dans la même paroisse une seigneurie de Valencé, qui devait service au château de Gavray ; sans dire positivement que cette seigneurie a été le berceau des Valencé d'Angleterre, je vais donner les raisons qui m'ont engagé à le soupçonner.
          1°. Il est certain qu'il a toujours existé dans la paroisse de Ver une terre qui porte encore le nom de Valencé, et que jusqu'à la révolution cette terre a été seigneuriale ;
           2°. Sous le règne de Philippe-Auguste le fief de Valencé devait au château de Gavray le même service militaire que celui de Ver (Guilielmus de Ver tenet feodum 1 militis apud Ver ad servicium Gavray. - Agnes de Valance (sic) tenet feodum unius militis apd. Valance ad servicium Gavraii. Lib. feod. reg. Philip. penès nos pag. 7)
          3°. Il n'existe, dans les environs de Gavray ni même en Normandie, aucune paroisse qui porte le nom de Valencé et la seigneurie de ce nom située à Ver est la seule du même nom qui ait jamais dît le service militaire au château de Gavray.
          Dans deux des plus anciennes listes de la conquête (Duchesne, Normann. script., p. 1135. – Brompton ap. Twysden X angl. Script. Col. 965), je vois le nom de Valens qui, dans celle de Brompton est joint par erreur avec celui d'île de manière à faire Valensile. Cette faute (d'impression probablement) n'a besoin que d'être signalée.
          Dans un catalogue des seigneurs anglais qui ont figuré dans les anciens parlemens d'Angleterre comme barons je trouve Aymer de Valence pour les années 25, 27, 28, 30, 34, 35 d'Édouard 1er (Banks extinct baronage, tom. 1 index verbo Valence).
           Sous les règnes de Henri III, d'Edouard Ier et d'Édouard II, les comtes de Pembroke étaient de la même famille. Elle posséda ce titre jusqu'à la mort d'Aymer de Valencé arrivée en 1323 (Ib. tom. 3, page 600 et seqq. ).
          Les armes des Valencé comtes de Pembroke, étaient barré d'argent et d'azur à l'orle de merlettes de gueules (Banks).
           Sur la terre de Valencé à Ver, je n'ai trouvé aucune trace d'ancien château quelques personnes ont pensé que ce château a pu exister au bord de la rivière de Sienne sur un tertre nommé le Mont-de-Souris mais cette opinion n'est pas sans une grande difficulté c'est que le Mont-de-Souris quoiqu'assez voisin de Valence est sur Cérences.
          D'autres personnes ont soutenu qu'il était plutôt sur la route de l'église de Ver à celle du Mesnil-Amand, près d'une hauteur nommée la Roque-Béziers, appartenant à M. Grilton de Valencé. Ceci semblerait en contradiction avec la carte du diocèse et celle de Cassini. Quoi qu'il en soit on voit encore des restes de maçonnerie sur cette élévation escarpée et qu'on remarque a une certain distance comme un assez bon emplacement de château.

    68. CHATEAU DE SAINT-DENIS LE-GAST.

     

         De Ver nous passons près de Gavray pour aller chercher au nord du canton les châteaux de Saint-Denis de Hambye et de Mauny nous reprendrons ensuite Gavray le Mesnil-Garnier et Montaigu, et nous entrerons dans l'arrondissement d'Avranches par le château de la Bloutière. Un seigneur de Saint-Denis se trouve à la conquête d'Angleterre. Son nom figure sur presque tous les catalogues de cette expédition (Brompton, Duchesne, Masseville, chronique de le Mégissier) ; mais comme il existe en Normandie au moins une douzaine de paroisses qui portent ce nom l'embarras est de savoir ou placer le château de la famille qui posséda des biens dans notre province et dans la Grande-Brétagne.
           Deux circonstances aideront à fixer cet emplacement. Nous voyons par le livre rouge de l'échiquier que le fief de Saint-Denis était dans le bailliage de Cerences in ballia de Cerentiis Hugo de sancto Dyonisio Hugo de Bello campo etc. (Apud Ducarel traduct. p. 136).
          Mais une circonstance particulière à la réunion des seigneurs de Beauchamp et de Saint-Denis dans le bailliage de Cerences c'est qu'à une époque antérieure au livre rouge de l'échiquier et très rapprochée de la conquête au temps de la croisade de Robert Courteheuse les seigneuries de ces deux paroisses appartenaient à la même famille, car ils portaient les mêmes armes d'azur à deux jumelles d'or au lion passant en chef (Dumoulin hist. de Norm. Catalogue tiré de la biblioth. du chapitre de Bàyeax p. 5. - Laroque histoire de la maison d'Harcourt, p. 1411. – La Chên. des Bois V°. - Meurdrac. – v. mes familles AngIo-Norm. p. 175 . Ces armes sont celles de Meurdrac que j'ai déjà citées parmi celles de la conquête (V. sup. aux articl. Trely et la Meurdraquière).

         Nous avons la certitude que le Saint-Denis du temps de la conquête et du temps de Henri II était dans le bailliage de Cerences mais comme il y a aussi dans le même quartier une autre paroisse de Saint-Denis (le Vêtu) dont le surnom se traduit souvent en latin par Vetus ce qui annonce une plus grande ancienneté que celui de Saint-Denis-le-Gast qu'on veut rendre par Junior, il semble, m'a-t-on dit, plus convenable de placer l'ancien château à Saint-Denis-le-Vêtu.
          Je répondrai à cette objection que la tradition dont on veut parler n'a aucun fondement que dans l'état des cures du diocèse de Coutances, sous le règne de St.-Louis, Saint-Denis-Ie-Vétu est appelé Sanctus Dyonisius Vestitus (Regis supra patronalibus eccl. dioc. Constant, apud lib. nig. capituli Constant).
           J'ajouterai qu'il y avait alors deux cures à Saint-Denis-le-Gast que l'église de cette grande paroisse est du temps de la conquête et (ce qui est décisif  que la famille Meurdrac possédait la seigneurie de cette commune en 1250 et que les ruines du château-fort y sont encore très visibles très-connues et bien conservées.
          En 1430, Philippe de Saint-Denis ( Meurdrac) était seigneur de Saint-Denis-le Gast. Robert Meurdrac possédait un fief dans la même, paroisse (Etat des fiefs de l'élection de Coutances penès nos p. 4).
          En 1430, le château de Saint-Denis-le-Gast était une forteresse. Les troupes du Roi de France s'en saisirent. En 1437, les troupes Anglaises, commandées par le sire Thomas Scales vinrent les y attaquer. Il y eut plusieurs combats à Saint-Denis à Beauchamp et à la Provôtière. Les Anglais eurent le dessus. Les manuscrits de M. le Franc qui m'ont fourni ces détails ne m'apprennent pas si les Anglais s'emparèrent du château ; mais cela est assez probable car j'y vois qu'ils en démolirent les fortifications en 1440 parce qu'il ne pouvaient le garder (Mss. de M. le Franc, déposés à Vire chez Chalmé, libraire).
          Le fameux St.-Evremond était frère du seigneur de Saint-Denis le-Gast. Le nom de sa famille était le Marquetel. Par lettres de commutation de l'année 1591, cette famille prit le nom de Saint-Denis. Vers le milieu du 18e siècle une héritière des seigneurs de ce nom épousa M. le Vaillant avocat-général au parlement de Rouen et lui apporta en mariage le château de Saint-Denis-le-Gast dont ses descendants sont encore propriétaires (Renseignements particuliers).
          Environ à un demi-quart de lieue de l'église, en descendant au Sud-Est vers la rivière de Sienne, on voit encore une grande partie des ruines de cet ancien château-fort qui jusque dans le 18e siècle fut habité par ses possesseurs.
          Leur résidence était dans l'enceinte des fossés de la forteresse. J'y ai remarqué de grands appartements, et entr'autres deux salles dont chacune a deux cheminées.
           De l'autre côté de l'enceinte on voit la chapelle. Ainsi que la maison elle n'est pas bien ancienne. L'enceinte de retranchements était bien antérieure elle était flanquée de plusieurs tours dont la plupart sont encore passablement conservées. On y voit l'emplacement et les accessoires d'un ancien pont-levis sur un fossé profond et qui serrait de près ia forteresse.
          Les bords de la rivière près du château sont garnis de jolis coteaux escarpés et couverts de bois.
          Les Marquetel de Saint-Denis portaient d'or à la quinte feuille de gueules. Les armes des le Vaillant sont d'azur au poisson en fasce d'argent au chef d'or.

     

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    69. CHATEAU DE HAMBYE.

     

          La paroisse de Hambye, une des plus étendues du département, est contiguë à celle de Saint-Denis-Ie-Gast. Elle contient deux châteaux forts. Le principal celui qui porte le nom de la paroisse, a toujours été possédé par des seigneurs très puissants.
          Celui qui en était propriétaire a l'époque de la conquête de l'Angleterre doit avoir joué un rôle important à cette expédition si l'on en juge par les grandes concessions qui lui furent faites dans le pays qu'il avait aidé à conquérir. Sa postérité y devint nombreuse elle ne le fut pas moins en Normandie. Elle y bâtit plusieurs châteaux Importants et entr'autres celui qui fait le sujet de cet article.
           Je trouve deux Paynels en Angleterre sous le règne du Conquérant ; Raoul, cité par les généalogistes Anglais possédait au temps de la confection du grand registre appelé Domesday-book, dix seigneuries dans le comté de Devon (Banks extinct. Peerage vol. I p. 153. Collins, édit. de 1711, tome II part. II p. 87 et 88. From Dugdal's Baronnag) quinze dans celui de Lincoln autant dans celui d'York et cinq dans le Somersetshire.
           Plusieurs branches Anglaises descendirent de lui et entr'autres celles de HuntIey, de Dudley et de Drax. Newpart Pagnel dans le comté de Buckingham porte encore le nom de cette famille qui possédait des biens en Normandie dans le même temps.
           D'un autre côté,Orderic Vital (Apud Normann. script. p.664) parle de Guillaume Paynel qui était à la bataille de Hastings et qui mourut en 1087, ainsi que GuUlaume-le-Conquérant.
           Le nombre des seigneuries qui appartenaient à cette famille en Normandie n'était peut-être pas inférieur à celui de ses concessions d'Angleterre. Elle y donna son nom à une paroisse du département, la Haie Paisnel et à deux communes de Fontenay dans celui du Calvados.
    Elle posséda dans notre pays seulement, outre Hambye, berceau et chef-lieu de la famille, Percy, Moyon, Marcey, Agneaux, Agon, Ouville, Regniéville, Chanteloup, Briqueville, les Salines, Lingreville la Haie-Paisnel etc (Laroque, hist. de la mais. d'Harc. p. 268 et seq. Mes famill. Anglo-Norrn. v°, Paynel).
           Au commencement du 15e siècle la plupart des seigneuries et des baronnies de la famille se trouvaient concentrées en la personne de Jeanne Paynel unique héritière des baronnies de Hambye, Briquebec Moyon et Gacey. Elle les apporta en mariage au sire Louis d'Estouteville
    dont j'ai eu plus d'une fois occasion de vous parler (V. supr. château de Briquebec. - Abbaye de Hambye, etc. ).
           Depuis ce temps la baronnie de Hambye partagea le sort de celle de Briquebec elle fut confisquée par Henri V roi d'Angleterre dcnnée au comte de Suffolk et à différents seigneurs Anglais qui la possédèrent jusqu'à la restauration de Charles VII et rendue à ses anciens possesseurs ou à leur famille en 1450 ; je n'ai pas besoin de répéter ce que j'en ai dit à l'article de Briquebec (V. supr. châteaux de l'arrondiss. de Vatognes. V. Grands Offic. de la Couron. tom. V. p. 550, et tom. VI. p. 91).
           Le château de Hambye était un des plus grands, des plus beaux et des mieux situés du département son enceinte était encore entière au commencement de la révolution le donjon et une autre tour qui subsistent aujourd'hui suffisent encore pour donner une grande idée de cette forteresse.
           Sa position domine majestueusementle bourg de Hambye. De tous les côtés ses ruines sont très pittoresques. Le donjon est très-bien conservé (Je disais ceci en 1823. Aujourd'hui peut-être il n'existe plus. Decembre 1825). Parmi tous les anciens châteaux du pays nous n'en avons aucun qui soit comparable à celui-ci. La belle conservation de ce donjon sa hauteur les guérites qui en couronnent le sommet en font un objet à souhait pour un dessinateur.
           Cette tour est la plus moderne je ne serais pas surpris qu'elle eut été terminée par Louis d'Estouville et Jeanne Paisnel sa femme dont la magnificence est remarquable dans toutes ses constructions, surtout a Hambye. Le puits de ce château est d'une largeur et d'une profondeur extraordinaires, il a été entièrement creusé dans le roc avec tant de frais et de travaux que, suivant la tradition locale la dépense en fut aussi forte que celle de la construction du superbe chœur de l'égiise abbatiale.
           Le donjon est carré (Voyez dans l'atlas la vue chateau de Hambye que M. Ch. de Vauquelin a lithographié avec son talent ordinaire.) : il a au moins cent pieds de hauteur il est flanqué de tourelles dont la plus considérable est celle qui contient l'escalier. Sous le premier palier de l'escalier on voit une chambre qui a probablement servi de citerne.
          La chapelle était au rez-de-chaussée de cette tour. Les étages au-dessus contiennent chacun un appartement simple solide et sans moulures ou décorations. Tous ces appartements sont voûtés.
           Une platte-forme assez spacieuse est au sommet. Les guérites sont aux quatre angles de cette platte-forme elles font saillie et sont soutenues par des consoles. Le couronnement de cette tour est encore très entier ; ses crénaux et ses consoles sont d'un bel effet.
           Une autre tour également bien conservée est entièrement ronde. Extérieurement elle est décorée de cordons qui en marquent les différents étages. Le couronnement de cette tour est démoli ; intérieurement on ne retrouve ni voûtes ni planchers.
            Celle-ci est plus rapprochée du bourg que le donjon. Elle est connue sous le nom de Tour de Moyon. Je la crois d'une construction plus ancienne que l'autre. Dans le 14e siècle les Paynel avaient la baronnie de Moyon avec celle de Hambye l'un d'eux aura fait construire cette tour qui porte encore son nom.
           En 1417 (18), au mois de mars le château de Hambye fut rendu aux Anglais par Jehan de Soulle écuyer de Messire Philippe de la Haie, chevalier et capitaine de Hambye (Rymer, Tome IX). Le comte de Glocester, qui s'en était emparé, accorda à ceux de la garnison et aux autres qui ne voulurent pas se soumettre au Roi d'Angleterre la permission de se retirer ailleurs.
           Ce château fut repris aux Anglais en 1450, immédiatement après la bataille de Formigny et rendu par le Roi Charles VII à la famille de ses anciens possesseurs avec la seigneurie du Mesnil-Éron à Percy et celles de Chanteloup, de Moyon et de Briquebec (Vie du connétabte par G. Gruel, Monstrelet, Chartier etc. Titres du château de Torigny).
    Le 25 de novembre suivant quoique les Anglais eussent perdu toutes leurs forteresses du Cotentin il restait encore dans le pays plusieurs compagnies de troupes étrangères. Elles reçurent l'ordre de quitter sous dix jours il y en avait encore à Hambye et à Chanteloup (Mss. de M. le Franc).
           Depuis le 15e siècle l'histoire ne parle plus du château de Hambye. Il y a bien parmi les anciennes familles de ce quartier quelques traditions relatives au temps de la ligue. On y fait jouer un triste rôle à Bertrand de Musillac (peut-être de Basillac) mais jusqu'à présent ces traditions m'ont été données d'une manière si vague que je n'en ai pu tirer aucun parti. Cependant je suis convaincu qu'elles ne sont pas entièrement destituées de fondement, et qu'elles ont quelque rapport à des événements de la fin du 16e siècle. Avec de la persévérance je ne doute pas qu'on ne parvienne à tirer de cette tradition obscure quelque fait relatif à l'histoire du château qui fait le sujet de cet article.
          Depuis les dernières guerres civiles la baronnie de Hambye avait graduellement et insensiblement perdu son ancienne importance. Elle était devenue depuis longtemps la propriété des seigneurs de Torigny qui avaient entièrement négligé ce château depuis le temps de Louis XIV. Ses ruines, les plus pittoresques du département, ne pouvaient avoir de prix que pour les amateurs de belles perspectives et pour les dessinateurs. Celui qui en a fait l'acquisition durant la révolution l'a démoli plus lentement que les autres édifices du même genre ne l'ont été depuis le commencement de l'ère de destruction qui semble être encore loin de son terme.
           Le département a fait des démarches pour l'acquisttion et la conservation des restes de ce château, mais elles n'ont pas réussi d'ailleurs il faut convenir que si ses ruines et leur position sont remarquables, c'est à-peu-près tout ce qu'on en peut dire de mieux et que peu de souvenirs importants se rattachent à son existence.
           Il n'existe à Hambye aucunes traces d'un château antérieur à celui-ci ; il n'y a cependant pas de doute que les Paynel n'en eussent un dès le temps de la conquête et quand ils fondèrent l'abbaye. A cette époque et jusques dans le 15e siècle leur famille fut une des plus illustres et des plus puissantes de la province.
          Celle d'Estouteville qui lui succéda ne l'était pas moins. La défense immortelle du Mont-Saint- Michel par Louis d'Estouteville en 1424, donna un nouveau lustre à cette famille.
           Les Matignon qui furent les derniers propriétaires de Hambye avaient depuis un siècle, changé leur nom en celui de Grimaldi, et portaient le titre de princes de Monaco.
           Dans le livre rouge de l'échiquier du roi Henri II et dans le registre des fiefs de Normandie sous le règne de Philippe-Auguste (Lib. rub. Scaccarii penès nos, pag. 1. Lib. feod. domini régis Philippi ib., p. 1, 2 et 5) on trouve beaucoup de détails sur la famille Paynel et sur ses grandes possessions à la fin du 12e siècle et au commencement du 13e. Ces détails seraient trop longs je ne fais que les indiquer.
          J'indique également ceux que donne Laroque dans son histoire de la maison d'Harcourt ceux qui se trouvent dans l'histoire des grands officiers de la couronne sur les Paynel les Estouteville et les différents possesseurs de la baronnie de Hambye. Les renseignements que je pourrais tirer de ces ouvrages, formeraient un volume étendu (Laroq. Harc. tom. 1 pag. 141 et seqq. page 268 et 69. Mes extr. de t'bistoire des grands offic. p. 76, Mes familles Anglo-Normand., p. 115). Les mêmes ouvrages indiquent les armoiries de tous les barons de Hambye.
           J'ai fait faire pour le département un dessin des deux tours qui restent encore de ce château ; la forme de ces tours y est passablement rendue mais rien n'y fait soupçonner la beauté de leur position.
           M. Charles de Vauquelln membre de la société des Antiquaires de Normandie, a bien voulu lithographier cette vue qui se trouve dans l'atlas ci-joint.

     

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    70. CHATEAU DE MAUNY A HAMBYE.

     

          Dans la même paroisse, tout près de la rivière de Sienne, un peu au-dessous des ruines de l'abbaye, on trouve l'emplacement d'un autre château qui n'exista pas avant le 14e siècle, et qui dès le 16e avait perdu toute son importance.
           La famille de Mauny dont cette forteresse portait le nom était étrangère à notre département elle y vint dans le 14e siècle, à la suite du connétable du Guesclin. Hervé de Mauny cousin-germain de ce fameux guerrier, le suivit dans presque toutes ses expéditions.
           En 1372 il fut fait chambellan du Roi Charles V et un des capitaines généraux de la Normandie.
           En 1370, il avait acheté la seigneurie de Torigny ; en 1388, il commandait les troupes du Roi dans le Cotentin, avec Guillaume Paynel, baron de Hambye (Mss.deM.le Franc. ) son fils Olivier fut après lui, seigneur de Torigny un autre de ses enfants était seigneur de Saint-Aignan. Olivier eut pour successeur un fils du même nom qui fut dépossédé de la chatellenie de Torigny par les Anglais, en1418. Il fut un des principaux défenseurs du Mont-Saint-Michel en 1424 ; il y fut inhumé en1456. Il avait épousé Catherine de Thieuville héritière de la branche aînée des anciens seigneurs du Mesnil-Garnier (Géneal. de la famille de Thieuville au chateau de Saint-Pierre-Èglise, communiquée par M. le baron de Blangy. ) qui lui avait apporté de grands biens en mariage.
            En parlant du Mesnil-Garnier et de Torigny je dirai ce que devinrent les grands revenus des Thieuville et des Mauny.
           A l'époque ou cette famille obtenait en France des honneurs mérités un capitaine du même nom se distinguait encore davantage enAngleterre.
           Tous ceux qui connaissent les chroniques de Froissart, voient que je veux parler du fameux Gautier de Mauny, que sa qualité d'ennemi n'a pas empêché de citer comme un modèle de la bravoure loyale et chevaleresque du siècle ou il a vécu. Au surplus, sa famille était du Haynaut, et je doute qu'il y eût entre lui et le compagnon de du Guesclin aucun rapport de parenté.
           Dans la carte du diocèse de Coutances par Mariette l'emplacement du château de Mauny est marqué le long de la rivière entre l'abbaye de Hambye Saint-Denis-le-Gast et Saint-André-du-Val-Jouais sur celle de Cassini il porte le nom de Mont ou Motte de Mauny. Je ne connais point d'événements relatifs à cette forteresse.

    71. CHATEAU DE GAVRAY.

     

          Au temps des ducs de Normandie qui ont régné en Angleterre, Gavray avait dans la hiérarchie châtelaine à peu-près le même rang qu'il occupe aujourd'hui dans celle de l'administration. Son château était du domaine de la couronne et voilà pourquoi ce nom ne se trouve sur aucune liste des seigneurs qui furent à la conquête.
           Peu après la mort de Guillaume-le-Conquérant, Henri le plus jeune de ses fils devenu comte du Cotentin y fortifia les principaux châteaux de son domaine (Orderic Vital. apd. Duchesne, Normann. script., page 665 et 89 – Dumoulin, Hist. de Norm. p. 25 et entr'autres celui de Gavray. Ces précautions furent inutiles ; Henri ne tarda pas à perdre toutes ses forteresses et tout le Cotentin.
          Dans le siècle suivant, sous le règne de Henri II, le château
    de Gavray avait conservé son importance. Roger de Montaigu, Raoul de ThIeuville, seigneur du Mesnil-Garnier, Helio d'Amondeville, Raoul de Ver, Richard de Rollos et d'autres seigneurs y devaient le service militaire (Lib. rub. Scaccar. traduct. de Ducarel, page 232).
    Quand Philippe-Auguste eut recouvré la Normandie, Raoul de Thieuville, seigneur du Mesnil-Garnier, Monceaux à Contrières, !e Mesnilhue etc. devait en temps de guerre faire le service à la principale porte du même château (Lib. feod. reg. Philippi, penès nos, page 1 et 7).
           Guillaume de Ver, et Agnès de Valencé y devaient aussi chacun le service d'un chevalier, Guillaume de Montaigu celui d'un quart de chevalier seulement (lbid).
           En 1327, les possesseurs des mêmes fiefs étaient encore assujettis à la garde du même château. L'état des fiefs de l'élection de Coutances, dressé alors par Godefroy-le-Blond grand bailly du Cotentin, donne sur ce service des détails plus circonstanciés que ceux du temps de Henri II et de Philippe-Auguste ; ils seraient trop longs ici (Penès nos).
           Quelques années auparavant (en 1322), Philippe-le-Bel avait fait enfermer au château de Gavray, Blanche, femme du prince Charles, son fils convaincue du crime d'adultère (Villaret, hist. de France, tome VII).
    En 1328 Gavray fut cédé à Jeanne, Reine de Navarre, et mère de Charles-le-Mauvais à titre d'indemnité.
           Vers le milieu du 14e siècle, le Roi de Navarre en fit augmenter les fortifications et cette place devint entre ses mains une des plus fortes de la Normandie.
           En 1354, le Roi Jean rendit une ordonnance pour saisir toutes les places fortes et les possessions du Roi de Navarre dans le Cotentin mais Mortain, Avranches, Cherbourg et Gavray refusèrent d'ouvrir leurs portes, et ne purent y être forcées. Le Roi de France pouvait bien alors rendre de pareilles ordonnances mais il était trop faible pour les faire exécuter. Bientôt, un traité honteux conclu à Valognes le 10 septembre 1355 (Apd. Martenne miscell. epist., p. 132) en assura de nouveau la possession à Charles-le-Mauvais et lui rendit tout ce qu'on avait confisqué un an auparavant.
           L'année suivante le Roi Jean fut fait prisonnier à la bataille de Poitiers, et le Roi de Navarre put impunément nuire à la France.
           Au commencement du règne de Charles V, la victoire de Cocherel rendit les Français maîtres de la campagne en Normandie. Du Guesclin vint assiéger et prit quelques places dans le Cotentin mais une nouvelle guerre en Bretagne interrompit bientôt le cours de ses succès : l'armée Française y perdit la bataille d'Auray ; Du Guesclin y fut pris. La paix de Saint-Denis rendit au roi de Navarre toutes les places qu'il avait perdues dans le Cotentin. Gavray ne fut pas de ce nombre il n'avait pas été pris, ni même assiègé.
           En 1378 un complot de CharIes-Ie-Mauvais contre la vie du Roi de France, fut découvert : Du Guesclin envoyé pour réduire ses forteresses, s'empara de la plupart sans beaucoup de peine Gavray fit une longue résistance ; C'était alors, dit Froissart, le plus beau châtel de toute la Normandie le commandant d'Évreux s'y était enfermé bien résolu de s'y défendre jusqu'à la dernière extrémité. Le siége traînait en longueur, lorsque le gouverneur étant allé imprudemment avec une chandelle allumée dans une tour ou étaient les poudres le feu y prit et le tua avec tous ceux qui l'accompagnaient.
           Cet accident jeta la consternation dans la place, et en accéléra la reddition. Les trésors du Roi de Navarre y étaient déposés ; ils se montaient a soixante mille francs d'or. Il y avait en outre trois couronnes fort riches et quantité de pierreries qui avaient appartenu aux Rois de France. On remit ce trésor au sire Bureau-de-la-Rivière, qui le désirait fort, et le château fut démantelé (Villaret hist. de France. Secousse mem. du R. de Nar. Froissart).
           Peu de temps après la mort du Roi de Navarre ( arrivée en 1386), les troupes du Roi de France commandées par Thomas de Grafart avec l'aide des Grands baillis de Caen et du Cotentin rasèrenties fortifications de Gavray (Mss. de M. le Franc).
           Cette double démolition explique la faciiité avec laquelle ce château jadis si fort fut pris par les Anglais en 1418. Quoiqu'ils en eussent rétabli les fortifications durant leur longue occupation de la Normandie cette forteresse ne tint pas non plus bien longtemps en t449 contre les troupes du duc de Bretagne, commandées par le comte de Richemont, qui reprirent alors, sans beaucoup de peine, presque toutes les places occupées par les Anglais dans le Cotentin (Vie du connétable de Richemont, par Gruel p. 139. Monstrelet, tome 3, p. 115, verso).

          Pour récompenser les services éminents que le comte de Richemont, connétable de France lui avait rendus dans ses guerres contre les Anglais, le roi Charles VII par lettres datées de Tours en 1450 lui donna la ville terre seigneurie et vicomté de Gavray pour en jouir durant sa vie seulement (Hist. des grands offic. de la couronne tome 9, p.379).
           Depuis ce temps, je ne vois dans l'histoire rien qui me porte à croire que le château de Gavray ait été dans le cas de résister à dé nouvelles attaques. Il a été si complètement démoli qu'il en reste à peine quelques traces.
           Il était sur une hauteur escarpée, tout près du bourg de Gavray vers le levant son enceinte était considérable. Au lieu de fossé, un vallon étroit et profond l'entourait. Il était impossible de le combler de sorte que cette position à peu près inaccessible, réunissait les plus grands avantages avant l'invention du canon. Aujourd'hui elle serait commandée presqu'à bout portant.
           On n'y trouve plus de murs mais on peut en suivre la trace à fleur de terre. On voit dans l'enceinte les restes d'une citerne avec quelques-uns des trous ou conduits par où les eaux pluviales y arrivaient.
          Du sommet de la hauteur où il était situé la vue s'étend sur un pays couvert de bois et de coteaux, le long des vallées où coulent les rivières de Sienne et d'Airou.

     

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    72. LE MESNIL-GARNIER.

     

          Nous avons vu quel service les seigneurs du Mesnil Garnier devaient au château de Gavray dans les 12e, 13e et 14e siècles. Ces Seigneurs appartenaient à la famille de Théville ou de Thieuville qui tirait son nom d'un fief de la même dépendance. Radulfus de Thevill tenet feodum 1 militi apud  mesnilllum-Garnier ad quod pertinet le Mesnil-Hue (paroisse voisine) Moucheaus et Thevill et debet servicium ad majorem portam de Gavreio tempore guerre (Ex Libro feodorum Domini Regis Philippi penès nos ; page 7.)
           Cette famille de Thieuville qui a donné au diocèse d'Avranches un évêque dans le 13e siècle, un abbé à Lessay et un évêque à Coutances, dans le 14e avec deux abbesses à l'abbaye Royale de Caen était très-considérable au siècle de St.-Louis si l'on en juge par l'épitaphe de Raoul de Thieuville, évêque d'Avranches qui mourut en 1286 (V. Gall. Christ., tome XI col. 435. Abbatissae cadomi XXVII et XXX, 487 Episcopi Abrinc. XXXV colonn. 885 Episc. Constant. n°. XLVIII. lbid colonn. 920 Abbates Exaquii, n. XXV).
           Tous les biens de la branche aînée, et notamment la seigneurie dn Mesnil-Garnier passèrent dans une autre maison par le mariage de Catherine de Thieuville héritière de cette branche avec Olivier de Mauny, baron de Torigny celui-ci ne laissa qu'une fille de ce mariage elle épousa (Hist. de Matign. p. 10. Gds. Offic. de la couronne tome V, p. 382. Beziers hist des gds. baillis de Caen p. 93) Jean Goyon de Matignon qui devint ainsi seigneur de Torigny et du Mesnil-Garnier. Alain de Goyon, son second fils, était seigneur de cette paroisse en 1470 et grand bailli de Caen (V. Beziers, ibid sup. – La branche Cadette desThieuville conserva la seigneurie de Guéhébert, dont elle porte souvent le nom dans les 15e et 16e siècles. Elle acquit les seigneuries de Montchaton, de Saint-Patrice de Claids, de Graignes et de Briquebosq. Le marquis de Thieuvitie mort en 1786 fut le dernier de cette famille qui, dès le 13e siècle avait produit tant de Mars et tant du Soleils (unde tut Martes et tot sotes). Son fils unique héritier de ce nom illustre, fut tué à la chasse en 1769.
          Ses deux filles, Ies dames d'Octeville et de Thiboutot, vivent encore elles n'ont pas dégénéré. Je ne crains pas d'être accusé de flatterie, en assurant que leurs vertus, leur loyauté et leur bienfaisance sont au-dessus de tout éloge.
    ).

          Après être restée longtemps dans la famille de Matignon, cette seigneurie fut vendue au commencement du 17e siècle à Thomas Morant qui bientôt après cette acquisition prit le titre de baron du Mesnil Garnier. Ses descendants firent ériger cette terre en marquisat (Gds. offic. de la couronne, tome IX p. 321). Les Poilvilains, comtes de Cresnay devinrent possesseurs du Mesnil-Garnier après les Morants. Les possesseurs actuels appartiennent à la famille Génoise de Cambiaso qui a occupé la première place dans son pays et en a eu une très distinguée en France.
           Le Mesnil-Garnier est à peu-près à une lieue au sud-ouest de Gavray. Je n'ai pu y retrouver le lieu ou fut jadis le château des Thieuvilles. Dans le 17e siècle il avait fait place à la magnifique habitation qu'y construisirent les Morant. Ce château qui prouvait l'opulence et le bon goût de ceux qui le firent bâtir a disparu à son tour. Les comtes de Cresnay ne se sont pas même crus dans le cas de l'entretenir.
           Ils l'ont fait remplacer par une petite habitation commode et bien distribuée qui est déjà en décadence, Les plantations des Morants et la disposition du terrain suffisent encore dans leur état d'abandon et de dégradation pour attester leur magnificence et leur bon goût. Le voyageur qui parcourt ces alentours est encore frappé de ces accessoires abandonnés d'un château qui n'existe plus.
           Un couvent de Dominicains et un hospice d'aliénés furent fondés au même lieu par ces seigneurs, et subsistèrent jusqu'à la révolution comme des témoins irrécusables des idées religieuses et vraiment patriotiques des hommes du siècle de Louis XIV.
           Les armes de Thieuville sont d'argent à deux bandes accompagnées de sept coquilles de même, 2, 3 et 2.
           Les Morants portaient d'azur à trois Cormorants d'argent.
           Et les Poilvilains partie d'or et d'azur.

     

    73. MONTAIGU-LES-BOIS.

     

          Si l'on en juge par le service qu'ils devaient au château de Gavray, les seigneurs de Montaigu étaient inférieurs à ceux du Mesnil-Garnier mais si une part distinguée à la conquête d'Angleterre si de grandes récompenses de la part du Conquérant, si une importance signalée en France et surtout en Angleterre sont de justes motifs de compensa-
    tion, Montaigu mérite encore plus l'attention de ceux qui recherchent le berceau des familles Anglo-Normandes.
           Nous avons en Normandie plusieurs paroisses de Montaigu il y en a deux dans le département de la Manche mais c'est dans le canton de Gavray qu'il faut chercher l'origine de la famille qui porte ce nom et de son château.
           Drogon de Montaigu qui était à la conquête d'Angleterre eut des descendants en Normandie aussi bien que dans le pays conquis. Sa postérité a possédé la seigneurie de Montaigu les-Bois jusqu'à la mort de Sébastien de Montaigu arrivée en 1715. Il ne laissa point de postérité, et cette seigneurie passa dans la famille de Cresnay (Poilvilain) par le mariage de sa soeur avec Georges de Cresnay vers 1683 (La Chesa. D. B. dictionn. de la noblesse verbo Montaigu).
    En 1249, Richard de Montaigu y fonda la chapelle du château elle y subsistait encore en 1775.
           Les armes des Montaigu de notre département étaient d'argent à deux bandes de sable accompagnées de sept coquilles de même.
    Ces armes qui, sauf les couleurs sont les mêmes que celles de Thieuville me semblent indiquer une grande probabilité d'origine commune avec les anciens seigneurs du Mesnil-Garnier. L'usage des brisures par le changement des couleurs a été assez fréquent entre dinérentes branches d'une même famille. Je ne donne d'ailleurs ceci que comme une conjecture.
           La famille de Montaigu, très puissante et très illustre en Angleterre, y a subsisté encore plus longtemps qu'en Normandie. Le duc de Manchester se fait honneur d'en être descendu. Voici en partie le précis généalogique de cette famille.
          Drogon qui se trouva à la conquête dans le corps d'armée de Robert comte de Mortain, était particulièrement aimé de ce Prince qui donna à un de ses propres châteaux dans le comté de Somerset, le nom de Montaigu, soit en honneur de son ami, soit (ce qui me paraît plus probable) parce que ce château était bâti sur une montagne (Collinson hist, of Somersetshire tome 1 p. 49, 95, 99, 312, 313, etc. ).
           Vers la fin du règne de Henri ler, Guillaume de Montaigu succéda à Drogon son père. Richard qui vint après Guillaume mourut la huitième année du règne de Henri II, laissant ses biens à Drogon deuxième du nom, son fils : celui-ci épousa Olive, fille d'Alain Basset ; il en eut un fils nommé Guillaume qui, pour sa part de la rançon de Richard-cœur de-Lion, fut imposé à une somme considérable. Deux autres Guillaumes se succédèrent sous le règne de Henri III ; Simon vint après eux sous le règne d'Edouard 1er puis un autre Guillaume sous celui d'Édouard II. Après lui deux autres Guillaumes furent successivement comtes de Salisbury. Tout le monde a entendu parler de la bravoure mais bien plus encore de la beauté de cette fameuse comtesse de Salisbury pour l'amour de laquelle (dit-on) le roi Édouard III établit, en 1349 l'ordre de la jarretière. Elle était la femme de Guillaume Montaigu, second comte de Salisbury un des plus fameux guerriers de son temps (Banks extinct. Baronnage tome III p. 649 et seqq. Collins's Peerage, édit. de 1711 tome II - part. Il p. 214 et 215. V. Le Froissart de Bucbon. tome II. p.172. Note). Il fut le septième des chevaliers du nouvel ordre élus à la première promotion. Il s'était particulièrement distingué à la bataille de Crécy quelques années avant cette institution à celle de Poitiers en 1356, il commandait l'arrière-garde de l'armée Anglaise. Jean de Montaigu lui succéda il prit le parti du roi Richard II contre Henri IV et perdit la vie sur l'échafaud. Thomas son fils fut nommé lieutenant-général de la Normandie pendant que les Anglais la possédèrent sous les règnes de Henri V et de Henri VI. Il réduisit beaucoup de forteresses dans notre province battit l'armée du Roi de France à Crevant aida le duc de Bedford à remporter la victoire de Verneuil et fut dans ces guerres un des plus grands généraux que les Anglais eussent en France (Banks, Collins La Chesn. des B. ubi supr.).
          Nous pourrions suivre cette famille vraiment historique jusqu'à des temps très rapprochés : nous trouverions un duc de Montague dont le titre s'est éteint de nos jours (Banks extinct. baronnage, v°, Salisbury, tome III p. 530 et seqq. Ibid. p. 655 et 654) nous verrions qu'aujourd'hui encore les familles les plus distinguées de la Grande-Brétagne cherchent à se rattacher à ce nom nous en reconnaîtrions qui se distinguèrent en France sous le règne de Philippe-Auguste, de Philippe-le Hardi et de Philippe-le-Bel, et combattirent à Poitiers contre leurs parents d'Angleterre. On n'en finirait pas si on voulait rapporter tous les services des Montaigus leurs exploits leurs fondations religieuses.
    Croirait-on après cela que le château de Montaigu ne vaut pas la peine d'être examiné qu'il n'y a ni mottes ni fossés ni à peine la trace d'anciennes fortifications c'est pourtant ce que j'ai vérifié il y a peu d'années (8 juin 1822). Ce qu'on appelle l'ancien château est sur un terrain uni et qui ne semble pas avoir été susceptible de défense. Le manoir est à quelques centaines de mètres au midi de l'église près d'un petit ruisseau qui en remplit l'étang. Les derniers propriétaires qui l'habitaient au commencement du dix-huitième siècle étaient de la famille de Cresnay.
           Dans l'église qui n'est ni ancienne ni remarquable, il y avait un caveau funéraire où l'on a déposé dans le 18e siècle le corps d'un chevalier de Cresnay et celui d'un enfant.
           Les armes des Montaigus d'Angleterre ont extrêmement varié. Des alliances, des adoptions, et plusieurs autres raisons particulières à la Grande-Brétagne, ont souvent fait changer dans ce pays les écussons primitifs des familles qui ont la prétention de remonter à une origine Normande. On sent combien cette variation a du apporter d'embarras dans mes recherches. Ce qu'il y a de plus fâcheux c'est que cette instabilité remonte jusqu'au temps des ducs de Normandie qui furent rois d'Angleterre et que le remède de ce mal ne peut pas même se trouver dans les archives des hérauts d'armes.
           Je n'indiquerai pas les différentes armoiries des Montaigus d'Angleterre, elles sont trop nombreuses. Je citerai seulement une partie des ouvrages où l'on peut les examiner (Banks extinct. Baronnage tome III p. 530. Hutchins Dorset Collinson Somerset, tome 1).
          Nous avons dans le département de la Manche deux autres châteaux de Montaigu l'un est à Montanel arrondissement d'Avranches près de l'ancienne limite de la Bretagne. En vous donnant mes recherches sur les anciens châteaux de cet arrondissement je vous dirai ce que je connais de celui-ci l'autre est tout près de Torigny je vous en parlerai aussi quand nous serons à l'arrondissement de Saint-Lo.

     

         Aujourd'hui cette indication me conduit naturellement à donner publiquement une explication qui m'a été dernièrement demandée par un de nos savants compatriotes que la société des Antiquaires se fait gloire de pouvoir compter sur la liste de ses membres, et qu'elle a unanimement choisi pour le premier de ses directeurs.
           M. l'abbé de la Rue craint que je n'aie trop multiplié le nombre des forteresses de mon département en opposition à la jurisprudence « castrale établie dans le moyen âge et notamment dans une assemblée des barons tenue à Caen sous Robert de Courteheuse. Cette assemblée ne fit que confirmer les lois établies par les premiers ducs de Normandie lois qui furent et depuis le retour de la Normandie à la France.
           Il semble ajoute notre savant collègue que j'aurais du borner l'indication de nos châteaux forts à ceux des barons qui allaient de plein droit à l'échiquier de Normandie sous les Rois de France. "
           La réponse que j'ai faite à ces objections est toute simple elle sort naturellement de mon travail en le lisant on verra que je n'ai pas cherché à établir une jurisprudence castrale différente de celle qui est fixée par l'assemblée des barons dont je remercie notre savant collègue de m'avoir donné l'indication. Mais le droit et le fait sont souvent en contradiction ils l'ont été d'une manière évidente aux époques indiquées par mon introduction. Plusieurs châteaux-forts qui n'appartenaient pas à des baronnies donnant droit de séance à l'échiquier ont été assiégés, pris ou démolis. Parmi ceux-là je citerai dans la presqu'île du Cotentin Saint-Pierre-Église, Grenneville, Beuseville la Bastille, l'Estre ; dans l'arrondissement de Coutances je puis citer Canville, Lithaire, le Plessis, Montchaton, Briqueville, Regniéville, Chantetou ; je pourrais rappeler ce que j'ai dit des désordres qui permirent de fortifier tant de châteaux (sans droit si l'on veut) sous les règnes du duc Guillaume, de Robert Courteheuse lui même et sous tant d'autres que j'ai indiqués.
           En lisant chacun de mes articles on voit que je ne donne pas à mes châteaux plus de fortifications qu'il ne leur en appartient. Quand je pèche c'est par omission et la preuve que je n'en dis pas trop c'est que je ne retrouve qu'une petite partie de ces châteaux que les comtes deChester et d'autres barons du 12e siècle fortifiaient par douzaines et par trentaines (Voici des passages d'historiens contemporains qui pourront servir à prouver combien la Jurisprudence castrale établie par Robert Courteheuse a été mal observée de son temps et à des époques trés rapprochées les expressions des auteurs me semblent faire allusion aux objections dont je viens de parler. Après la bataille de Tinchebray où Robert Courtebeuse fut fait prisonnier avec le comte de Mortain celui-ci perdit tous ses châteaux, " omnia castella comitis Moritonii. Guill. Gemet. 1. VIII apud Duchesne, Norm. scriptores, p. 298.
           En parlant de la puissance de Robert de Bellesme qui vivait à la fin de l'onzième siècle Orderic Vital dit qu'il possédait trente-quatre castella munitissima, apud Duchesne Norm. script. p. 708.
           Voici un autre passage ou l'auteur en peignant l'état malheureux de la Normandie du temps de Robert Courtebeuse parle des châteaux élevés contre le droit qui couvraient la province : Adultérina passim municipia condebant et ibidem filii luporum ad dilacerandas bidentes nutriebantur. "
          Un autre historien emploie encore une expression analogue en partant du règne d'Étienne de Blois : Singuli sibi castella
    construxerunt et adversus eum tenuerunt. Terram castellis impleverunt. " Chronicon Saxon. Gibson. p. 103.
           Je citerai encore un exemple, parce qu'il appartient à une
    autre des époques que j'ai indiquées dans mon introduction. C'est celle de la minorité de Guillaume-le-Conquerant : Sub
    ejus ineunte aetate Normannorum plurimi aberrantes ab ejus fidelitate in plura loca aggeres erexerunt et tutissimas sibi munitiones cunstruxerunt. " Gemet. de duc. Norm. L.VI Camden's collect., p.649.
          En donnant ici le précis des réponses faites à notre savant collegue, j'espère avoir démontré que mon opinion est fondée ; je crois même pouvoir assurer qu'il en a été généralement satisfait de mon côté je me plais à reconnaître que je n'ai jamais été attaqué d'une manière plus franche plus rigoureuse et plus faite pour jeter de la lumière sur une question.
          Il est impossible de trouver un adversaire plus loyal et plus savant.
    ).

          Je n'ai jamais prétendu que tous ces châteaux fussent des forteresses il en est beaucoup qui ont pu à peine résister à un coup de main du seigneur voisin mais le besoin de tout fortifier, besoin qui s'est fait sentir même sous le règne de Henri IV, permet l'emploi du mot château-fort, auquel je ne donne qu'une importance relative.
            En donnant de la publicité à une réponse que j'ai déjà faite à notre savant et respectable collègue, je n'ai eu qu'un motif celui de donner à la société des Antiquaires de Normandie une explication dont un homme aussi éclairé que lui a cru avoir besoin. S'il ne m'a pas bien compris il faut que ce soit ma faute. Je crois devoir m'empresser de la reconnaître et de la réparer.
           On m'a proposé une autre difficulté bien moins sérieuse en me disant que j'avais omis bien des circonstances relatives à plusieurs de mes châteaux. Je le sais et je reconnais encore une fois la vérité de ce reproche mais si on eût voulu avant de le faire lire attentivement mon introduction, on aurait vu que loin de prendre l'engagement de tout dire je ne donnais que des recherches et que souvent je serais obligé
    de convenir que je ne pouvais rien dire. Je prie donc ceux qui auraient encore l'idée de me faire de pareilles objections de vouloir bien me donner leurs renseignements sans reproche et de compter sur ma reconnaissance.

    Charles de Guerville

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  •  ... Suite de l'arrondissement de Coutances : cantons de Perriers, Lessay, Saint-Malo-de-la-Lande, Saint-Sauveur-L'Endelin, Coutances, Montmartin-sur-Mer.

    Pour revenir au précédent canton de la Haie-duPuits, aller ici. [NdB]. 

     

    CANTON DE PERIERS.

     
    43. CHATEAU DU PLESSIS.

     

         Voici le second canton septentrional de l'arrondissement de Coutances. Nous joindrons à cette division celui de Lessay quoique un peu méridional. Ceux de Saint-Malo de la Lande et de Coutances, formeront la division du centre celle du midi sera composée des cantons de Montmartin-sur-mer, de Bréhal et de Gavray. De cette manière nous parviendrons facilement jusqu'aux limites de l'arrondissement d'Avranches.
          Le château du Plessis est tout près du canton que nous venons de quitrer. Le mont de Lithaire est au bout du Montcastre sur ce dernier canton. La majeure partie du Montcastre vers le levant à un quart de lieue de Lithaire dépend de la paroisse du Plessis.
          Le château du Plessis situé à une lieue au levant de celui de Lithaire, a eu comme celui-ci une origine antérieure à la conquête, bien plus, il était démoli alors.
          Au commencement du règne du duc Guillaume, il appartenait à Grimoult qui, vers î046 (Gall. Christ. XI. col. 441. instrum. Col. 65 - Guill. Pict. apud Duchesne Nom. scrip. col. p. 179. Guill. Gemetic, ibid. p. 275 chroniq. chez le Mégissier p. 71, 72 et 73. Wace Roman de Rou.), fut dans le Cotentin le principal agent d'une conspiration pour ôter au jeune souverain les états et la vie. On connaît les détails de cette conspiration, le danger que courut le prince au château de Valognes, où il faisait alors sa résidence, la victoire qu'il remporta au Val-des-Dunes sur le comte de Brionne et ses partisans la fuite des chefs de ce parti la prison et la mort de Grimoult du Plessis. Mais ce qui pourrait jeter de l'incertitude sur le château qui nous occupe, c'est que Grimoult possédait aussi dans le Calvados le château du Plessis-Grimoult, qui fut confisqué par le duc Guillaume et où ce prince fonda un prieuré dont l'acte de fondation est
    remarquable par des expressions d'indignation et de courroux contre le dernier possesseur (Gall. Christ. at suprà).
          Il n'y a pas de doute que Grimoult possédait cette seigneurie dans le diocèse de Bayeux mais il est également constant qu'il tenait aussi le chastel du Plessis entre Coutances et Quérentan. (Chronique de Normandie. Le Mégissier p. 71 verso)

         Le duc fit démolir les forteresses de ses ennemis. Grimoult mourut dans les prisons de Rouen vers 1048.
           Depuis ce temps je ne vois rien qui me porte à croire que les fortifications du Plessis aient été relevées. Dans les chroniques et surtout dans les anciennes chartres en faveur de monastères et spécialement de l'abbaye de Lessay je trouve les noms de quelques seigneurs du Plessis (Ex dono Turstonis Halduc et Eudonis filii ejus et concessione et confirmatione Roberti de Haiâ et mimel uxoris et Ricardi et Radulfi filiorum corum ecclesiam sancti Ermelandi juxtà Plesseium (la chapelle Saint-Ermeland) et decimam partis suae de Manerio Plessei. Ex dono Roberti de Haia ecclesiam Sancti Quirini de Plesseio. (l'égl. du Plessis.) Neust. pia p. 618 et 619. ), mais nulle part il n'est parlé de leur château.
          Je n'oserais toutefois pas assurer qu'il n'a jamais été fortifié depuis le duc Guillaume.
          Quoi qu'il en soit, son emplacement est considérable et très pittoresque surtout au midi à quelques pas au-dessus du moulin en suivant la route de Coutances. C'est de ce point qu'il fut dessiné il y a quelques années par M. Cotman avec lequel j'étais. Mais comme il n'a pas publié la vue qu'il en avait prise il a été de nouveau dessiné et M. de Caumont compte publier ce dessin dans l'atlas du second volume
    des mémoires de la société des Antiquaires.
          Nous avons vu que sous le duc Guillaume et ses fils la seigneurie du Plessis était aux fondateurs de l'abbaye de Lessay. Le livre rouge de l'échiquier va nous faire connaître ceux qui l'avaient sous le règne de Henry II elle était alors aux Lahaie, Radus de Haia duo milites et dimidium de honore de Plesseio. (Lib. rubri Scaccarii penès nos, p. 2)
    En 1195, Philippe Auguste était en possession de la châtellenie du Plessis et la donna avec d'autres terres à Richard de Vernon en échange pour le château de Vernon. (Laroque hist. d'Harc. p. 186) Mais au temps de la confection du registre des fiefs le château du Plessis était au Roi de France : honor de Plesseiz quem rex tenet in manu sua debet servicium quatuor militum ( Lib. feod. domini régis Philippi penès nos, p. 1)

         Nous avons vu plus haut à l'article de Canville que le château d'Ollonde était dépendant de la baronnie (de honore) du Plessis.
    Depuis Philippe-Auguste la seigneurie du Plessis, devenue fiefferme avait perdu son importance. Elle fut concédée par Louis XIV aux ancêtres du duc de Coigny qui alors possédaient déjà d'autres biens dans le Plessis. (V. l'arrêt de Courcy 1767.)

     

    [ Ce château est évoqué dans un article de ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-du-plessis-lastelle-manche-a130752548 ] 


    44. CHATEAU DE GORGES

     

         La paroisse de Gorges est continue à celle du Plessis vers le midi.
    Un seigneur de cette paroisse était à la bataille de Hastings avec le conquérant. On trouve son nom sur presque toutes les listes. (Liste de Brompton, Duchesne, Masseville, Collinson, Somerset tome I. p. 154 et passim. Hutchins Dorset, tome II. p. 279 et seqq. jusqu'à 306) Il obtint des concessions dans le pays conquis où ses descendants devinrent très puissants par le mariage de Raoul de Gorges avec une héritière de Morville qui lui donna de grands biens et entr'autres les seigneuries de Wraxall et de Bradpole dans les comtés de Dorset et de Somerset. Les Baronnages éteints d'Angleterre donnent, ainsi que les historiens des deux comtés dont je viens de parler des détails très étendus sur cette famille.
          La quarante-septième année du règne de Henri en Angleterre Raoul de Gorges fut fait gouverneur du château de Sherburn puis Sheriff du comté de Devon et gouverneur d'Exeter son fils Raoul fut un des plus grands capitaines de son temps. La vingt-unième année du règne d'Edouard Ier il fut fait maréchal d'une armée que ce Roi envoya en Gascogne ou les Français le firent prisonnier au moment même ou il était occupé à rendre la justice cum sderet pro tribunali ad judicium faciendum (Henry Knyghton apud Twisden Angl. script. X. col. 2500).
          Je ne finirais pas si je voulais donner tous les détails sur l'illustration et la grande richesse de cette famille en Angleterre. D'un autre côté je ne serais pas moins embarrassé de vous dire ce qu'elle a fait en Normandie où il n'est pas certain qu'elle ait subsisté depuis les confiscations de Philippe-Auguste. Tout ce que j'en ai pu trouver c'est que le fief de Gorges relevait de la baronnie (honore) de Méautis et qu'il fut saisi par Philippe-Auguste au commencement du treizième siècle (Lib. feod. reg. Philippi penès no°. p. 5).
          Dès le règne de St.-Louis la paroisse de Gorges avait trois seigneurs et autant de cures, dont une était à la présentation de Robert de l'Epesse une autre à celle du Roi comme représentant le seigneur du fief confisqué sur Thomas de Gorges la troisième avait été aumonée au chapitre de la collégiale de Mortain par un seigneur de Camprond. Au commencement de !a révolution ces trois cures existaient et portaient les noms de l'Epesse, de Camprond et de Paris ou du Roi.
          Les mêmes raisons qui empêchent de suivre les traces des seigneurs de Gorges en Normande depuis ta conquête de l'Angleterre jusqu'au retour de la province sous la domination française, embarrassent également ceux qui veulent retrouver leurs châteaux. Je n'ai pu y rencontrer aucuns de ces emplacements qui comme au Plessis sautent pour ainsi dire aux yeux de ceux qui les cherchent ici il semble qu'il y en a plusieurs.
           Près de la chapelle Ste-Anne, à l'entrée du marais on voit une enceinte en terre, assez semblable à celles de nos redoutes modernes, sans aucune motte ou tertre.
          Un emp!acement plus probable de château à Gorges se trouve au levant delà chapelle Sainte-Anne sur Ie lieu nommé leCâteletde Gorges, situé près d'un pièce de terre de la ferme du Hommet appartenant à madame de Vauquetin descendue des Camprond. La butte extrêmement entamée de ce Câtelet et peu reconnaissable, est située entre deux pièces, dont une s'appelle le Gardin-Potier et l'autre le C!os-Guerrier. La place des fossés a été comblée et tellement applanie qu'on se doute à peine qu'il y en ait jamais eu.
          D'un autre côté on prétend aussi qu'il y a eu jadis un château-fort à la grande ferme nommée la Cour de Gorges à une demi lieue de la vers le couchant et bien plus près de l'Eglise, on en indique même l'emplacement à l'endroit où existent les ruines du colombier de la ferme.
          Mais dans toutes ces indications je ne trouve rien de positif de nouvelles recherches sont indispensables et je crains qu'elles n'aient pas un succès complet.
          Au surplus il ne faut pas s'étonner si l'on trouve à Gorges des traces d'anciennes fortifications à plusieurs places différentes. Nous avons vu qu'il y avait plusieurs seigneurs (V sup. page 238) qui portaient le nom de la paroisse et dont St.- Louis possédait les biens par confiscation Robert de l'Epesse chevalier, un des bienfaiteurs de l'abbaye de Blanchelande et les Camprond. Il n'en faut pas davantage pour expliquer les dîfferents retranchements de Gorges.et d'ailleurs en donnant cette explication comme plausible je suis loin de dire qu'elle est incontestable.

     

    46. CHATEAU D'AUBIGNY.

     

         La paroisse d'Aubigny est située à une lieue au levant du bourg de Périers c'est le berceau d'une famille très puissante en Angleterre et en Normandie, pendant le temps que le Conquérant et sa postérité régnèrent sur ces deux pays. Depuis le retour de notre province à la couronne de France les biens de cette famille en France, ont été réunis au domaine de la couronne mais en Angleterre elle n'a pas cessé d'être très puissante et très distinguée. Le premier duc de la grande Bretagne (le Duc de Norfolk) se fait encore aujourd'hui honneur d'en être descendu.
          Le seigneur d'Aubigny, qui accompagna le duc Guillaume à la conquête, était un des grands officiers du duché de Normandie. Dans presque toutes les listes de cette expédition il porte le titre de Bouteillier, que les auteurs Anglais traduisent en latin par celui de pincerna ou buti-
    cularius.
          Après la conquête, le titre de grand Bouteitler d'Angleterre fut donné à celui qui l'avait été en Normandie. Guillaume d'Aubigny portait ce titre au couronnement de Guillaume-le-Conquérant à Westminster il reçut de grandes concessions dans le comté de Norfolk (Will.d'Aubigny tenait une baronnie dans le Norfolk sous Henry II. Lib. nig. Scaccar. tome I. p. 286) à peu près à la même époque ( en 1177 ), Guillaume d'Aubigny fut créé comte de Sussex par Henri II, dans un conseil tenu à Northampton (Roger de Houeden apud Savile, p. 320).
          On trouve dans le baronage de Dugdale et dans les pairages d'Angleterre (Dugdale's Baronnage p. 109 et suiv. Collin's Peerage 1711, tome Il. Part. 9 à 15, Id. Earls of Sussex tome II. part. p. 525. --Id. Earls of Norfolk, ib. p. 234. et seqq. Banks Collins. id. Sire Brydges Dukes of Norfolk – V.Britton's topogr. of Norfolk p. Bloomfield Norfolk. Banks extinct. Baronnage tome 1. p. 71) de grands détails sur les seigneurs d'Aubigny dont les comtes de Huntingdon ceux d'Arondel et le duc de Norfolk sont descendus. Je ne puis que vous indiquer ces sources. Les détails sur la famille d'Aubigny et sur la branche qui prit le nom de Mowbray sont si abondans qu'ils pourraient remplir des volumes. Voici le précis des principaux : Parmi les grandes concessions faites à Guillaume d'Aubigny dans le comté de Norfolk on cite entr'autres la seigneurie de Bokenham, à laquelle le titre de grand bouteillier était particulièrement attaché.
          Un frère de Guillaume d'Aubigny figura aussi à la conquête de l'Angleterre il s'appelait Niel. Il aida au conquérant à soumettre le Northumberland. Cette branche joua un rôle important sous le règne de Guillaume Ier et sous celui de Guillaume le-Roux mais c'est surtout au règne de Henry 1er qu'elle doit son illustration et son immense fortune. Guillaume d'AubIgny, surnommé Breton pour le distinguer de la branche des Bouteilliers, était à la bataille de Tinchebray avec Henry 1er. Il y fit des prodiges de valeur, et fut en grande partie cause de la victoire décisive que Henry remporta (Banks extinct. Péérage, tome II p. 373 verbo Mowbray, dit qu'il possédait 120 fiefs de chevalier en Normandie et autant en Angleterre). La prison du duc Robert et la conquête de la Normandie furent le fruit de sa bravoure. Son prince l'en récompensa très largement il lui donna, en Angleterre seulement, plus de 500 seigneuries, dont la majeure partie avait été sous le règne de son prédecesseur confisquée sur Robert de Montbray, comte de Northumberland. Il mourut fort âgé sous le règne d'Etienne. Au commencement du règne d'Etienne il souscrivit une chartre donnée à Oxford par ce prince ( Ric. Prior. Hagulsav. apud Tvysden col. 315).
    Un historien contemporain (Rog. de Houeden apud Savili p. 456. Banks 2. p. 373) appelle Néel et non Guillaume celui dont la bravoure assura à Henry Ier la victoire de Tinchebray. On pourrait facilement concilier cette différence mais le fait principal existe ce n'est pas ici le lieu de faire une dissertation. Je crains que vous ne trouviez déjà mes détails trop longs sur les d'Aubigny d'Angleterre. Je vais les abréger autant que possible mais je ne dois pas omettre celui qui en 1142, était comte d'Arondel, qui avait épousé la veuve du Roi Henry 1er, qui reçut dans son château d'Arondel l'impératrice Mathilde femme de Géoffroy Plantagenet quand elle vint en Angleterre pour faire valoir ses droits à la couronne (Banks EarIs of Sussex, Baronnage tome III, p. 695.– Collins, édit. 1711, vol. II. part. I. p. 375. Chronic. Normann. apud Duchesne collect. p. 978).
          On peut voir des détails sur la continuation de cette famille dans les ouvrages que je viens d'indiquer dans le Baronnage de Dugdale et particulièrement dans la dernière édition du Pairage de Collins par sir Egerton Brydges (Tome I. p. 50 et seqq.).
          Je vous dois maintenant des renseignements sur l'état de cette famille en Normandie jusqu'au treizième siècle à l'époque des confiscations de Philippe-Auguste et comme il existe dans notre province plusieurs lieux qui portent le nom  d'Aubigny je vais tacher de fixer celui qui en fut te berceau. Il ne faut pas s'attendre à voir jouer a cette famille un rôle aussi important en Normandie qu'en Angleterre. Guillaume le Bouteillier d'Aubigny en Cotentin est cité parmi les
    bienfaiteurs de l'abbaye de Saint-Etienne de Caen à l'époque de sa fondation (Essais histor. Sur la ville de caen, tome 2 page 66).
    Parmi les bienfaiteurs de l'abbaye de Lessay je trouve Guillaume d'Aubigny et Roger son fils, qui lui donnent l'église et les dîmes de Fougères, paroisse limitrophe d'Aubigny,une partie de celles de Géfosses en Cotentin une terre à l'Inverville ; tout ce que les fils de Ranutf Espec tenaient jadis de la baronnie (de honore) d'Aubigny à Laune et à Lastelle ; la dîme de la foire Saint Cristophe et du marché d'Aubigny (Gall. Christ. XI. instrum. col. 236. Neustr. pia p. 620).
    Toutes ces places sont voisines d'Aubigny ; la foire Saint-Cristophe se tient encore sur un démembrement de la paroisse et l'on sait que le marché d'Aubigny a été transféré à Périers.
          Je vois dans Orderic-Vital, historien contemporain, qu'en 1158 le chef des partisans du Roi Etienne dans le Cotentin était le vicomte Roger, fils de Néel ; que Reuaud de Dunstanvitle, Baudouin de Reviers et Etienne de Magneville chefs du parti contraire !'attirèrent dans une embuscade ou ils le tuèrent, et que peu après ceux de son parti usèrent de represailles contre Baudouin de Reviers qui paulo ante Rogerium Nigelli filium trucidevit (Order. Vital. apud Norm. script. Coll. p. 915 et 16). Serait-ce Roger d'Aubigny ? alors il eut été d'un parti opposé à celui d'ArondeI. (v. supra)
          Quoique le nom d'Aubigny et celui de Montbray ( qui sous les règnes d'Etienne et de Henry II sont le même, se trouvent plusieurs fois dans le livre rouge de l'échiquier, je n'y trouve rien de positif relativement au service que devait au Roi le château d'Aubigny mais le registre des fiefs de Philippe-Auguste est plus clair.
          On y voit qu'il devait au Roi de France le service de deux chevaliers et demi. On y apprend en outre qu'il était alors possédé par le comte de Ponthieu, comes Pontivi (Lib. feodur. Philippi regis penès nos, p. 1 et 8).
    En 1216, Louis VIII Roi de France, réunit au domaine de la couronne la seigneurie d'Aubigny en Cotentin (Velly hist. de France, tome IV. in-12. Duchesne, Hist. d'Anglet. p. 123. Trésor des chartres de Normandie. ). Philippe d'Aubigny avait quitté le parti de la France pour celui de Henry III, fils de Jean sans terre. Louis VIII était d'autant plus mécontent que Philippe après avoir été un de ses partisans en Angleterre, avait par sa défection accéléré la ruine du parti français dans ce royaume.
    Avant cette confiscation il y avait à Aubigny un bourg dont le marché a été transféré à Périers, et des redevances considérables qui sont réunies au domaine de Saint-Sauveur-l'Endelin.
          Les archives du département si on parvient à les mettre en ordre fourniront je crois des détails curieux sur ce domaine dont Louis XII, quand il n'était encore que duc d'Orléans avait fait rédiger un registre très volumineux que j'ai vu naguères dans la vieille tour où sont entassés tous les titres du département.
           Outre les biens donnés aux monastères par la famille d'Aubigny elle avait fait aussi des donations considérables aux Templiers pour lesquels elle eut une prédilection particulière. C'est peut-être à ces grandes donations qu'il faut attribuer le peu d'importance des seigneurs d'Aubigny en Normandie tandis qu'ils étaient si puissants en Angleterre. Voilà sans doute aussi pourquoi ils ne balancèrent pas entre la France et l'Angleterre quand il fallut opter.
          Quoi qu'il en soit, je n'ai pu encore retrouver dans la paroisse d'Aubigny l'emplacement du château de ses anciens seigneurs. Serait-ce celui qu'on voit à une lieue au levant de l'église sur la commune du Mesnil-Vigot tout près de celle d'Aubigny ? Ce château qui paraît avoir été considérable est aujourd'hui connu sous le nom de château de Saint Clair nom qui lui venait probablement d'une chapelle de Saint-Clair détruite peu d'années avant la révolution (Registre des cures du diocèse dressé en 1737 penès nos. p. 81).
          On y voit un tertre conique factice et plus étendu que ne sont la plupart de ceux de ce genre que je connais dans le département. J'y ai remarqué des fondations de murs et surtout celles d'une tour circulaire. Ce château qui avait beaucoup de souterrains était environné d'un double fossé. Il y avait des ouvrages avancés vers l'église de Remilly. Ruiné et rasé comme il l'est il peut encore donner l'idée d'un des plus grands châteaux à motte que nous ayons dans le Cotentin et des moyens qu'on employait pour s'y fortifier. Du point de son emplacement la vue s'étend au loin au-delà des marais et sur le pays d'alentour.
           J'ai vu quelque part que les familles d'Aubigny et de Bohon avaient une même origine. Malheureùsement je n'ai pu retrouver le fondement de cette tradition. Je vois bien que Feugères, Aubigny, Bohon, et Marchesieux figurent ensemble dans la fondation de l'abbaye de Lessay.
          Je trouve le lion d'Aubigny et de Montbray au prieuré de Bohon il est certain que la seigneurie de Saint-Cristophe d'Aubigny fut confisquée dans le 13e siècle sur un Bohon.
          D'un autre côté les armes de Bohon gravées sur le fac-simile de la grande Chartre d'Angleterre sont tout-a-fait différentes de celles d'Aubigny Mowbray qui sont de gueules au lion rampant d'argent (1) et celles de Bohon d'azur à la bande d'argent (Banks ; tome III p.354) entre deux cottices de même et lionceaux d'or, trois en chef et trois en pointe.
          Voilà bien de quoi faire une dissertation mais elle serait étrangère à mon sujet. Je me contenterai d'indiquer les confiscations de la seigneurie d'Aubigny faites par les Rois Philippe-Auguste et Louis VIII.
    En 1250, le Roi était patron d'Aubigny (Liv noir. de l'évêché Decaen, de Piris), et en 1320, la cure de la paroisse fut donnée à la Sainte-chapelle de Paris par le Roi Philippe-le-Long.

     

    CANTON DE LESSAY


    47. CHATEAU DE LAUNE.

     

         La paroisse d'Aubigny et le château de Saint-Clair sont presque à l'extrémité orientale de l'arrondissement de Coutances. Pour continuer notre revue de cet arrondissement, nous sommes forcés de revenir sur nos pas. Nous allons commencer le canton de Lessay sur un point où il s'avance entre les cantons de Périers et de la Haie-du-Puits.
          Le château de Laune a donné son nom à une branche de la famille de Bricqueville venue en Angleterre avec Guillaume-le-Conquérant.
    Depuis la conquête d'Angleterre jusqu'au règne de Louis XIV, cette famille a possédé le château de Laune. Elle est trop bien connue pour queje sois obligé d'en aller chercher çà et là des membres épars comme cela m'arrive trop souvent (Dans l'histoire de la maison d'Harcourt, tome I. p. 111 et suiv., il y a beaucoup de détails sur la famille de Bricqueville. V. mes familles Anglo-Normandes p. 43 et 160. V. le dictionnaire de la noblesse par L. C. D. B. vc. Bricqueville. Les armes sont palé d'or et de gueules de six pièces. La branche de Bretteville porte d'argent à six feuilles de chêne de sinople 2, 3 et 1.).
          Mais ce qui m'a frappé ce qui n'est pas bien connu c'est que la branche établie en Angleterre y a subsisté plusieurs siècles et qu'elle y a porté le nom de Laune (de AIno) sans que les auteurs qui en parlent avec assez de détails, d'après des actes originaux aient jamais soupçonné l'origine de ce nom (Collinson Somersetshire introd. p. 58 tome I. p. 76, 250, 422. Scutag. apud Hutchins Dorset, tome 1).
    Il ne faut pas s'étonner que les Anglais ne connaissent pas bien le nom de la paroisse de Laune, qu'il est permis à des étrangers d'ignorer ; mais ce qui m'a réellement surpris, c'est qu'en parlant de ce château même qu'il a peut- être vu l'historien contemporain du connétable de Richemont Guillaume Gruel son compagnon d'armes, qui eut peut-être une part active à la réduction des châteaux du Cotentin n'ait pas su si celui-ci s'appelait Laune ou Launay.

         Quoique cette ancienne forteresse n'ait été démolie que depuis 60 ans le terrain a été si bien applani qu'on n'en reconnaît plus l'emplacement. On a peine à concevoir quels étaient ses moyens de défense dans un terrain aussi bas et aussi uni.
          Tout près du lieu où elle était, on a construit une habitation plus moderne mais qui remonte encore au temps des Bricquevitle. Elle n'a de remarquable que la grande épaisseur de ses murs, mais on y voit une tenture de tapisserie curieuse, à laquelle Molière a donné une espèce de célébrité. Cette tapisserie indiquée dans une de ses comédies (Dans l'Avare act II, scène première) comme une vieillerie se trouve ici très-fraîche et très-entière. Elle est suffisante pour la tenture du salon et d'une très grande salle. En l'étudiant on peut se faire une
    juste idée des costumes de la fin du 15e siècle.
          Chaque sujet y est expliqué par des quatrains fort drôles mais quelquefois un peu libres. Je suis heureux de pouvoir signaler cette singulière tapisserie trop peu connue quoique Molière l'ait presque rendue classique. Plusieurs amateurs des antiquités du moyen âge auxquels je l'ai indiquée, sont venus de fort loin la visiter. Tous s'en sont retournés contents, et ont regardé comme une nouveauté assez piquante un morceau qu'on citait, il y a 150 ans comme une anticaille ridicule.
          Par le registre des fiefs de Normandie, sous le règne de Philippe Auguste, il paraît qu'au commencement du 13e siècle, la châtellenie de Laune était une dépendance de celle de Moyon.

         Robertus de Briquevill tenet indé (de Moyon) Alnum per servicium unius militis apud Moyon (Penès nos, p. 7).
          Les Bricqueville qui possédèrent jusqu'au 17e siècle la seigneurie de Laune furent remplacés par M. de Rassent celui-ci, par M. le Cordier, marquis de Lalonde, et par M. le président de Lalonde. M. Turgot, leur successeur, fit démolir l'ancien château-fort. Son fils a vendu ce qui restait de cette grande terre, à M. Lebrun, né dans une paroisse de cet arrondissement (Saint-Sauveur-L'Endelin ) qui a joué, au commencement de ce siècle, un rôle très brillant, et qui vient de mourir dans un âge très avancé, avec le titre de duc de Plaisance.


    48. CHATEAU DE PIROU

     

         A l'autre extrémité du canton de Lessay, au bord de la mer, on trouve les restes encore habités d'un château dont l'origine remonte au temps des premiers ducs de Normandie, et dont plusieurs des propriétaires ont appartenu à des familles qui suivirent le duc Guillaume à son expédition d'Angleterre.
          Je vais vous donner quelques détails sur ces familles.
          La première est celle qui ne portait d'autre nom que celui de la paroisse suivant un ancien usage que nous avons eu que nous aurons fréquemment l'occasion de remarquer. Ces seigneurs figurent en Normandie parmi les principaux bienfaiteurs de l'abbaye de Lessay, et en Angleterre parmi les barons de ce royaume.
          Voici un passage d'une des premières chartres de l'Abbaye de Lessay, qui peut faire connaître deux générations des anciens châtelains de Pirou.
          J'ai cru devoir le transcrire. Ex dono Willelmi et Richardi de Pirou et ex concessione et confirmatione heredum eorumdem Radulfi de Pirou et fratrum ipsius, Gaufridi, Rogerii et Stephani ecclesiam de Pirou (Gall. Christ. XI, col. 917,–ibid inter instrum dioc. Const. Col, 236. Neustr. Pia, pag. 620).

         Les auteurs du Gallia Christiana rapportent cette chartre à l'an 1216 ; or, comme on voit que les hérititiers y confirment il est assez probable que la première donation est du temps de la conquête.
          En tous cas, voilà bien au moins deux générations et six noms de seigneurs de la famille de Pirou que cet acte nous fait connaître.
    La branche ainée posséda encore longtemps le château dont elle portait le nom mais les branches cadettes existèrent encore plusieurs siècles après elle dans le Cotentin à Sainte-Mère-Eglise, dans l'arrondissement de Valognes et à Montpinçon dans celui de Coutances.
          Pendant que la famille de Pirou florissait en Normandie, elle avait aussi des revenus considérables en Angleterre dans plusieurs comtés, et notamment dans ceux de Devon et de Somerset.
          Sa principale résidence dans le premier de ces comtés porte encore aujourd'hui le nom de Stoke Pirou (V. Britton's Beauties of England (Devon) et Collinson's hist. of Somerset ) tom. 1 page 253 et tome 3, pag. 55). A la fin du 13e siècle Gilbert de Pirou possédait encore ce manoir auquel ses ancêtres avaient donné leur nom.
          Après les seigneurs de Pirou dont le nom de famille était celui de la paroisse, le château de Pirou fut possédé par les du Boys dont les ancêtres avaient aussi aidé à conquérir l'Angleterre. Ceux-ci, dont les noms figurent dans le livre rouge de l'Echiquier, et dans le registre des nefs de Philippe-Auguste devinrent seigneurs de Pirou, par le mariage de Jean du Boys dit le Gascoin avec Catherine de la Luserne fille de Guillaume de Pirou et de Jeanne de Lahaye.
          Cette nouvelle famille conserva la seigneurie de Pirou pendant près de trois siècles sauf le temps ou les Anglais maîtres du pays s'en saisirent pour punir celui qui en était possesseur, de son attachement à la France (Il est possible qu'il y ait eu à Pirou des seigneurs du nom de la Haye à la fin du 14e siècle. Genéal. d'Anneville).
          La famille du Boys avait aussi accompagné le conquérant en Angleterre c'est à elle qu'il faut rapporter le nom de Boys, qu'on voit dans quelques listes de la conquête et entr'autres, dans celle de Hollingshed.
          Elle figurait en France sous le règne de Philippe-Auguste, parmi les chevaliers bannerets (milites ferentes bannerias) de Normandie, dans la liste de ces chevaliers donnée par Duchesne (Apd. Normann. script. p. 1031).
          C'est aux Dubois qu'il faut rapporter à peu près tous les anciens travaux du château de Pirou, dont la famille de Vassy ne devint propriétaire que vers la fin du 17e siècle.
          Celle-ci a seulement fait des distributions pour rendre plus habitable un ancien édifice dont on avait plutôt cherché à faire une forteresse qu'une demeure paisible comme elle le devint au temps de ses derniers habitans.
          Ceux-ci, qui pouvaient aussi faire remonter l'origine de leur famille au temps des ducs de Normandie vendirent, au commencement de la révotution, la terre et le château de Pirou à M. Huguet de Semonville qui est aujourd'hui grand référendaire de la chambre des Pairs.

         Ce château avait autrefois trois enceintes de muraities toutes entourées de fossés pleins d'eau. Au centre de ces enceintes, on voit encore le donjon remarquable par l'épaisseur de ses murs et jadis d'un accès difficile, à cause des ouvrages avancés et des larges fossés qui en défendaient les approches.
          On y tenait autrefois, tous les samedis, un marché qui fut, il y a déjà très longtemps transféré au bourg de Lessay.
          L'auteur de l'histoire militaire des Bocains dit, mais sans citer ses garans que le château de Pirou fut pris, en 1370 par les troupes Anglo-Navarroises. Comme il copie généralement les manuscrits de M. Lefranc cette assertion pourrait bien avoir quelque fondement. Il est au moins certain qu'il fut pris par les Anglais au mois de mars 1418 et qu'ils le perdirent en 1449.
          Dans un mémoire de Claude de Vassy contre les habitans de Pirou en 1693 on voit que par lettres patentes du duc de Bretagne données le 24 janvier 1449 (50) il est mandé au Bailly de Cotentin ou à son lieutenant, de remettre Thomas du Boys en possession et jouissance du château de Pirou usurpé par les Anglais.
          Les anciens titres de la châtellenie font mention des grands bois qui entouraient jadis ce château. Le voyageur qui le voit maintenant au milieu d'une plaine nue aride, et très-exposé aux vents de la mer, ne se doute pas qu'il y ait jamais eu une futaye étendue aux environs cependant c'est un fait incontestable.
          Il n'en est pas ainsi de celui sur lequel certains antiquaires ont prétendu fonder l'étymologie du nom de Pirou ce nom disent-ils vient de la grande quantité d'oies (Pirots) sauvages qui revenaient régulièrement chaque année faire leurs nids dans les fossés du château. C'est un conte adopté d'abord par Vigneul de Marville (Mélanges d'histoire et de littérature) et qu'on est fâché de retrouver dans le dictionnaire celtique de Bullet. Si au lieu d'adopter sans examen une pareille fable, ce savant eût voulu suivre les règles qu'il avait établies il eût pu trouver à ce mot une signification raisonnable et antérieure au conte absurde des Pirots.
    On voit encore sous une remise du château deux petits canons d'une époque rapprochée de l'introduction de l'artillerie dans la Basse-Normandie. Ces canons, d'un petit calibre, ne se chargeaient point comme on le fait aujourd'hui mais par une espèce de porte à charnière près de la culasse. Le trou de la lumière était percé au centre de cette espèce de porte et la cartouche se trouvait, sans bourrer tout justement à sa place. Je présume qu'on ne tarda pas à sentir l'inconvenient de ces sortes d'ouvertures, et qu'elles furent bientôt abandonnées pour l'usage que nous avons aujourd'hui. Ces canons sont proportionnellement à leur calibre d'une plus grande, longueur que celle qui est depuis longtemps adoptée.
          Les anciens seigneurs de PIrou portaient de sinople à la bande d'argent. Les armes des Dubois étaient d'or à l'aigle de sable celles de Vassy sont d'argent a trois tourteaux de sable.
          Une partie du château est encore habitée M. Cotman, que j'accompagnais alors l'a dessiné au mois d'août 1818 ; son dessin qu'il avait l'intention de joindre au grand ouvrage sur la Normandie, n'a pas été publié, ou s'il l'a été, je n'en ai pas eu connaissance.

     

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    CANTON DE SAINT-MALO-DE-LA-LANDE.


    49. CHATEAU DE GRATOT.

     

         La seigneurie de Grâtot été possédée par des familles qui remontent au temps de la conquête d'Angleterre ; elle a été confisquée par Philippe-Auguste le château encore habité présente beaucoup de restes des temps ou l'on songeait plus à se défendre contre des ennemis qu'à recevoir des amis cependant, j'ai si peu de chose à vous en dire, que j'ai balancé à le mettre au nombre de ceux dont j'avais à vous parler.
    Par le registre des fiefs de Normandie sous le règne de Philippe-Auguste on sait que celui de Grâtot avait appartenu à la famille de Creully.
          Ricardus de Croilly tenet tres partes feodi i militis de Gilleberto de Croilly antenato suo de quo Dominus Rex tenet apud Nicorp et Gouville et Gratot per eschaetam.
          Durant le même siècle, la seigneurie de Grâtot entra dans la possession de la famille d'Argouges, par le mariage de Guillaume d'Argouges (qui vivait encore en 1251) avec Jeanne de Grâtot.
    Depuis ce temps jusqu'à une vingtaine d'années avant la révolution cette seigneurie a subsisté dans la même famille, excepté pendant une partie du 14e siècte qu'elle vint, probablement aussi par un mariage dans celle du Saussay mais dans le même sièc!e elle redevint la propriété des d'Argouges qui la conservèrent près de 400 ans.
          Le château fut bâti par cette famille. On y voyait naguères ses armes a deux places un de leurs écussons y est supporté par deux sauvages, l'autre par deux lions léopardés qui appuient d'un côté l'écu penché, et de l'autre le casque. Le cimier est orné d'une demi-fée ( jusqu'à la ceinture) ; les mêmes armes étaient aussi à plusieurs
    endroits dans l'église de Gratot.
          L'écu penché me porte à croire que le château fut bâti à la fin du 15e siècle ou au commencement du 16e.
          Les d'Argouges de Grâtot portaient écartelé d'or et d'azur, chargé de trois quintefeuilles d'or, deux en chef, une en pointe (Généalogie de la famille d'Argouges).
          Les armes de du Saussey sont d'argent semé d'hermines au sautoir de gueules.

     

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    50. CHATEAU D'AGON.

     

         Voici une des communes dont nous avons une mention antérieure à la conquête d'Angleterre. Justement quarante ans avant cette fameuse expédition elle appartenait au duc Richard III qui, dans son acte de mariage (Apd. Acherii Spicileg., édit. In4 - tome VII, pag. 203), la donne en dot avec plusieurs autres seigneuries et châteaux du Cotentin à sa femme Adèle fille du roi Robert, curtem supra mare quae dicitur Agons.
    Sous le règne de Jean Sans-Terre ce prince voulant recompenser Guillaume-des-Roches qui lui avait cédé la charge, de Sénéchal d'Anjou, lui accorda le droit d'avoir dans sa seigneurie d'Agon, deux foires franches, l'une à la Pentecôte, l'autre à la Notre-Dame en septembre chacune de ces foires devait durer huit jours l'une d'elles fut transférée à Montmartin près de Coutances l'autre a Géfosse. M. Lefranc, dont les manuscrits m'ont fourni ces détails ajoute que ces foires sont devenues l'une la foire de Caen l'autre la Guibray. C'est ce que je n'ai pu vérifier car il ne donne jamais ses garans mais il est au moins constant que la foire de Montmartin devint la plus considérable du pays. A plus de trois lieues à la ronde, les anciens actes indiquent fréquemment le chemin de la foire de Montmartin.
          En 1327, cette foire relevait du Roi ; plusieurs fiefs y devaient guet et garde et notamment ceux de Carentilly, Saussey, le Mesnil-Omond (à Cenilly), Montchaton, Herenguerville et le fief de Say (V. Le registre des fiefs de l'élection de Coutances rédigé en 1327 V. mon gd. registre in-folio, p. 212).
          Voici, d'après un registre public dressé en 1527 par le grand bailly du Cotentin la note de celui qui possédait alors le fief d'Agon (Ibid)
    « Guillaume Paens (Paynel) tient de M. Olivier Paesnel chevalier par parage le fieu d'Agon o toutes ses appartenances ou qu'elles soient lequel M. Olivier le tient par hommage du seigneur de Fougères, par un fieu de Haubert.
          En 1341, Guillaume Paisnel seigneur d'Agon, comparut à la montre (revue) que fit Robert Bertrand sire de Fauguernon (Laroque, hist. d'Harcourt, p. 2055).
           Dès le commencement du siècle suivant : Bernard du Buret avait cette seigneurie (Poulié de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Archives du dépt.). Gautier de Silly épousa en 1437, Collette, fille de Jean du Buret seigneur d'Agôn et de Querquebus veuve de Jean Meurdrac (Gds. offic. de la couronne, tome VIII).
          Jusqu'à présent je n'ai pu trouver l'emplacement d'un ancien château à Agon.

    5l. TOURVILLE.

     

         Dans l'arrondissement de Valognes j'ai déjà indiqué la place d'un château à motte à Tourville près de Montebourg. Si le berceau d'une ancienne famille faiblement indiquée sur quelques listes de la conquête (Masseville,tome 1 p. 205. Hollingshed), est dans notre département, il est probable qu'il faut le chercher plutôt dans le canton de Montebourg que dans celui de Saint-Malo. Mais le Tourville qui fait l'objet de cet article a des titres qui le recommandent bien autrement à nos souvenirs. C'est la patrie du maréchal de Tourville le plus grand homme de mer du siècle de Louis XIV. Sa vie appartient toute entière à l'histoire et je n'en parle ici que pour signaler le lieu de sa naissance.
          Les auteurs de l'histoire des grands officiers de la couronne (Tome VII p. 428 et seqq.) font remonter la famille du maréchal de Tourville à une époque reculée ce qui pourrait autoriser ici la recherche d'un château ancien mais le berceau de ce grand homme absorbe toute l'attention. Content d'avoir signalé la patrie de ce héros dont le nom est si glorieux pour le département qui lui a donné naissance j'ai cru devoir m'abstenir de toute recherche ultérieure.

    52. SAINT-MALO-DE-LA-LANDE.

     

         Dans presque toutes les listes de la conquête (Brompton Duchesne MasseviIIe) je trouve un seigneur de Saint-Malo. Il est assez incertain si ce fut celui de Saint-Malo-de-la-Lande. J'en parle ici seulement pour engager à chercher dans cette paroisse s'il n'y a point de motte ou de câtel.
          L'église n'offre rien de curieux ou d'ancien mais elle peut avoir été rebâtie.

     

    CANTON DE SAINT-SAUVEUR-L'ENDELIN.

     

    53. MUNEVILLE-LE-BINGARD.

     

          Dans l'histoire du comté de Kent je trouve une famille Normande du nom de Muneville (Brailey beauties of Kent Hasted history of do). Il n'y a en Normandie que deux paroisses qui portent ce nom. Elles sont toutes deux dans l'arrondissement de Coutances. Mais a laquelle faut-il rapporter le berceau de cette famille ? C'est ce que le câtel ou la motte décideront, quand on les aura trouvés mais jusqu'à présent mes recherches ont été inutiles. Les églises ne disent rien non plus.
          En 1250, le comte de Boulogne était patron de Muneville-le. Bingard (Regist. suprà patronalibus Constant. dioc. penès nos) et Muneville sur la mer dépendait de l'abbaye de Grestain.
          Dans la première moitié du 16e siècle, la prébende de Muneville à la cathédrale de Coutances était occupée par le fameux Buchanan bien connu par ses ouvrages en prose et en poésie latine mais beaucoup plus encore par son ingratitude et son infamie envers sa reine et sa protectrice, l'infortunée Marie Stuart. Les revenus de sa prébende étaient à Muneville-sur-la-mer.


    54. CAMPROND.

     

          Cette paroisse a donné son nom à une famille très-ancienne en Normandie et en Angleterre où elle possédait une seigneurie de Berling (J Généal. d'Anneville. Je crains que ce nom donné sans indication de comté ne soit estropié) qu'elle échangea dans le 13e siècle avec celle de Montaigu-ia-Brisette, près Valognes.
          On trouve à Camprond un ancien retranchement sur la hauteur appelée le Hutrel et un autre dans le bois de Camprond appartenant à M. de Vély mais il est douteux que l'un ou l'autre marquent l'emplacement d'un château du moyen âge.
          La seigneurie dépendait autrefois de la baronnie du Hommet, Enguerannus de campo rotundo tenet inde (du Hommet) feodum militis apud Loricium (le Lorey) et campum rotunbum et alibi (Lib. feodorum Domini Regis Plilippi).
          Guillaume du Lorey était patron de l'église en 1250 suivant le registre des patronages dressé à cette époque par Jean d'Essey. Les armes de l'ancienne famille de Camprond étaient d'argent à la quintefeuille de gueules (V. une note dans mon registre des paroisses v Le Lorey).



     CANTON DE COUTANCES.

     
    55. CAMBERNON.

     

          Dans plusieurs listes de la conquête on trouve le nom de Cambernon (Brompton, Duchesne, Hollingshed).
    Une famille de ce nom s'établit en Angleterre au temps du conquérant et de ses successeurs dans les provinces de Dorset et de Devon (Britton's beautles of Devon).
          Le lieu de la résidence des Cambernon dans le Devonshire s'appelait Modbury. Ils possédaient dans le même comté North Tauton et Inkworth près de Plimouth.
          Dans son histoire du comté de Dorset (Tome I p. 366) Hutchins en parlant des Cambernon de Childhay indique leurs armes de gueules au sautoir d'or ; ceux de Modbury y avaient ajouté douze billettes et un croissant d'or.
          Parmi les seigneurs qui portaient le nom de la paroisse deux autres familles de la conquête possédèrent successivement cette selgueurle. Ce sont les Pirou et les Carbonnel. J'ai parlé naguères des premiers à l'article de la paroisse dont ils portaient le nom. Les autres figureront
    dans les arrondissements d'Avranches et de Saint-
    Lo, à Saint-James et à Canisy.
          Le château actuel de Cambernon fut bâti au commencement du règne de Louis XIII. Son origine serait trop moderne pour en parler ici ; mais je puis en outre indiquer ici l'emplacement du château primitif. Cet emplacement était dans un clos près de l'église nommé la Motte et donné à l'école de là paroisse par M. de Martinvast, un des derniers seigneurs.
          Dans le livre noir de l'échiquier dont je dois une communication à l'obligeance de notre savant collègue M. l'abbé de la Rue je trouve la note suivante sur le Devonshire. Je la crois applicable aux Cambernons de ce pays. Henricus de Campvern. tenet de Olivero de Tracy
    in Deveniâ VII milites. Rogerus de Camp. tenet de me VII milites. Lib. nig. Scaccarii, page 122 et 123.

     

    COURCY.

     

         Je ne fais ici mention de cette paroisse que pour détromper ceux qui pensent qu'elle est le berceau d'une famille Anglo-Normande distinguée et qui se trouve en Angleterre.
          Cette famille est originaire de l'arrondissement de Falaise, département dn Calvados.

    VILLE DE COUTANCES.

           Je ne crois pas qu'il y ait lieu de donner à cette ville une place dans le nombre de mes anciens châteaux. Connue des Romains sous les noms de Cosedia et de Constantia cette ville a été fortifiée dans le moyen âge. Elle a été prise par les Normands, par Geoffroy Plantagenêt, par Philippe Auguste, par Geoffroy d'Harcourt, par les Anglais, par le comte de Richement, par Louis XI et par les Huguenots, mais jamais je n'ai rien trouvé qui me porte à croire qu'elle ait eu un château.
          Feu M. de Mons dans ses recherches trop peu connues sur cette ville parle bien d'un château Pisquin dont il existait de son temps dont il existe encore une tradition vague mais il le rapporte aux Romains.
          Quelques listes de la conquête indiquent un Gautier de Coutances dont un descendant fut évêque de Lincoln. On sait qu'un Paisnel fit restaurer l'aquéduc de Coutances dans le 12e siècle. Je vois bien (et c'est ce qui pourrait le plus donner l'idée d'un château) que, sous le règne de Philppe-Auguste, Fouques Paisnel y en possédait un (Custodiam castri sui in Constantiâ. Lib. feod. Regis Philippi apud lib. nig. dioc. Constant.). Mais malgré cela le judicieux historien de cette ville n'a pas cru qu'il y eût un château dépendant de Coutances. Son opinion m'a décidé : je conviens pourtant que l'opinion contraire n'est pas insoutenable.

     

    [ Cette ville est évoquée dans un article de ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-coutances-manche-a126892366 ]


    CANTON DE MONTMARTIN-SUR-MER.


    56. ORVAL.

     

         La paroisse d'Orval contiguë au territoire de Coutances, est !a première qui se présente au midi de cette ville. Elle ne nous arrêtera pas longtemps.
          Dans plusieurs listes (Masseville, vol. 1 p. 203 Chron. de Normandie chez le Mégissiér, p. 111) de la conquête, je trouve le nom d'Orval mais comme il y a en Normandie plusieurs paroisses de ce nom je ne puis le rapporter d'une manière incontestable à celle qui nous occupe. Il est d'ailleurs certain qu'il existait à l'époque de la conquête un Regnault d'Orval, qu'il souscrivit, à l'acte de fondation de l'abbaye de Lessay (Gall. Christ. XI. instrum. Col. 227-228 Neustr. pia p. 619 et 620) qu'il donna à ce monastère l'église d'Orval près de Coutances : Ecclesiam sanctae Helenae de aurea valle. Or comme Orval a encore Ste.-Hetene pour patronne comme l'abbaye de Lessay y a constamment possédé un prieuré les dîmes et des terres il me semble presque démontré que celui dont le nom est sur les listes partit réellement d'ici.
           Dans le livre rouge de l'échiquier on voit que, sous le règne de Henri II ( duc de Normandie), Guillaume d'Orval devait à ce prince le service de deux chevaliers et demi (Apud Ducarel) et pour son compte celui de six chevaliers dans le Cotentin.
          Je ne trouve aucune mention du fief d'Orval dans le registre de Philippe Auguste mais il est certain qu'il fut confisqué et converti en fief-ferme.
          Je ne connais pas l'emplacement du château. L'église est contemporaine de la fondation de l'abbaye de Lessay. Il y a sous le chœur une crypte ou chapelle souterraine.

     

    56. SAUSSEY.

     

         Paroisse contiguë à la précédente. Son seigneur était aussi à la conquête de l'Angleterre (Masseville 1, p. 203. chron. apud le Mégissier p. 111).
           En 1250, un seigneur de Saussey portait encore le nom de cette paroisse, ety percevait une partie des dimes (Lib.nig. dioc. Constant).
          Une famille ancienne ( du nom de du Saussey) qu'on prétend avoir tiré son nom de celui de cette paroisse mais qui alors ne devrait pas y ajouter du, porte pour armes d'argent semé d'hermines sans nombre.
    Je ne connais point Pemptacement de l'ancien château de Saussey.

    57. TRELY.

     

         Brompton et Duchesne citent un Seigneur de Trely (Traylis) parmi ceux qui aidèrent à conquérir l'Angleterre (Brompton apud X script. Ang.).
           Dès le 12e siècle Richard Meurdrac était seigneur de Trely. Ses descendants possédèrent la même seigneurie pendant plusieurs siècles. Je parlerai plus amplement de cette famille à l'article de la Meurdraquière. Ici je dirai seulement le peu que je sais de celle qui a existé Trely.
          Le Baronnage éteint d'Angleterre cite deux barons du nom de Traily (Collins édit. de 1711, tome lI part. II, p. 123) le premier qui vivait sous le règne de Henri 1er s'appelait Geffrey. Il laissa un fils nommé Gautier dont la baronnie était composée de neuf fiefs de chevalier qu'il tenait de l'honneur de Verdun .Après lui il n'est plus parlé de la famille parmi les barons Anglais.
          Je n'ai pas encore réussi à trouver à Trely l'emplacement d'un château ancien.

    58. QUESNAY.

     

          On lit dans le Baronnage de Banks que Raoul de Kaineto était à la conquête d'Angteterre qu'il eut pour fils Raoul et Guillaume que ce dernier fit prisonnier le roi Etienne à la bataille de Lincoln que son frère aîné possesseur de plusieurs seigneuries dans le comté de Dorset, y fonda le monastère de Tarent (Banks extinct. Baronaage, vol. I, p. 101 et 102. –Dugdale baronnage vol. p. 427, 428. – Hutchins Doret, volume I p. 110. ). Leurs armes suivant Banks étaient vaire argent et azur à trois barres de gueules. J'ai trouvé d'autres possessions et peut-être 'autres branches de la même famille dans les histoires des comtés de Hertford et de Somerset (Collins on Somerset shire vol. II p. 376. Topography of Hertordshire). Les armes varient à chaque localité mais c'est chose commune en Angleterre, surtout sous les règnes des Plantagenèts.
    Robert de Chesnet (de Chesnelo) était évêque de Lincoln en 1147 (Godwin de. presulib. Angl. –Britton's Survey of Lincolnshire).
          Dans le registre des fiefs de Philippe Auguste (Apud lib. nig. Mss. dioc. Constant) je vois qu'au commencement du 13e siècle la seigneurie de Quesnay était en quenouiile et qu'elle devait au roi le service d'un chevalier : domina de Quesnelo tenet quesnetum per servicium unius militis.
           Il n'y a eu en Normandie qu'une paroisse de Quesnay elle est contiguë à celle de Trely. Elle est si petite qu'on l'a supprimée. L'église est pauvre peu ancienne et insignifiante. Je n'ai pu retrouver dans cette commune les traces d'un ancien château. Cependant je ne désespère pas d'y réussir dans la suite et j'ai cru devoir la signaler.

    59. MONTCHATON.

     

         Depuis Orval nous avons inspecté, sur la rive droite de la Sienne Ies paroisses qui peuvent offrir quelque chance de rencontrer des traces d'anciens châteaux nous allons maintenant examiner sur l'autre rive, la partie méridionale du canton de Montmartin.
          La première paroisse qui mérite notre attention est celle de Montchaton elle n'est séparée d'Orval que par la rivière de Sienne.
          A l'époque de la conquête la seigneurie dé Montchaton était dans la famille des fondateurs de l'abbaye de Lessay. On voit par la chartre de fondation (Neustr. pia p. 619. Gall. Christ. XI, col 226. iustrum. Dioc. Constant) que Turstin Halduc et son fils Eudon Capel donnèrent à ce monastère l'église de Saint-Georges-de-ia-Roque ecclesiam sancti Georgii de Roca et des terres dans l'autre partie de la paroisse qui était alors plus particulièrement connue sous le nom de Monchaton avec la dîme de leur moulin et de leurs pêcheries.
          Une confirmation du roi Henri Ier prouve que la seigneurie de Montchaton appartenait aux barons dela Haie-du-Puits en 1126 (Gall. Christ. XI. col. 917 et inter instrum. dioc. Constant. col. 236).
          Dix ans après cette confirmation Henri Ier n'était plus. Sa succession était disputée avec acharnement entre Geoffroy, comte d'Anjou, et Etienne de Blois. Raoul de la Haie suivit le parti de ce dernier celui du comte d'Anjou prévalut en Normandie vers 1141, et Raoul de la Haie qui avait longtemps tenu la campagne contre le vainqueur fut forcé de se retirer dans son château de la Roque à Montchaton (Renseignements fournis en 1802 par M. Desmarest de Bavent, frère de M. de Montchaton) regardé alors comme imprenable.
          Le comte d'Anjou victorieux vint l'y assiéger, et le réduisit à une telle extrémité, qu'il fut forcé de sortir de la forteresse avec une selle sur le dos dans la posture ]a plus humiliante.
           Ces sortes de capitulations n'étaient pas alors très rares j'en pourrais citer plusieurs exemples (V. Guill. Gemet apud Duchesne, Norman. script. collect. p. 259).
           L'attachement de Raoul de la Haye pour Étienne, venait en partie des alliances qui existaient entre la famille du comte de Blois et celle des barons de la Haie-du-Puits.
           En 1174, Olive, fille du comte Étienne de Blois, mariée à Guillaume de Saint-Jean et mère de Raoul de Fougères et de plusieurs autres fils fit à l'abbaye de Savigny une donation qu'elle data de son château de Montchaton.
           Cet acte donne des détails généalogiques peu connus j'ai cru devoir le transcrire ci-dessous (In nomine Sanctœ Trinitatis noverint universi fideles quod ego Oliva filia Stephani comitis et mater Dni. Radulfi Filgeriarum Willelmo de Ste. Johanne marito meo et Radulfode Filgeriis coeterisque filiis unanimiter concordantibus dedi et cuaccssi abbatiae Savignei in pptuam et puram elemosinam eccliam de Belinstonia ex integro cum oib ad eam pertinentib facta est baeo donatio apud Montem Chaton anno ab incarnationi Dui. MCXCIII. Hujus donationis testes sunt Will. de Sto. Johanne maritus meus Galterius et Garinus capellani Hugo de Sto. Pancratio et multi alii. Cartul. Savignei de diversis epatib. Cart. IV. ).

          Au commencement du 13e siècle, Philippe-Auguste confisqua les biens des seigneurs de Saint-Jean ; ceux de Montchaton, qui en faisaient partie, furent enveloppés dans la saisie décrétée contre tous les partisans du roi Jean (Lib. Féod. Philip. régis, penès nos, p. 8).
           « Raoul de Breuilly seigneur en 1284 succédait à Gautier-Dubois (de Bosco) qui avait avait forfait sous Philippe-Auguste (Extrait d'un factum de M. Cabaret d'Othon, contre M. de Montchaton). La chartre du roi Philippe-le-Hardi donne, sur la confiscation la valeur de la fiefferme et le nom des fieffermiers, des détails qui m'ont engagé à le transcrire ici. « Philippus Dei graciâ francorum rex notum facimus universis tàm presentibus quàm futuris quod cum in manu nostrà teneremusmauerium de Montechatonis cum terris omnibus pertillenciis ejusdem, et omnes redditus et possessiones quas Gualterus de Bosco tempore quo decessit tenebat in Vicecomitatu Constantienni pro defectu solutionis plegiorum dicti Galteri de debito in quâ ratione dicti Galleri nobis tenebatur nos predictum manerium cum terris et pertinenciis et predictos redditus et possessiones vendidimus et nomine possessionis in perpetnum concessimus Radulfo de Bruilly militi baillivo nostro caleti et ejus hecedibus sive successoribus et causam habetitibus ab eo pro precio septingentarum librarum turonerismm penes nos jam positarum et solutarum Parisiis in solutum dehiti in qua ratione dicti Galteri tenebatur qnod ut ratum et stabile permaneat in futurum presentibus lilteris nostrum fecimus apponi sigillum actum Parrhisiis. A. D.
    MCCLXXXV mense X bris (Voir mon répertoire in-folio, p. 209).
         
    Après les Breuillys, Charles-le-Mauvais roi de Navarre, fut en possession du château de Montchaton ; cette possession fut troublée par les partisans du roi de France Charles V. Un Thieuville prit cette seigneurie à fieffe du Roi de Navarre ; il eut beaucoup à soufïrir à cause de la haine que Charles-le-Mauvais avait excitée.
           Une requête présentée au roi d'Angleterre quand il fut maitre de la Normandie, dans le siècle suivant peut donner une idée des malheurs du château de Montchaton pendant qu'il était au roi de Navarre cette requête donna lieu à une information qui peut fournir des renseignements curieux sur cette époque, sur le château de Montchaton et sur l'établissement de celui de Regniéville. Au risque d'être un peu long, j'ai cru devoir vous transcrire cet acte intéressant.
          « Information faite à Coutances par nous Robert Dyonis lieutenant-général de noble homme Hue-Spenser bailly de Cotentin ainsi qu'il suit
    Henry par la grâce de Dieu, roy de France et d'Angleterre a nos âmes et féaulx, les gentz de nos comptes, salut et ditection, recu avons l'humble supplication de notre amé et fëal Jean de Guéhébert (c'était un Thieuville) contenant comme d'ancienneté par aucuns de ses prédécesseurs eut été mis en fieffe par le Roy de Navarre qui, lors était des terres fief et seigneurie de Montchaton. Le manoir dudit lieu a été ars et démoli par nos adversaires comme lors mouvoient guerre au Roy de Navarre. Ladite seigneurie est assise près de Marais du Plain, du Mont-Saint-Michel et Granville, occupée par nos adversaires pour lesquelles causes et diminutions icelle terre, n'ait valu et ne vaut pour le présent, que trente livres de rente. Item dit qu'en ladite terre avait un beau manoir qui par l'ordonnance du Roy qui lors était, fut abattu a la requête de gentz du pays et que les édifices dudit manoir, comme pierres de Caen et de tailles et autres choses furent portées à l'edifice du chastel de Regnieville appartenant au Roy notre Sire et n'y demeure qu'une vieille salle qui, par occasion de la guerre y a été arse deux fois.  " Cette pièce est datée du sept janvier MCCCCXLV (1446) vu que l'année commençait à Pâques (Voir mon répertoire in-folio p. 209).
    Jean de Thieuville était encore seigneur de Montchaton en 1458 son père s'appelait aussi Jean. Par mariage d'une fille de cette famille, cette seigneurie passa avec plusieurs autres à un du Saussey (ibid).
           Je n'ai pas besoin de suivre plus loin les seigneurs de Montchaton, nous n'avons à nous occuper que de l'ancien château et nous venons de voir qu'il était démoli quand la terre devint la propriété des du Saussey et même au temps que les Anglais occupaient la Normandie.

          Par des renseignements particuliers on sait que la démolition du château de la Roque se fit vers 1360 sur la demande des habitants du pays, de peur que le Roi de Navarre ne s'en saisît et que les matériaux furent employés à augmenter et à renforcer le château de Regnéville (Requete présentée au Roi, par M. Cabaret d'Othon p. 46).
           Avant cette démolition, il y avait, dit-on (Mss.de M. Lefranc), près du château de la Roque, un bourg de plus de quatre cents maisons.
    Sa position était dans ce genre une des plus belles du département il était sur une hauteur près du pont de la Roque et d'un bras de mer plus considérable autrefois qu'aujourd'hui car il a été successivement diminué par les relais de la mer et les dépôts de la rivière. Je crois que l'enceinte extérieure de cette forteresse est d'origine romaine elle est connue dans ce quartier, sous le nom de sangle du castel. L'étymologie du nom de Montchaton, le travail des retranchements en terre sa position à l'embouchure de la rivière et justement près d'un pont auquel une tradition constante dans le pays donne une origine Romaine, sa ressemblance avec une enceinte du même genre, qui se trouve au-dessous de Caen à l'embouchure de l'Orne près du Bac du Port sur Bénouville, tout me porte à croire qu'il yeut là, autrefois, un poste Romain. Ce ne serait pas la première fois que nous trouverions dans notre département, le melange de retranchements de différentes époques il y a des positions qui sont de tous les temps et de tous les peuples.
           L'emplacement du château est très-escarpé, excepté vers le levant où l'on voit des traces de fossés ou de tranchées considérables. Les terres jetées vers l'intérieur y formaient un rempart très élevé et très épais.
           Le château était au sommet de cette élévation son enceinte paraît avoir formé un carré long, dont la largeur s'étendait du nord au sud. Je n'ai pu y retrouver la trace du puits celui qui y était doit avoir eu une grande profondeur la partie escarpée vers la rivière s'appelait la poterne.
           Dans l'état des fiefs de l'élection de Coutances, rédigé en 1327 par G. Leblond Bailly du Cotentin, je trouve l'article suivant qui parle du pont de la Roque et de la foire de Montmartin.
          « Guillaume Corbet, écuyer tient de Jehan Corbet, ecuyer, en parage, et ledit Jehan tient du Roy, par hommage un quart de fief de Haubert, à gage piège cour et usage a Montchaton et rend ledit terrein au Roy N. S. VIII livres à la St-Michel, sur quatre des Vavasseurs, dudit tenement, et aussy s'il venait guerre au pays, ledit Guillaume ayderait à garder dix jours la maître arche du pont de la Roque et aussy les hommes dudit Guillaume doibvent ayder à garder tes foires de Montmartin. "

     

    [ Ce château est évoqué dans un article de ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-montchaton-manche-a193089938 ]


    59. CHATEAU DE REGNIÉVILLE.

     

          Nous venons de voir que ce château était postérieur à celui
    de Montchaton il n'en est pas parlé avant le milieu du 14e siècle son origine remonte à l'alliance du Roi de Navarre avec tes Anglais et à la nécessité de leur assurer sur nos côtes, différents points de débarquement.
           Au commencement de ce siècle la seigneurie de Regniéville appartenait à un Paisnet ; son port était déjà très fréquenté. Charles-le-Mauvais, sentant bien tout l'avantage qu'il en pouvait tirer, s'en saisit, fit fortifier le château, et ne négligea rien pour en faire une bonne forteresse.
          Pour subvenir aux dépenses de ce travail, il mit sur les denrées qui entraient dans le port, et sur celles qui en sortaient une taxe dont nous avons encore le tarif (V. mon registre in-folio, p. 210) avec un état approximatif de la quantité de tonneaux de vin qu'on y apportait chaque année et des importations ou exportations les plus communes à cette époque à Regniéville.
          Les fortifications élevées par le Roi de Navarre ayant été détruites, les habitants demandèrent à être affranchis des taxes additionnelles qui pesaient sur leur commerce depuis p!us de cinquante ans et que le gouvernement les assujettît seulement aux droits payés dans les autres ports de cette côte dont leur requête donne l'état. 
          La réponse du gouvernement n'est pas connue peut-être n'en existe-t-il pas. La démence de Charles VI lui permit rarement de s'occuper d'affaires et l'état était rempli de divisions (Ibid. mem. Mss. de M. le Franc).
          L'occupation de la Normandie par les Anglais, peu d'années après la demande des habitants de Regniéville, leur fit éprouver de nouvelles charges. Le port et les fortifications du château furent rétabiis et ne rentrèrent qu'en 1449 sous la domination française. Le château est compté parmi les forteresses du Cotentin qui furent reprises par les troupes du comte de Richemont (Vie du connétable de Richemont p. 138 et 9, Monstrelet, Chartier).
          Depuis ce temps la mer a successivement envahi l'emplacement de la ville de Regniéville (Presque tous tes anciens titres se servent du terme ville), et enlevé pièce à pièce les fortifications du château.
    C'est particulièrement à une marée extraordinaire de1630 (Voir mon répert. in-folio, p. 210) qu'on rapporte les plus grands ravages de la mer dans ce quartier. Quelques années auparavant le château de Regniéville était encore regardé comme une forteresse ; M. de Briqueville (de Piennes) qui en était possesseur fut accusé d'intelligence avec les Anglais qui voulaient faire une diversion sur nos côtes pour faire lever le siége de la Rochelle et d'avoir voulu leur livrer ce château (Masseville, tom VI p. 117). Justement à la même époque, son fils qui servait dans l'armée du Roi fut tué d'un coup de canon ; cet événement détourna l'orage dont sa maison était menacée et fit cesser des poursuites déjà commencées d'une manière alarmante pour son château de Regniéville et pour lui.
           Le donjon de ce château existe encore en grande partie il est d'une hauteur moyenne ; ses murs ont environ onze pieds d'épaisseur. Les bâtiments à usage d'habitation étaient encore il y a cinquante ans occupés par M. de Piennes qui en était propriétaire. Ils avaient une enceinte particulière de murailles fort épaisses et fort élevées. Les enceintes extérieures occupaient une plus grande étendue de terrain que celles des autres châteaux-forts du pays.
           Cette forteresse n'est point sur une élévation ni dans une place dont on put facilement inonder les approches. Les remparts sont détruits d'un côté par la mer. Le temps en a assez épargné les autres côtés, pour qu'on puisse suivre encore leur pourtour. On n'y voit plus de traces des fossés hormis à l'enceinte intérieure.
           J'y ai remarqué plusieurs souterrains voûtés qui ont, dit-on servi de passage jusqu'à une grande distance mais ils sont si bas, qu'il est impossible de s'y tenir debout.
           Au pied du donjon, on voit encore de grosses boules de marbre dont l'usage pour la défense des places au moyen âge n'était pas inconnu.
          Si on en croit le Tasse qui dans les détails historiques de son poème, suit exactement les auteurs contemporains des Croisades les Sarrasins du haut des murs de Jérusalem en jetaient sur les chrétiens qui montaient à l'assaut. Indi gran palle uscian marmoree e gravi (Canto XVIII).
          Depuis quelques temps le propriétaire actuel a reconstruit quelques bâtiments autour du donjon ; mais rien ne les garantit des ravages de la mer, contre lesquels l'église même n'est pas en sûreté.
           La famille de Piennes étrangère au département et à la Normandie, possédait la seigneurie de Regniéville et plusieurs autres entre Coutances et Granville en conséquence d'une alliance avec l'héritière d'une branche des Paynels. "

    Charles de Gerville

     

    [ Ce château est évoqué dans un article de ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-regneville-sur-mer-manche-a128048994 ]

     

     

    Pour la suite de l'arrondissement de Coutances : les cantons de Bréhal et de Gavray, aller ici. [NdB]

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  • CHATEAUX DE LA MANCHE/GERVILLE : ARR. COUTANCES : C. LA HAIE-DU-PUITS     Charles-Alexis-Adrien Duhérissier de Gerville (Gerville-la-Forêt 1769 - Valognes 1853), érudit, historien naturaliste et archéologue français est un noble qui émigre en 1792 puis s'installe en Angleterre où il perfectionne ses connaissances botaniques. Revenu en France en 1801, il s’installa à Gerville où il se consacre à l’étude de l’archéologie du Cotentin. Il fait partie du petit groupe des premiers historiens de l’architecture en France. À partir de 1814, il entreprend un inventaire des églises de la Manche. Charles de Gerville était correspondant de l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Membre du conseil général de la Manche, il démissionne durant la révolution de 1830 et, légitimiste, refuse la croix de la Légion d'honneur que lui offre Louis-Philippe Ier.

         Il est l'auteur de nombreux ouvrage sur le passé archéologique de la Manche. Voir ici.

         Concernant le thème des châteaux médiévaux, il publie successivement dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie :

     

    - en 1824, un Premier mémoire sur les anciens châteaux de la Manche (arrondissements de Cherbourg et de Valognes, p. 177-367) Voir ici.

     

    - en 1825, un Second mémoire sur les anciens châteaux de la Manche (arrondissement de Coutances, p. 183-436) Voir ici.

    Voir dans ce blog, ici.

     

    - en 1827-1828, les Recherches sur les anciens châteaux du département de la Manche (arrondissements d'Avranches et Mortain, p. 59-196) Voir ici.

     

    - en 1829-1830, les Recherches sur les anciens châteaux du département de la Manche (arrondissement de Saint-Lô, p. 187-319). Voir ici.

    Voir dans ce blog, ici. 

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    MEMOIRE SUR

    LES ANCIENS CHATEAUX DE LA MANCHE

    par Charles de Gerville - arrondissement de Coutances, Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, 1825 ; p. 183-436  

     

    " SECOND MÉMOIRE

     ... sur les anciens châteaux du département de la Manche adressé à M. le comte d'Estourmel, préfet de ce département par M. de Gerville.

    (Lu à la séance du 3 avril 1826.)

    L'arrondissement de Coutances est le plus étendu et le plus populeux du département il nous fournira un nombre d'anciens châteaux plus considérable que les deux précédents réunis (Voyez mon premier Mémoire dans le volume publié par la Société en 1824).
    Si parmi ceux-ci il ne s'en trouve pas qui aient l'importance de ceux de Cherbourg ou de Saint-Sauveur-le-Vicomte l'ensemble je l'espère, ne présentera pas moins d'intérêt que celui des châteaux de la presqu'île du Cotentin. J'entre en matière sans préliminaires.

     

    ARRONDISSEMENT DE COUTANCES,

     

    [On trouvera ici le  canton de la Haie-du-Puits, NdB]

     
    Canton de la Haie-du-Puits

     
         
    « Ce canton est contigu à celui de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Le bourg dont il porte le nom est à près de trois lieues de Saint-Sauveur, vers le midi, et sur la route la plus directe de ce bourg à Coutances.
          Avant de suivre cette route, nous allons nous écarter vers le couchant et prendre connaissance de deux châteaux tellement enclavés dans le canton de Saint-Sauveur, qu'ils ont au premier coup d'œil l'air d'en faire partie. Ce sont ceux de Pierrepont et de Canville.

    36. PIERREPONT.

     

         Cette paroisse qui a donné son nom à un des compagnons de Guillaume-le-Conquérant, est située entre les cantons de Saint-Sauveur-le-VIcomte, Barneville et la Haie-du-Puits.
          Dès le temps de Charlemagne et même de Pépin, Pierrepont avait un prieuré dépendant de l'abbaye de Fontenelle. Deux abbés de ce monastère y moururent l'un en 787 l'autre en 806 (Ex Chronic Fontanell. apd. Acherii spicit. In 4° : tom. 3, p. 231 -Gall. Christ. XI. Col. 172) ; mais nous n'avons pas à nous occuper des abbés de Fontenelle, je passe au compagnon de Guillaume-le-Conquérant.
          Suivant les généalogistes Anglais il s'appellait Robert (Liste de Holingshed dans St. Allais, p. 248. Collins Peerage, éd. sir. E. Brydges tom. V, p. 626. Debrett's Peerage 1816 p. 350 - Dugdale papers) il est assez probable qu'il suivit à la conquête Guillaume, comte de Varenne car il tenait des terres qui relevaient immédiatement de ce seigneur, peu de temps après la conquête, dans les comtés de Suffolk et de Sussex. Une paroisse de ce dernier comté a retenu son surnom de lui (Hurst Pierrepont ) ; ses autres possessions étaient assez étendues pour devoir le service de dix chevaliers.
          Un de ses descendants possédait dans le 13e siècle des terres considérables dans le comté de Nottingham, et entre autres la seigneurie de Holme, à laquelle il ajouta le surnom de Pierrepont (Collins ibidem Earl Manvers).
          Je ne suivrai pas plus loin cette famille en Angleterre où elle a passé par tous les titres de baron, de vicomte, de comte, de marquis et de duc. Le comte actuel de Manvers d'abord vicomte Newark héritier du duc de Kingston en est descendu.

         La même famille existe encore en basse Normandie, et particulièrement dans le département de la Manche, où elle a possédé jusque dans le 17e siècle le berceau de ses ancêtres qui est passé par des mariages dans les familles d'Osmond et de Briges. Elle a aussi possédé la baronnie des Biars érigée en marquisat par Louis XIV, en faveur de Louis de Pierrepont, dont les services et ceux de ses ancêtres sont rapportés dans les lettres d'érection j'en possède une copie (Ces lettres sont datées du mois d'avril 1690).
          Les Pierrepont de Normandie se sont divisés en trois branches. Une a continué d'habiter la paroisse qui fut leur berceau une autre s'est fixée dans le diocèse de Bayeux et la troisième a possédé la baronnie de Biars et la seigneurie de Saint-Marcouf. Bien que d'une même origine leurs armes sont différentes les premiers portent pâlé d'or et d'azur de six pièces, au chef de gueule ; les autres d'azur au chef  endenché d'or. Les armes des Pierrepont d'Angleterre sont très différentes ; mais cela est facile à expliquer. Le comte de Manvers descend des femmes. Son nom de famille est Meadows ; et en prenant le nom de Pierrepont il n'a pas quitté les armes de sa famille (V. Collins et Debrett sup.).
          Parmi les biens très considérables que la famille normande a longtemps possédés à Saint-NicoIas-de-Pierrepont, je n'ai pas encore pu reconnaître d'une manière certaine l'emplacement du château primitif, qui était, dit-on, sur la ferme connue aujourd'hui sous le nom d'Ecauzeville (Il serait possible qu'il eût été Saint.Sauveur-de-Pierrepont, sur un lieu nommé le Castel-de-Montaban, où sont le nom et tous les accessoires d'un ancien château.).
          Suivant l'état des paroisses et des cures du diocèse de Coutances dressé au milieu du 13e sièc!e, par Jean d'Essey, alors évêque de ce diocèse, il y avait deux cures à Saint-Nicolas-de Pierrepont une était à la présentation de Robert de Pierrepont, l'autre à celle du Roi ce qui me fait présumer qu'elle avait été confisquée par Philippe Auguste.
          De toutes mes listes de la conquête, la seule où je trouve le nom de Pierrepont, est celle de Th. Talleur citée par Holingshed et après lui par St.-Allais (Armorial de Normandie, page 248). La raison de ce silence vient peut-être de ce que la famille fut sans titre longtemps après la conquête (V. Collins et Debrett's Peerage ubi sup.).

    37. CHATEAU D'OLLONDE A CANVILLE.

     

         Il est indubitable qu'un seigneur de Canville était à la conquête d'Angleterre qu'il eut dans ce royaume des concessions très étendues, et que sa famille joua un grand rôle dans ce pays jusqu'au règne d'Édourd II (Masseville Hist. de Normandie tom. 1 p. 200. T. Talleur apd. Holingshed. – Collins Peerage, édit. de 1708, tom. II, P.153.) mais comme il existe en Normandie deux paroisses de Canville on peut douter laquelle fut le berceau de cette illustre famille Anglo-Normande. Voici les raisons qui m'ont déterminé en faveur de celle qui fait l'objet de cet article.
          Je trouve d'abord deux alliances entre les anciens Canville et des familles du canton de la Haie-du-Puits où est située notre paroisse. Sous le règne de Jean-sans-terre, Richard de Canville épousa la veuve de Thomas de Verdun ; Gilbert, son père, avait épousé Nicole fille aînée de Richard de la Haie-du-Puits (Collins ub. sup. Dugdale's Baronnage. Bank's Extinct Peerage tom. 1 p. 99.). On doit penser naturellement que des femmes du diocèse de Coutances, se marièrent dans leur pays plutôt que dans le pays de Caux.
          Une autre alliance fortifie ma conjecture. Raoul d'Harcourt, qui vivait à la fin du 12e siècle, épousa Isabelle, fille et unique héritière de Richard de Canville (Collins's Peerage by sir Egerten Brydges tom. IV pag. 432 et 3. Laroque, maison d'Harcourt, tom. 1.). A cette époque la baronnie de Saint-Sauveur venait de passer dans la famille d'Harcourt (V. sup. art. Saint-Sauveur.). Canville est à une lieue de Saint-Sauveur, le voisinage milite encore ici en faveur de notre département. J'avoue que je suis encore réduit à des probabilités ; en voilà déjà plusieurs mais ce qui leur donne un très grand poids c'est qu'outre le château actuel d'Ollonde à Canville qui remonte au 15e ou 16e siècle on trouve sur le même terrain ta motte et l'emplacement d'un château antérieur, et qui remonte assez probablement au temps de la conquête. J'ai fait faire dans le département de la Seine-Inférieure beaucoup de recherches pour savoir s'il existait à Canville en Caux des restes d'un ancien château ou au moins des traces de son emplacement mon savant ami, M. Auguste Le Prévost qui recherche les antiquités de la Haute-Normandie avec la plus infatigable persévérance et qui, par une complaisance particulière que je ne puis trop reconnaître a bien voulu faire sur le Canville de la Seine-Inférieure, les recherches les plus attentives, est convenu qu'il n'a pu rien y découvrir de ce genre. Son témoignage est d'autant plus précieux, qu'il connaît parfaitement cette partie de la Normandie, et qu'il avait pensé qu'on pouvait avec probabilité y placer le berceau des Canville d'Angleterre.
          Dans le registre des fiefs de Normandie sous le règne de Philippe Auguste, on voit que le château d'Ollonde à Canville, relevait avant ce règne de la baronnie (de honore) du Plessis (Lib. feodorum Domini Regis Philippi apd. Lib. nigr. episcop. Constant. feoda honoris de Litehare.) dont le chef-lieu, comme nous le verrons bientôt, était très-voisin de celle de la Haie-du-Puits.
          En citant le registre de Philippe-Auguste, il est indispensable de donner aussi quelques détails sur les Canville d'Angleterre et de Normandie antérieurement à ce Roi.
          Tandis que notre province était encore sous la domination des descendants de Guillaume-le-Conquérant Gérard de Canville, qui joua un rôle important en Angleterre où il avait de grandes possessions avait aussi des seigneuries en Normandie.
          Gérard et Richard de Canville souscrivirent à Valognes, avec plusieurs seigneurs du Cotentin, une chartre du Roi Henri II, en faveur de l'abbaye de Savigny (Cartul. de Savign. episc. Constant. Cart. III.).
    A la même époque, Gérard de Canville figure dans la liste des possesseurs de fiefs en Normandie, extraite du livre rouge de l'échiquier (Apd. Ducaret, traduction française, page 240.).
          Robert de Canville est cité parmi les chevaliers du Cotentin, qui comparurent à Tours, en 1272 (Rolle cité par Laroque traité du ban et arriere-ban pag. 90.).
          Si l'on veut connaître l'importance des Canville en Angleterre on peut consulter les actes et les histoires du 12e siècle. Le baronnage de Dugdale et les Pairages éteints de Banks et de Collins (Banks tom. pag. 49). Ceux d'Outremer portaient de sinople à trois lions passants d'argent armés et lampassés de gueules (V. Aussi Beauties of England. Britton's Lincoinshire pag. 607.). Il est probable que ceux de Normandie, qui étaient les mêmes, avaient le même écusson.
          Parmi les possesseurs du château d'Ollonde postérieurs à Philippe-Auguste, je trouve en 1257 Thomas Néel, filius Johannis militis qui confirme à l'abbaye de Saint-Sauveur les donations faites par ses prédécesseurs et dépendantes de cette seigneurie.
          Vers le milieu du 14e siècle, Jeanne Bertrand, héritière de la baronnie de Briquebec, épousa Guillaume Paisnel, baron de Hambye et seigneur d'Ollonde (Hist. des Grands Officièrs de la couronne, tom. VI, p. 691).
          En 1467, Franco, fille de Guy, baron de Mareuil en Angoumois et de Philippe Paisnel, dame d'Ollonde, épousa Philippe d'Harcourt et mourut sans enfants.
          Jacques d'Harcourt, cinquième fils de Jean seigneur de Bonnestable (Ibid, tom. IV, pag. 140), qui mourut en 1550, avait épousé Elisabeth Bouchard d'Aubeterre dame d'Ollonde fille de Louis Bouchard (ibid pag. 142 ), dit le chevalier sans reproche, et de Marguerite de Mareuil.
           Depuis ce temps la branche d'Ollonde fut distincte du reste de la famille d'Harcourt elle subsiste aujourd'hui dans MM. Amédée et Emmanuel d'Harcourt : le premier est Pair de France l'autre, membre de la chambre des députés pour le département de Seine-et-Marne.
          Ce qui reste d'habitable au château d'Ollonde est. converti en une ferme dont la construction remonte pour la majeure partie au 16e siècle. Ce bâtiment ainsi que ceux de ce temps, est plus ptttoresqueque commode à habiter ; en arrière il est flanqué de tours carrées qui semblent avoir été entièrement calculées pour la défense. Ces tours et leurs courtines qui forment des angles saillants et rentrants me semblent plus anciennes que la maison manable mais un peu plus loin on remarque plusieurs mottes ou élévations de terrain, qui formaient je pense l'emplacement du château primitif, dont on voit des pans de murs démolis et dispersés dans les fossés, qui sont encore profonds vers le couchant, et qu'on pouvait remplir d'eau très-facilement.
          Au lieu d'une motte simple et conique, comme celles qui indiquent généralement la place des châteaux du moyen âge, et plus particulièrement ceux du temps de la conquête, on voit ici plusieurs petites élévations rangées irrégulièrement, et en apparence indépendantes les unes des autres. Seraient-ce les restes d'une ancienne enceinte ?
          L'emplacement ou existait cette forteresse est sur une élévation à l'angle formé par la réunion d'un ruisseau à la petite rivière de Gris ; justement à la limite des arrondissements de Valognes et de Coutances.
    A l'entrée de la cour vers le levant, on retrouve les restes de deux tours jadis destinées à en empêcher l'accès aux ennemis.
          Le donjon, les tours de différentes formes qui composent une partie du château d'Ollonde l'aspect peu commun de ces tours quarrées qui flanquent les derrières de l'enceinte, forment une réunion plus confuse que pittoresque. L'effet de l'ensemble est imposant, mais peut-être singulier et incohérent.
          Je me suis procuré deux plans de ce château celui du cadastre, et celui qui fut levé il y a environ cinquante ans pour M. le marquis d'Harcourt celui-ci contient plus de détails, et particulièrement l'indication des anciens retranchements.

     

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    38. CHATEAU DE VARENGUEBEC.

     

         Après nous être écartés de la route de Saint Sauveur à Lessay, pour examiner un angle du canton de la Haie-du-Puits qui semble devoir plutôt appartenir à celui de Saint-Sauveur revenons sur nos pas vers le levant et dans une paroisse limitrophe de l'arrondissement de Valognes. Le château de Varenguebec est le premier où nous ayons à faire des recherches.
          Ce château jadis plus important que le précèdent n'offre pourtant pas un emplacement aussi curieux mais les renseignements sur la suite de ses possesseurs sont bien plus abondants.
          Beaucoup de ses anciens titres subsistent encore au chartrier de Coigny et plusieurs ouvrages imprimés donnent des détails sur ses seigneurs.
          Raoul d'Évreux, seigneur de Gacé (Vacy où Vassy) et de Varenguebec connétable de Normandie était un des tuteurs ou gouverneurs du duc Guillaume, qui conquit l'Angleterre. Il remplissait les fonctions de cette charge difficile, environ trente ans avant l'expédition qui rendit son pupille le plus puissant-Roi de l'Europe (Hist. des Grands Officiers de la couronne, tom. II pag. 477. Guill. Gemet. Lib. VII. Apd. script. Norman. Collect. pag. 268, 9, et Lib. VIII cap. XVII. Ibid pag. 301.).
          A cette époque mémorable la seigneurie de Varenguebec appartenait à la famille de Reviers, alliée de très près à celle du conquérant. J'en ai parlé au chapitre de la baronnie de Néhou (V. Sup. n°. 9. Grands Officiers de la couronne, tom. II Pag. 491, 2' 79- 2).
    Dans le siècle suivant, Mathilde de Vernon ( Reviers ) dame de Varenguebec épousa son cousin Richard de la Haie-du-Puits. Ils fondèrent conjointement l'abbaye de Blanchelande et le prieuré de Saint-Michel-du-Bosc (Gall. Christ, tom. XI, col. 945, 6. – Neustria pia, pag. 842 et seq.). L'emplacement de ces deux monastères fut pris sur le territoire de la seigneurie de Varenguebec.
          En mourant ils laissèrent trois filles héritières de leurs vastes domaines Gillette, une d'elles épousa Richard du Hommet, et lui apporta en mariage la baronnie de Varenguebec,et le titre héréditaire de connétable de Normandie qui y était attaché.
          Après avoir appartenu à plusieurs générations successives de la famille de Hommet, cette baronnie tomba une seconde fois en quenouille.
          Robert de Mortemer, qui mourut en 1277 la possédait au nom de sa femme Julienne ( ou Nicole) une des héritières de Jourdain du Hommet (V. Sup. article de la Luthumière, dans les Mémoires de la Société des Antiquaires, première année.).
          A la mort de Robert de Mortemer, Varenguebec passa par Jeanne sa fille à son mari, Guillaume Crespin maréchal de France qui avait suivi le roi St.-Louis à la croisade d'Afrique, en 1270.
          Le titre de connétable fut le sujet d'une grande contestation entre les trois filles de Jourdain du Hommet, mariées toutes trois. En 1294, il fut reconnu que ce titre appartenait à la baronnie de Varenguebec (Hist. des Grands Officiers de la couronne, tom. VI, p. 634). Guillaume Crespin fils de celui qui avait épousé Julienne du Hommet mourut en 1330, ne laissant encore que des filles.
          Jeanne qui était l'aînée, se maria en 1334, à Guillaume de Melun, comte de Tancarville et lui apporta entre autres seigneuries la baronnie de Varenguebec.
          Pendant deux siècles, vous voyez que cette châtellenie passe cinq fois en quenouille. Le 14e siècle n'était pas encore écoulé et déjà une autre fille l'avait portée dans la famille d'Harcourt.
          En 1381, Guillaume d'Harcourt, comte de TancarviIIe rendit au roi l'aveu de ses fiefs et entre autres de la baronnie de Varenguebec.
          Dans cet acte il prend le titre de connétable hérédital de Normandie (Laroque Hist. de !a maison d'Harcourt, pag. 4. ibidem pag. 716 et 17.).
    Pierre abbé de Blancheiande rendit, en 1452 à Guillaume d'Harcourt, seigneur de Tancarville, connétable héréditat de Normandie, un aveu pour son abbaye.
          Peu d'années après, Jeanne de Carbonnel, supérieure de Saint-Michel-du-Bosc, lui rendit aussi aveu pour son couvent, situé à Varenguebec, dont il représentait le fondateur comme possesseur de cette baronnie (Laroque Hist. de la maison d'Harcourt, pag. 718).
    Jeanne d'Harcourt, baronne de Varenguebec, mourut sans postérité en 1488 après avoir légué tous ses biens à François d'Orléans, comte de Dunois, son cousin (Hist. des Grands Offic. de la couronne, tom. V, pag. 137 ).
          Après ce temps et particulièrement depuis le commencement du règne de François Ier jusqu'en 1565 cette baronnie fut possédée par la famille d'Orléans Longueville et faisait partie du comté de Tancarville (Archives de Varenguebec au château de Coigny.).
          En 1565, Léonor d'Orléans, duc de Longueville et d'Estouteville connétable hérédital de Normandie, donna cette seigneurie à François de Rothelin, son frère naturel, se réservant pour lui et ses successeurs les titres honorifiques tels que celui de connétable et les prérogatives qui y étaient attachées (ibidem).
          En compulsant les archives du château de Varenguebec, j'ai trouvé dans presque tous les actes de ce siècle, Henri ou Henri-Auguste d'Orléans, marquis de Rothelin baron haut justicier de Varenguebec, premier baron de Normandie seigneur de Cretteville Beuzeville etc.
    En 1695, suivant l'état de la généralité de Caen dressé par M. de Foucault intendant de cette généralité la baronnie de Varenguebec appartenait à la duchesse de Nemours et au marquis de Rothelin. En 1726,elle était encore au marquis de Rothelin (Hist. des Grands Offic. de la couronne, tom. II, pag. 224).
          Vers 1740, cette baronnie fut achetée par M. le comte de Coigny elle fut peu de temps après réunie au duché de Coigny dont l'érection se fit au mois de février 1747 en faveur de François de Franquetot comte de Coigny. maréchal de France (Je possède une copie imprimée des lettres d'érection.).
          Depuis ce temps, la haute justice de Varenguebec avait été transférée à Coigny. En 1784, elle le fut de nouveau à Prétot, dont le duc de Coigny venait de faire l'acquisition. Elle y était encore au commencement de la révolution (Archives de Prétot au château de Coigny. ).
          Sous le règne de Philippe-le-Bel la baronnie de Varenguebec donnait la septième place à l'échiquier de Normandie, parmi les barons du Cotentin (Masseville, tom, III, pag. 44.–Laroque, Harcourt, page 160.).
          Je ne vois pas que le château ait jamais soutenu de siège il était situé à cinq cents mètres environ au levant de l'église sur un terrain qui s'élève en pente douce de ce côte. On ne peut pas dire qu'il soit sur un terrain escarpe, ni qu'on ait particulièrement cherché à en rendre les approches difficiles sinon peut-être du côté des douves et des étangs.
    L'enceinte formait un parallellogramme assez spacieux, fermé de murs épais, flanqués de tours, dont il est encore aisé de reconnaître l'emplacement. La plus considérable de ces tours (probablement le donjon) était sur l'emplacement de la boulangerie actuelle.
          Le bâtiment appelé la prison qu'on voit encore au centre de l'enceinte est bien plus moderne que le reste. C'était tout au plus une prison provisoire de la haute justice. Rien ne porte à croire qu'il ait été construit exprès pour une maison de détention.
          Il y avait aussi dans cette enceinte une chapelle dédiée à St.-Gilles dont il ne reste plus rien.

          Tous les remparts sont démolis il en reste peu de traces hors de terre mais on en peut aisément reconnaître la périphérie. D'ailleurs elle est bien figurée .sur le plan de la paroisse levé en 1754, qui se trouve au chartrier de Coigny, et dont M. Gallemand receveur du château a bien voulu me procurer un calque. Je le prie de recevoir ici tous mes remerciements pour l'extrême complaisance qu'il a mise à faciliter toutes les recherches que j'ai eu besoin de faire aux archives du château de Coigny.
          Des maisons manables dont il ne reste plus qu'une habitation de fermier formaient au levant une seconde enceinte contigue àla première deux tours défendaient l'entrée de cette espèce d'avant-cour de la forteresse.
          L'ancien siège de la haute justice n'avait rien de remarquable il était au dehors de l'avant-cour, vers le levant, à une très-petite distance.
    Nota. Il se trouve à une assez grande distance du château sur la terre de l'Andruerie, au levant du bois de Limor, un tertre factice nomme la butte Bertrand, qui peut avoir été un Tumulus, ou peut-être l'emplacement d'un château. J'ai cru devoir l'indiquer ici.

     

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    39. CHATEAU DE LiTHAIRE.

     

         La commune où est situé ce château touche à Varenguebec,et contient même une partie des terres de Blanchelande et de Saint-Michel-du-Bosc. Le château situé à la pointe d'une montagne, sur un emplacement d'ou la vue est extrêmement étendue de tous les côtes est aussi apperçu à de très grandes distances et même des côtes de l'île de Jersey qui en sont à près de dix lieues.
          Il n'en existe peut-être pas un seul dans notre pays qui soit plus connu des navigateurs de la Manche, et qui soit plus montré au doigt par ceux qui voyagent dans le Cotentin.
          Mais quand en l'examinant de près on veut en assigner l'origine et en indiquer l'usage aux différentes époques de sa longue existence il n'est pas facile de parler d'une manière bien assurée. Est-ce un château du moyen âge, n'est-ce pas plutôt le travail des Romains ? Voilà deux
    questions que j'ai entendu faire depuis mon enfance et je ne sache pas qu'on y ait jamais donné une réponse satisfaisante.
          En vous en parlant aujourd'hui, je n'ai pas la prétention d'éclaircir toutes ces difficultés. Je vous rapporterai seulement les faits et les renseignements peu nombreux que j'ai pu recueillir sur ce château extrêmement rapproché de mon berceau et celui de tous que j'ai le plus visité et le plus examiné.
          Est-il d'origine Romaine, Saxone ou Normande ? Est ce une vigie on corps-de-garde, comme le croient les habitants du lieu est-ce un castellum exploratorium des Romains, ou un château fort du moyen âge qui aura servi pour la défense et l'habitation ?
          En voyant la simplicité et l'uniformité de sa construction ses murs droits sans accessoires sans crénaux sans mâchicoulis sans corbeaux sans toiture, sans saillie, tellement unis au sommet qu'on s'y promène facilement, mais sans parapets, d'une hauteur au dessous de la moyenne mais d'une grande épaisseur, il est difficile de croire qu'il ait jamais pu exister une garnison entre quatre murs très rapprochés ; mais en voyant vers le midi deux portes ouvertes dans un mur assez épais pour qu'on y ait pu pratiquer une espèce de galerie couverte, it est difficile de ne pas croire qu'on a eu l'intention d'y placer des factionnaires ou des excubiatores en petit nombre, dont la consigne était de voir venir, mais non d'attendre l'ennemi, ce qui s'accorderait assez avec l'idée de corps-de-garde que l'on a aux environs du château de Lithaire. Mais si c'était un exploratarium à quelle nation appartenait-il ? L'épaisseur de ses murs, leur solidité, leur simplicité, leur position élevée les cintres semi-circulaires des portes m'ont fait penser aux Romains mais a!ors pourquoi n'y aurait-il ni briques, ni pierres de taille ? En vérité, je n'en sais rien, et je ne puis que former des conjectures. Cependant je pencherais pour une origine Romaine et le voisinage du Montcastre, dont la montagne de Lithaire est pour ainsi dire un poste avancé, me confirme dans cette idée.
          Mais alors me dira-t-on pourquoi avec cette idée ai-je placé ce que je prenais pour un exploratorium Romain parmi les châteaux du moyen âge ? A cette difficulté, que je me suis faite je réponds que ce ne serait pas la première fois qu'on aurait vu le travail des Romains converti à l'usage de leurs successeurs et que même dans le cas actuel il est constant, par des accessoires postérieurs, qu'on a converti le corps-de-garde de Lithaire en château du moyen âge.
          L'enceinte du château forme un quarré long. Sa. longueur extérieure du nord au sud est de cinquante pieds, sa dimension intérieure du même côte est de vingt-huit, ce qui donne vingt-deux pieds pour l'épaisseur des murs. L'autre côté E et O a vingt-cinq pieds dans œuvre et quarante-six extérieurement.
          Le mur septentrional a été démoli par Philippe-Auguste, à ce qu'on croit il en reste des masses de maçonnerie qui ont roulé jusqu'au pied de la montagne car elle est très escarpée de ce côte d'autres sont restées en chemin.
          Le mur méridional est entier, il a douze pieds d'épaisseur. Deux ouvertures ou portes à plein ceintre sont au milieu de ce mur. De ce côté la montagne est encore très escarpëe mais la descente est moins longue. Près de celle de ces portes qui est le plus au levant, on avait pratiqué dans l'épaisseur du mur un petit espace voûté ou les sentinelles pouvaient être à l'abri, et pourtant surveiller tout ce qui se passait au sud du château leur surveillance pouvait de ce côté s'étendre sur la mer entre Coulances et Portbail.
          La hauteur des murs était d'environ vingt-cinq pieds il n'y a ni aux encoignures ni aux portes, aucune pierre de taille. Tout est d'un grès quartzeux très-rude, qu'on trouve en abondance sur le lieu et de la même nature que les rochers dont le sommet du mont est hérissé.
          Aucunes fondations ne se retrouvent hors du bâtiment dont je viens de parler. Vers le S.O. On y a ajouté au pied de la montagne une enceinte en forme d'arc ces travaux sont postérieurs et je crois du moyen âge. Dans cette nouvelle enceinte il y avait jadis une chapelle dédiée à St.-Etienne. De tous les autres côtés on pouvait sans obstacle parvenir au pied des murs du château.

         La tradition locale lui donne une origine Romaine. Tout me porte à croire que cette tradition est fondée, mais il n'en est pas moins constant que sous les ducs de Normandie, avant et après la conquête de l'Angleterre, le château de Lithaire était devenu chef-lieu d'une baronnie qu'elle fut confisquée par Philippe-Auguste, et que plus de cent ans après cette confiscation, le château existait encore parmi les forteresses du pays où l'on faisait guet et garde.
          Il est incontestable qu'un seigneur de Lithaire suivit le duc Guillaume à la conquête de l'Angleterre il est indiqué sur presque toutes les listes de cette expédition (Chroniq. de Normandie chez le Mégissier. – Hollingshed, Masseville, wace, roman de Rou). On trouve aussi qu'après la conquête des concessions furent faites en Angleterre, à des seigneurs du nom de Litheare ce qui est évidemment le même nom, car on l'écrit de la même manière dans le registre des fiefs de Philippe-Auguste.
          La tradition du pays et d'anciens actes que je n'ai pu me procurer, mais qui existent indubitablement, s'accordent pour faire croire que ce château fut démoli par Philippe-Auguste.
          L'auteur de l'histoire militaire des Bocains le dit positivement (page 139) mais il ne cite jamais ses garans.
          Quoiqu'il en soit, il fut bien certainement confisqué par ce Roi il n'est pas moins certain que la châtellenie de Lithaire était considérable.
          Le registre des fiefs de Normandie rédigé vers 1208, le prouve « Le Roi, y est-il dit, possède par forfaiture (per eschaetam (V. Eschaeta dans Spelman.) le château de Lithaire, qui doit le service de deux chevaliers et demi (Lib. 1. feodorum Domini Reg. Philippi apd. lib. nigrum mss. dioc. Constant.) »
          Beaucoup de fiefs dépendaient alors de la baronnie de Lithaire (Ibidem.) au temps de la confection du registre dont je viens de parler. Les principaux étaient ceux que possédaient Richard de Vauville, Richard des Moitiers, Robert Taillefer, Richard de Saint-Germain dans la paroisse de Nay, Geffroy du Retour, Guillaume Roges, Guillaume Le Fêvre, Guillaume de Prael ou de Préaux (de Pratellis), Gautier de Sainte.Mère-Église, Thomas de la Fière, Jean d'Anneville-en~Saires, Foulques de Commendal-au-ViceI, Henri d'Aboville, etc. (Lib. nig. feodorum pênes nost. et à la fin de l'Hist. d'Harcourt, par Laroque.).

         J'avais pensé d'abord que la confiscation et la démolition du château en avaient occasionné la destruction absolue mais je vois que dans le siècle suivant on y faisait encore le service militaire en temps de guerre. Voici ce que j'en trouve dans un rôle des fiefs du baillage de Coutances, rédigé en 1327 par ordre de Guillaume-le-Blond, grand bailly de Cotentin : « Guillaume de Bruilly tient du Roi en la vicomté de Carentan le fieu de Vetye, à cause duquel il doibt garder le chasteau de Lithaire, un jour et une nuit en temps de guerre (Je possède ce registre).
           Il y avait autrefois à Lithaire le siège d'une vicomté qui fut transféré d'abord à Lessay puis réuni au baillage de Périers. Le comte d'Arundel, de la famille d'Aubigny, était possesseur du château de Lithaire à l'époque de sa confiscation. Sa mémoire est encore abhorrée dans la paroisse on fait sur sa cruauté les histoires les plus incroyables, et auxquelles on n'eût probablement jamais pensé si son parti avait été victorieux. Vae Victis !
          Au moment de la révolution, le domaine de !a Couronne ne possédait plus à Lithaire que l'emplacement du château une ferme considérable et qui en dépendait autrefois, avait été donnée aux Templiers. A l'époque de la destruction de cet ordre fameux, Philippe-le-Bel l'avait probablement aliéné à charge de redevances de service militaire au château, et de remplir les fonctions de sergent fieffé de Lithaire que donne Montfaoucq à celui qui la possédait en 1463 (V. la recherche de noblesse de Rémont Montfaoucq, éd. de M. Labbey de La Roque, pag. 79) il appartenait à la famille le Berseur, qui, dans le 17e et le 18e siècles, possédait une seigneurie à Fontenay en Cotentin. On voit dans l'épitaphe d'un seigneur de cette famille mort vers 1680, qu'il était commandant de Cherbourg et seigneur de Lithaire (Cette épitaphe est dans l'église de Saint-Marcouf en Cotentin, près de la porte de la sacristie. Il est beaucoup parlé de cette famille dans l'histoire de M. Pâté, curé de Cherbourg, par M. Trigan.); c'est probablement de celui-ci on de ceux de cette famille que la fiefferme de Lithaire avait pris le nom de Fontenay qu'elle porte aujourd'hui. Je trouve dans des titres du 16e siècle, que les Berceur avaient la seigneurie de Lithaire en 1570.
          La position du château sur une montagne escarpée, hérissée de rochers et très pittoresque, paraît avoir attiré l'attention d'un peuple antérieur aux Romains dans les Gaules. Il y a sur cette montagne une pierre mobile placée sur la pointe d'un rocher c'est l'espèce de monument druidique à laquelle on a donné le nom de Logan.
          J'en ai parlé dans un mémoire sur les monuments druidiques du département de la Manche (Ce Mémoire est imprimé dans les archives annuelles de Normandie, de M. L. Dubois, ann. 1824).
          On a trouve entre le château et l'église et au village d'Amont-la-Ville, qui n'en est pas éloigné vers le sud une grande quantité de machefer et les restes des fours dans lesquels on croit que le fer a été fondu. Il est certain que les Romains fondaient quelquefois le minerai de fer d'une
    manière assez imparfaite près de leurs établissements et même de leurs explorations (Reessurvey of south Wales Glanmorganshire, pag. 550.). C'est un fait qui n'a pas échappé à l'attention des auteurs de l'ouvrage intitulé Beauties of England. J'avais traité de fables tout ce que les hommes âgés de Lithaire m'avaient dit du fer qu'on fondait autrefois sur la montagne avec du charbon de bois, et des fours ayant servi à cet usage dont plusieurs d'entre eux avaient vu des restes presque entiers mais en lisant la description historique du comté de Durham dans les Beauties, j'ai été très frappé de la ressemblance qu'il y a entre la tradition de Lithaire et le passage suivant.
          « At Whitchill near Chester the street is a blast furnace which makes iron métal from iron stone dug out of pits in the neighbouring fells. These fells have been very much worked for iron stone (supposed by the Danes when they were in possession of the kingdom) as appears from the great quantity of scoria which is found upon the fells. The method in those times had been to melt the iron-stone with charcoal in a large smith y hearth called a Bloomery and then in another hearth to melt it down again and reduce it to bar iron for all manner of country uses, and when the wood failed they removed their hearths to where it was more plenty, so that evidently they must have blown their blomery bellows lither by hand or with horses or have known the use of air furnaces as the most scoria or cinder is found upon the high grounds where no water could ve obtained. Hutchinson Durham vol. a pag. 398 ; Britton Beauties Durham pag. 188. "
          Une ancienne famille noble du nom de Lithaire, subsistait encore naguères à Laune et à Vély, canton de Lessay, elle portait de gueules à deux fasces d'or accompagnée de six croisettes de même. J'ignore quels rapports elle avait avec le château qui nous occupe, il y avait au moins celui du voisinage.
          J'ai fait dessiner les ruines du château de Lithaire ( voyez les planches de l'atlas ).

     

    [ Ce château possède son article dans ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-lithaire-manche-a130492188 ]

     
    40. BOLLEVILLE.

     

         Cette paroisse, située sur la route de la Haie-du-Puits à Pierrepont, a été le berceau d'un des compagnons de Guillaume-le-Conquérant (Bolvyle, listes de Brompton et de Duchesne). Je n'ai encore pu retrouver l'emplacement de son château. Je signale ce lien comme devant en contenir un.
          Il y avait autrefois dans cette commune une maison de lépreux, fondée en grande partie par les seigneurs de la Haie-du-Puits. J'en possède le cartulaire, ou une copie sur vélin collationnée dans le 15e siècle.
          Cette léproserie a été réunie à l'abbaye de Lessay sous le nom de prieuré de Sainte-Madelaine de Bolleville.
          Il y a dans la lande de Bolleville, quelques retranchements, mais rien ne porte à croire qu'ils aient appartenu à un château du moyen âge.

     
    41. CHATEAU DE LA HAIE-DU-PUITS.

     

         La baronnie de la Haie-du-Puits qui remonte au partage de la Normandie, ainsi que celles de Saint-Sauveur et de Briquebec n'a d'annalles bien constantes et bien suivies que depuis la fondation de l'abbaye de Lessay peu d'années avant la conquête. Turstin Halduc fondateur de ce monastère, était baron de la Haie-du-Puits, ainsi que son fils Odon Capel qui eut une part bien plus grande que lui à la dotation et à la construction de cette maison.
          S'il était ici question de faire l'histoire généalogique d'une famille descendue des anciens ducs de Normandie, et alliée à tout ce qu'il y avait de grand et d'illustre dans la province, d'une famille qui avait largement contribué à la fondation de beaucoup de monastères, qui pour son compte en a fondé ou doté plusieurs dans le diocèse de Coutances qui s'est signalée à la conquête d'Angleterre, et a formé dans ce royaume bien des établissements civils et religieux, je pourrais vous faire un article très-étendu. Les historiens contemporains les cartulaires les baronages d'Angleterre, les histoires des comtes celles de nos diocèses Normands en son remplies ; mais ici je ne dois m'occuper que du château qu'ils habitèrent et de ceux qui le possédèrent après eux.
          Au temps de la fondation de Lessay, les domaines de la baronnie de la Haie-du-Puits, dans le Cotentin seulement doivent avoir été très considérables si l'on en juge par les donations que le fondateur fit à cette abbaye (Gall. Christ. XI, instrumenta dioc. Constant, cart. X - col. 234. – Neust. pia pag. 618 à 621).
          Son fils Odon (cum capello) lui succéda nous avons vu, en parlant de nos monastères quelle part it eut à la construction de l'église de Lessay. Guillaume-le-Conquérant le fit son sénéchal il est connu en Angleterre aussi bien qu'en Normandie, sous le nom latin d'Eudo Dapifer. Il eut de grandes concessions dans les comtés de Sussex, de Surrey, d'Essex et de Suffolk. Ce futl ui qui donna le prieuré de Beaute à l'abbaye de Saint-Étienne de Caen (ibid, inter instrum., col 173). En qualité de grand sénéchal, il signa presque toutes les fondations considérables faites pas son souverain. Son tombeau se voyait encore au commencement de la révolution, dans l'ancien chapitre de Lessay près du cloître ; j'ai dit ce qu'il était devenu (Mem. sur les abbayes du département, article Lessay. ).
          Son fils (ou son neveu) Robert de la Haye, qui vivait au commencement du 12e siècle ratifia beaucoup de donnations faites par ses ancétres et entre autres celle du prieuré de Boxgrave dans le comté de Sussex (Tanner's notitia monastica Sussex - Shoberl Survey of Sussex, pag. 44, 5 mém. sur les abbayes du département de la Manche, voir Lessay).
          Outre ce Robert, il y en avait un autre du même nom qui, quarante ans auparavant, accompagna Guillaume à son expédition d'Angleterre (Masseville I, pag. 301.–Wace, Roman de Rou – Gall. Christ. XI, col. 917. Neustria pia pag. 619). Je ne serais pas surpris que ce fut le frère d'Odon Capel, et le père de celui qui fonda le prieuré de Boxgrave.
    Au milieu du 12e siècle le château qui nous occupe appartenait à Richard de la Haie (Richard et Raoul de la Haie étaient fils de Robert et de Mimel. V. Neustria pia pag. 618 et 19. V. la note troisième au château du Plessis, infr.) il épousa sa parente Mathilde de Vernon, dame de Varenguebec, qui lui apporta en mariage le titre de connétable de Normandie il était auparavant sénéchal de Henri II, Roi d'Angleterre.
    Nous avons vu qu'ils avaient fondé conjointement à Varenguebec l'abbaye de Blanchelande et le couvent de Saint-Michel-du-Bosc. Leurs épitaphes, données par l'auteur du Neustria Pia (verboBlancalanda) marquent le temps de leur mort.
          De leur mariage ils ne resta que des filles, Gillette l'aînée eut la châtellenie de la Haie-du-Puits, qu'elle porta en mariage à Richard, baron du Hommet, qui fut, ainsi que ses descendants, connétable de Normandie (V. sup. à l'article de Varenguebec).
          Leur petite fille, Julienne du Hommet, épousa Robert de Mortemer, qui prit le titre de connétable et mourut en 1277 (V.sup. l'art. Varengnebec.).
          Nous n'avons dans ce département aucune chatellenie qui en tombant plus fréquemment en quenouille se soit plus constamment conservée dans des familles Anglo-Normandes ; celle de Mortemer est la troisième.
          En parlant du château du Hommet, je vous donnerai des détails sur les barons qui en portèrent le nom. Les Mortemer tiraient le leur d'une baronnie de haute Normandie Raoul de Mortemer eut un commandement à la bataille de Hastings, et ses successeurs furent très-puissants en Angleterre (Dugdale Baronage. Collins Peerage, édit. De 1711, tom II ,part. I, pag. 211, 216, part. II, pag. 15 et 21. Banks Extinct. Baronage.) mais revenons à ceux de la Haie-du-Puits.
    Après les Mortemer, je ne sais pas précisément à quelle époque un Campion devint possesseur de la baronnie il en fut privé, en 1353, par le roi de Navarre, Charles-le-Mauvais. Ce prince la rendit ensuite à Mathieu fils de Robert Campion, qu'il en avait dépossèdé. Mathieu Campion mourut sans postérité, après avoir légué cette châtellenie à sa sœur Jeanne ; celle-ci épousa d'abord Henri de Colombières. François de Colombières, un de ses descendants, vendit le 29 juin 1491, la baronnie de la Haie-du-Puits, à Cristophe de Cérisay (Hist. mss. des Grands Baillys du Cotentin n° LV.) seigneur de Vely, qui, peu de temps après, devint grand Bailly du Cotentin. Marie de Cérisay sa fille unique épousa Gaston de Brezé, seigneur de Montmartin qui, par ce mariage, devint baron de la Haie-du-Puits ; Louis de Brezé évêque de Meaux, était baron de la Haie-du-Puits en 1588 : il vendit cette baronnie à Jean de Magneville.
          Artus de Magneville, son fils, qui reconstruisit une partie du château, mourut vers 1616 et fut inhumé au haut du chœur de l'église paroissiale où l'on voit encore son monument dans une niche du côté de l'évangile ( J'y ai copié son épitaphe en 1819).
          En mourant, Artus de Magneville laissa trois garçons et trois filles. Gédéon l'ainé de ses fils (V. Rechercbe de Roissy. - La Chesnée des bois,dictionn. de la noblesse, article de la Haie. Archives du château.) mourut sans postérité, en 1645 : son frère Jacques lui succéda pour la baronnie de la Haie-du-Puits, qu'il vendit, en 1648 à Pierre-Louis Davy de Sortosville celui-ci ne la posséda pas longtemps. Elle fut saisie en décret par Judith le Loup veuve de Gédéon de Magneville, et adjugée en 1652 à Charles Martel, son second mari ; mais après cette adjudication, Louis du Fay, président au parlement de Rouen, mari d'Anne de Magneville, la réclama au nom de sa femme, Françoise du Fay, sa fille unique, épousa, en 1689, Bruno-Emmanuel Langlois de Motteville, président à la chambre des comptes de Rouen et la lui apporta en mariage leur fils François Marie de Motteville, conseiller au parlement de Rouen, posséda après eux cette baronnie qui, en 1742 appartenait encore à Claude Bruno de Motteville.
          Henri marquis de Thieuville l'acheta en 1759 ; mais dix ans après cette acquisition son fils, unique rejetton d'une des plus anciennes familles de la province, étant mort, elle fut revendue au marquis de la Salle, qui en était possesseur à l'époque de la révolution. Elle fut alors vendue par parties en conséquence des lois révolutionnaires.
          Cette baronnie avait été érigée en marquisat par lettres patentes du 11 juin 1656, enregistrées au parlement de Rouen, en 1657, et l'année suivante à la chambre des comptes (Archives du château).
          Les anciens Seigneurs de la Haie du puits avaient la sixième place à l'échiquier de Normandie parmi les Barons du Cotentin.(Masseville hist. de Normandie, tome 3 p. 46)
          J'ai fait dessiner et envoyé à la préfecture les ruines de ce château (Elles viennent d'être dessinées de nouveau par M. De Caumont. (voyez l'Atlas)). Ces ruines sont sur un tertre assez élevé à l'entrée du bourg sur la route de Saint-Sauveur-te-Vicomte.
          En voyant l'état très-avancé de ta décadence de ce château on ne se doute guères qu'il a été habité il y a moins de soixante ans par ses possesseurs. Cependant rien n'est plus constant : madame la marquise de Thiboutot et madame d'Octeville filles du feu marquis de Thieuville, y ont passé des étés entiers et m'ont souvent donné des détails sur ce grand édifice qui pouvait bien offrir un beau sujet pour le dessinateur mais qui n'en était pas moins une habitation fort incommode. Tout on presque tout y avait été sacrifié au besoin de s'y défendre contre les ennemis ou d'y réunir des assemb!ees très nombreuses. De là ces tours ces paginons ces crénaux ces ponts-levis ces corps avancés l'énorme épaisseur des murailles, l'irrégularité des distributions intérieures de là cette immense salle qui occupait presque entièrement le rez-de-chaussée. Il était facile d'apercevoir que ceux qui l'avaient construit ou réparé avaient plus connu les guerres du moyen âge et les guerres de religion que les commodités de la vie. Ceux qui voient aujourd'hui de pareils édifices, ceux qui les habitent, ne songent pas assez qu'ils doivent leur bizarrerie apparente plutôt à la nécessité et l'expérience qu'aux caprices de la mode.
          Les parties les plus pittoresques du château étaient du temps des Magneville. Sur la porte principale on voyait leurs armes, et au-dessus de l'écusson cette inscription en caractères du seizième siècle : Artus de Magneville et Judith aux Epaules, servez Dieu, honorez le Roi.
    Je n'ai pas connaissance de sièges soutenus par ce château. On sait que depuis 1418 jusqu'en1450 les Anglais furent maîtres de la Normandie. Par des titres communiqués j'apprends que durant cette occupation la Baronnie appartenait au duc de Bedford. Le château est compté parmi les forteresses que le comte de Richement reprit
    aux Anglais en 1449. (Hist. d'Artus comte de Richemont par Gruel, p. 139)
          La mémoire du baron Judion (Gëdéon de Magneville) n'est pas tout-a-fait perdue. Il figure encore beaucoup dans les anciennes traditions du bourg le nom de son père y est à peine connu quoique son monument soit conservé, et son épitaphe très lisible.
          La Haie-du-Puits relevait anciennement du comté de Mortain avec titre de Châtellenie et de Baronnie entière. En 1399 la juridiction s'étendait aux paroisses de Montgardon Angoville, Saint-Germain et Bretteville-sur-Ay, Saint-Symphorien, Saint-Nicolas de Pierrepont, Baudreville, Varenguebec, Neufmesnil, Mobec, Bolleville, Doville, Saint-Côme, Prëtot, Saint-Jores, Vely, Sainte-Opportune, Gatteville, Réville, Saulxemesnil, Morfarville, Gréville, Besneville et Saint-Maurice. Il y avait encore alors à la Haie-du-Puits deux marchés par semaine, le mercredi et le samedi. Il y a longtemps que le dernier a été supprimé. Le revenu avait été beaucoup diminué par les donations faites dans les 11e, 12e et 13e siècles par des partages entre sœurs et par des aliénations.
          En 1700, M. Foucault, Intendant de la généralité de Caen n'en estimait plus les revenus qu'à 15 000 f. et dans ce nombre il y avait une grande quantité de rentes seigneuriales.
          Les Magneville portaient de gueule à l'aigle à deux têtes d'argent. Les Cerisay d'azur au chevron d'argent à trois croissants d'or.

     

    [ Ce château possède son article dans ce blog à cette adresse : http://remparts-de-normandie.eklablog.com/les-remparts-de-la-haye-du-puits-manche-a130018134 ]

     
    42. OMONVILLE-LA-FOLIOT.

     

         Topographiquement parlant ce serait ici la place de Bolleville que j'ai mis avant la Haie du Puits. Il est constant que cette paroisse est sur la route de la Haie-du-Puits mais ces transpositions qui peuvent tout au plus donner un peu plus de peine a ceux qui cherchent sur la carte, n'ont besoin que d'être indiquées. Je m'empresse de le faire pour celle ci.
          Au reste Omonville la seule paroisse qui puisse nous ramener de ce côté, n'a pour attirer notre attention qu'un surnom attaché à la conquête. Ce surnom de Foliot suffit-il pour motiver la recherche d'un château parce qu'il se trouve dans presque toutes les listes de cette expédition ? (V. Brompton apud Angliae script. et Duchesne si souvent cités)

         Je sais que ce nom figure beaucoup en Angleterre et dans plusieurs des Cartulaires de Normandie. Il est clair que le surnom d'Omonville lui vient d'un Seigneur qui s'appelait Foliot. L'acte de fondation de l'abbaye de Lessay en fait foi Ex dono Rogerii Foliot... Ecclesiam de Omonville. (Neust. pia p. 621. Gal. Christ. col. 237) Gilbert Foliot Evêque de Londres (Godwin de presulibus Angtiae, Thierry, hist. de la conquête, tome 2 p. 412 et seqq. 431 -Tome 3 p. 51) depuis 1163 jusqu'en 1187 fut un des plus actifs instruments du Roi Henri II contre St. Thomas de Cantorbéry. La douzième année du règne de Henry II, Robert Foliot déclara 15 nefs de chevaliers que sa famille avait possédés en Angleterre depuis la conquête. (Bancks extinct. Peérage tome I. p. 84. From. Dugdaie. il portait de gueules à la bande d'argent. Une autre branche établie dans le comte de Dorset portait d'argent à trois pals de gueules au franc quartier. Senestre de gueules. Hutchins Dorset, tom II. p. 463) Plusieurs Seigneurs de ce nom,qui sont nommés dans le baronnage éteint de Bancks possédèrent des emplois considérables en Angleterre. Il est probable qu'ils étaient dela même famille que ceux du Val-de-Saire dont j'ai parlé aux articles de Barfleur d'Anneville et de Monfarville. Mais avaient-ils un château à Omonville c'est ce que je n'ai pas encore pu vérifier, et ce qu'il n'est pas inutile de rechercher. "

    Charles de Gerville 

     

    [ Ce château est évoqué dans un article de ce blog à cette adresse : http://rempartsdenormandie2.eklablog.com/les-remparts-d-omonville-manche-a210695090 ]

     

    Pour les autres châteaux de l'arrondissement de Coutances, voir les cantons de Perriers, de Lessay, de Saint-Malo-de-la-Lande, de Saint-Sauveur-L'Endelin, de Coutances et de Montmartin-sur-Mer, aller ici. [NdB]

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  • LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche) LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche) LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)

     

    Ci-dessus : à droite, une photo extraite de https://www.ouest-france.fr/normandie/cherbourg-en-cotentin-50100/ce-week-end-gilles-de-gouberville-est-celebre-au-ravalet-4292027 ; au centre,une mMaquette du manoir, photo extraite de  https://www.vds-phl.fr/article-mesnil-au-val-et-gilles-de-gouberville-le-manoir-de-barville-120194808.html ; à droite, une photo extraite dehttps://www.cotentine.fr/normandie/patrimoine-normand/le-manoir-de-barville-au-mesnil-au-val-50

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)      « Le manoir de Barville est une ancienne demeure, construite à la charnière des 15e et 16e siècles et dont il subsiste une tour, qui se dresse sur la commune française du Mesnil-au-Val dans le département de la Manche, en région Normandie. (...)

         La tour de l'ancien manoir de Barville est située, à 700 mètres au sud de l'église Notre-Dame du Mesnil-au-Val, dans le département français de la Manche. » [1]

     

      

     

    Plan de situation du manoir de Barville au Mesnil-au-Val ; blason de la famille Picot de Gouberville, de sable à deux chevrons d'or accompagnés de trois molettes de même extrait de https://gw.geneanet.org/pierfit?lang=fr&n=picot+de+gouberville&oc=0&p=a...armes 

     

    Historique

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « En 1507, Guillaume V Picot, seigneur de Gouberville épouse Jeanne du Fou, fille de Guillaume du Fou, capitaine du château de Cherbourg et seigneur du Mesnil-au-Val. Fille unique, Jeanne hérite de la seigneurie à la mort de son père. Elle-même décède en 1523. Les fief et manoir du Mesnil-au-Val échoient ainsi à la famille Picot.
    Guillaume Picot abandonne son nom « Picot » pour celui de Gouberville. » [2]

     

    Ci-dessus, blason de la famille du Fou, d'azur à une fleur de lys d'or, chargée de deux faucons ou éperviers qui portent un pied sur la partie de la fleur de lys recourbée et élèvent l'autre sur le haut de la fleur de lys, https://man8rove.com/fr/profile/nlof1sph-jeanne-du-fou

     

         « Cette famille dont le nom patronyme est Picot (ou Piquot), porte "de gueule à la croix ancrée (ou neslée) d'argent".
          Elle s'est établie en Basse-Normandie avant le 12e siècle. » [3]

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « Dans un aveu de foi et hommage rendus au roi le 23 mai 1519, la seigneurie du Mesnil-au-Val est décrite comme « fief de haubert auquel fief a manoir, chapelle et volière a pigeons, domaine en terres labourables et non labourables de 10 acres ou viron ».

         En 1544, à la mort de son père, Gilles hérite des seigneuries de Gouberville et du Mesnil-au-Val. Il choisit de passer sa vie au manoir du Mesnil. » [2]

     

    Ci-dessus, blason de la famille Picot de Gouberville, de sable à deux chevrons d'or accompagnés de trois molettes de même extrait de https://gw.geneanet.org/pierfit?lang=fr&n=picot+de+gouberville&oc=0&p=a...armes  

     

    Gilles Picot, sieur de Gouberville

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « Gilles Picot, sieur de Gouberville, du Mesnil-au-Val et de Russy, né en 1521 et mort le 7 mars 1578, au Mesnil-au-Val est un mémorialiste ou diariste français.

         Gentilhomme normand, de petite mais ancienne noblesse, Gilles Picot est le fils aîné de Guillaume V Picot, seigneur de Gouberville, et de Jeanne du Fou, probablement née au manoir de la Cour à Rauville-la-Place, fille de Guillaume du Fou, seigneur de Barville, au Mesnil-au-Val et capitaine du château de Cherbourg.

         Installé au Mesnil-au-Val, Gilles succède à son père pour la charge de lieutenant des Eaux et Forêts pour la vicomté de Valognes en 1543. En 1544, il hérite, de son père, des seigneuries de Gouberville et du Mesnil-au-Val, puis en 1560 de la seigneurie de Russy de son oncle Jean Picot, prêtre. » [1] 

     

    Ci-dessus, une gravure ancienne extraite de https://www.wikimanche.fr/Tour_de_Barville

     

         « Gentilhomme campagnard, seigneur de Gouberville et du Mesnil au Val est connu sous le nom de sire de Gouberville pour le journal qu'il rédigea. » [3]

     

         « Il est l’auteur d'un journal, dont les années 1549 à 1562 ont été conservées et dont le manuscrit original a été découvert dans le chartrier du château de Saint-Pierre-Église par l'abbé Alexandre Tollemer. Cet ouvrage (réédité en trois volumes en 2021) est un témoignage de la vie d’un gentilhomme campagnard dans le Nord-Cotentin au 16e siècle. » [1]

     

         « 13 années du Journal de Gouberville ont été retrouvées, Gilles y décrit, au jour le jour, les activités de l'exploitation agricole dont il a été le maître, la société qui l'entoure, ses rencontres, ses déplacements, la vie, la mort, la maladie...
           Un document qui, par sa rareté, en fait un témoignage exceptionnel de la vie dans le Nord-Cotentin au 16e siècle. » [3]

     

         « Lorsqu’il commence son journal, le sire de Gouberville a environ trente ans. C’est un homme en pleine possession de ses moyens physiques, résistant, adroit, bien entraîné, sachant tenir une épée. Il tire à l’arbalète et au mousquet. Habile aux jeux d’adresse et de force, il se plait à jouter avec ses amis. Il sait, à l’occasion, manier les outils de la ferme et conduire les lourds charrois. Homme cultivé, il lisait le latin et utilisait des caractères grecs pour transcrire des phrases françaises, quand il voulait noter dans son journal des faits que ses gens ne devaient pas lire.

         Son esprit méthodique et ordonné, tel qui transparaît dans son Livre de raison, met en évidence le sens pratique dont il fait preuve en toute occasion. Mais les traits les plus marquants du caractère de ce jeune seigneur, ce sont ses qualités de cœur et sa valeur morale qui le rendent si sympathique. » [1] 

     

         « Célibataire endurci, il veille sur ses cinq filles illégitimes et porte une affection bienveillante à son demi-frère. Quand il le faut, il n’hésite pas à prêter mains fortes et seconder ses garçons de ferme pour les travaux des champs. » [4]

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « Il mourut célibataire mais avec cinq enfants naturels.
          En 1570, Gilles obtenait des lettres patentes du roi Charles IX l'autorisant à délaisser le "surnom" de Picot toujours porté par ses prédécesseurs, pour prendre à l'avenir le "cognom" de Gouberville " et à cause qu'il est Seigneur du dit lieu ".
          Son demi-frère Symon et son cousin Michel fils de Thierry, dans les lettres de légitimation qu'ils obtinrent en 1578 après la mort de Gilles, prirent également le nom de Gouberville alors même que la seigneurie du même nom avait quitté la famille pour passer dans celle des Crosville. »
    [3]

     

    Ci-dessus, blason de la famille Picot de Gouberville, de gueules à la croix ancrée d'argent, https://man8rove.com/fr/profile/855qmhzx6-gilles-picot-de-gouberville

     

         « Il est enterré dans l'église du Mesnil-au-Val, sans qu'on sache bien l'endroit. » [1] 

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « A sa mort en 1578, la seigneurie du Mesnil-au-Val est partagée entre sa sœur Renée du Moncel (de Saint Nazer à Gréville-Hague) et sa nièce Jacqueline du Parc (des Cresnays, près d’Avranches) : « Item la moitié de la Chapelle et colombier estant devant la porte du manoir. » (Extrait de l’aveu de 1608 de la moitié du fief du Mesnil-au-Val par Etienne du Parc).
          Par la suite le manoir va rester la propriété de la seule famille du Parc jusqu’à la Révolution où il est vendu comme bien d’émigré. C’est à François du Parc, marquis de Barville par mariage, que l’on doit probablement l’appellation toponymique du lieu au 18e siècle. » 
    [2]

     

    Ci-dessus : à gauche, blason de la famille du Parc, Ecartelé : aux 1 et 4, d'argent à trois jumelles de gueules, qui est du Parc ; aux 2 et 3, d'or à deux fasces d'azur, accompagnées de neuf merlettes de gueules, quatre, trois, deux ; au franc-canton d'hermine, qui est du Paynel, par Gilloudifs. ; à droite,Blason de la famille du Parc, d'or à deux fasces d'azur accompagnées de neuf merlettes de gueules et un franc quartier d'hermine, https://man8rove.com/fr/blason/9cvz292-parc

     

          « En 1886, le manoir est détruit presque entièrement par un incendie. (...) » « il n’en subsiste aujourd’hui, que la tour et un ensemble de bâtiments remaniés ou reconstruits. » [3]

     

           « En 1981, Anne et Claude Bonnet achètent la ferme où se trouve la tour et entreprennent aussitôt des travaux de sauvegarde : pose d'une nouvelle charpente, d'une toiture en schiste et d'un vitrail. » [5]

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « Depuis 1981 de nombreux travaux ont été effectués : charpente à l’ancienne avec lucarne d’envol, pose d’une toiture en schiste, consolidation des maçonneries intérieures de la chapelle et du colombier, pose de vitraux à la chapelle. Ces travaux ont été financés à 75% par l’Etat et le Département et à 25% par les propriétaires et le Comité Gilles de Gouberville. » [2] 

     

    Ci-dessus, une photo extraite de https://www.vds-phl.fr/article-mesnil-au-val-et-gilles-de-gouberville-le-manoir-de-barville-120194808.html

     

    Le Mesnil au Val, berceau du Calvados ?

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « En tout cas, il est acquis que Gilles Picot, sire de Gouberville, lieutenant des Eaux et Forêts en la Vicomté de Valognes, disposait bien d’un alambic dans l’une des chambres de son manoir de Barville et qu’il savait s’en servir pour distiller bien autre chose que des pétales de fleurs.

         Cette passionnante expérience se serait déroulée un beau Mardi 28 mars 1553 d’après une opinion communément admise qui invoque à cet effet le Livre de raison de notre gentilhomme terrien, dont les qualités d’initiateur, de promoteur et de propagateur de la culture des pommiers à cidre est autrement plus établie pour s’y être soigneusement consacré après leur introduction en Normandie par le brave Guillaume Dursus, originaire de Navarre, et Marin Onfroy, seigneur de Saint Laurent sur Mer, qui acclimateront de savoureuses espèces venues de Biscaye.

         Pour mémoire, d’après les médisances de l’époque, les pommes du Cotentin produisaient un cidre à ce point détestable que seuls l’auraient bu ceux désireux de donner des preuves d’austérité ou de mortification. » [6]  

     

    Ci-dessus, une photo aérienne extraite du site Géoportail.

     

         « Depuis 1986, l’association Comité Gilles de Gouberville diffuse le témoignage du gentilhomme normand et édite annuellement Les Cahiers goubervilliens depuis septembre 1997. » [1] 

     

    Description

     

         « Du manoir originel, il ne subsiste que la tour, probablement du 15e siècle, dite de Barville, de plan carré à la base et octogonal puis circulaire à son sommet. » [1]

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « La tour est bâtie en moellons de grès. Les encadrements des baies sont en pierre calcaire de Caen et d’Yvetot-Bocage. La couverture est en schiste avec une lucarne d’envol. Un cadran solaire, intégré à la maçonnerie, est visible sur la paroi sud.

          Construite à la fin du 15e siècle ou au début du 16e siècle, la tour est, au rez-de- chaussée, à usage de chapelle (piscine pour les ablutions du prêtre et vestiges d’un bénitier) et à l’étage, de colombier auquel on accède par un escalier à vis ménagé dans un contrefort.
    Le colombier est entièrement tapissé de niches à pigeons, en partie dégradées. »
    [3] 

     

    Ci-dessus, la tour de Barville par Xfigpower — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=21578066

       

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « En toiture, elle possède une lucarne d'envol pour les oiseaux.

         L'accès à la chapelle se fait par une porte cintrée et moulurée. Une niche, et un écu la surmonte. » [1]

     

     

     

    Ci-dessus : à gauche, une photo extraite de https://www.vds-phl.fr/article-mesnil-au-val-et-gilles-de-gouberville-le-manoir-de-barville-120194808.html ; à droite, une photo extraite de https://www.cotentine.fr/normandie/patrimoine-normand/le-manoir-de-barville-au-mesnil-au-val-50

     

         « Au temps de Gilles d’importants travaux de sauvegarde y avaient déjà été entrepris : Thomas Drouet et Gratian furent à Yvetot . quérir du carreau [ici, pierre calcaire] pour racouttrer [réparer] les pilliers du coulombier . Gilles Mesge . apporta de la chaux pour . XXIV s.(21 juin 1560). » [2]

     

    Le manoir dans le Journal de Gilles de Gouberville

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche) LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche) LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)

     

    Ci-dessus : à gauche et au centre, photos extraites de  https://www.cotentine.fr/normandie/patrimoine-normand/le-manoir-de-barville-au-mesnil-au-val-50 ; à droite, plan extrait du cadastre napoléonien de 1813, Archives de la Manche, https://www.archives-manche.fr/ 

     

    ​     « Gilles n’y décrit pas les lieux. Il les situe à travers les événements qui s’y déroulent. Ainsi, par exemple :

         – la cuisine : Je trouvé céans Loys Langloys [serviteur de] de Mons. Poton, endormy sur la table de la cuysine, ung espervier sur sa main qu’il avoyt veillé deux nuyctz, comme il disoyt (23 juillet 1551)

         – la salle et le cellier : je fys tirer hors, la poultre qui estoyt rompue au cellier de la salle ; il estoyt deux heures de nuyct quand nous heumes achevé (18 juillet 1555)

         – sa chambre : je ne bouge de céans ; dès le matin Cantepye fut à Cherebourg . pour une clef au buffet de la garde-robe de ma chambre . XV deniers (13 juin 1552)

         – les bâtiments agricoles : je fys charier de l’argile pour fère raccoutrer [réparer] les estables du pignon de la grange (15 mai 1560) .je fys charier deux chartées de fain du clos des Ventes qu’on tassa à la charterye pour ce que la grange et tous les fenilz estoyent plains (29 août 1560).

         - La tour, seul vestige intact du manoir

         Le dymenche, jour de Pasques Vième, nous fismes nos Pasques en la chapelle ; missire Jehan Freret nous confessa et administra ; je luy donne pour sa vacation . VI sols. (6 avril 1550) » [2] 

     

    Fouilles en 1997 :

     

    « MESNIL-AU-VAL (Manche). Le Manoir de Barville

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     Le manoir a été habité depuis le 16e s. jusqu'à la Révolution par la famille Picot, originaire de Russy en Calvados. L'évident intérêt de ce site est l'existence du journal ou « livre de raison » tenu par l'un de ses membres, Gilles Picot, sire de Gouberville, mort en 1578. Le journal, dont la partie retrouvée va de 1549 à 1562, nous tait connaître en détails les us et coutumes des habitants du nord Cotentin en plein 16e s. et fournit de nombreux renseignements sur le domaine. Les bâtiments actuels s'alignent régulièrement autour d'une cour carrée, disposition habituelle de ce type d'habitat en Cotentin. Une tour formant chapelle au rez-de-chaussée, surmontée d'un colombier à l'étage, restant le seul témoin authentique cité par Gilles de Gouberville est située sur le côté est de la cour, bordant le chemin conduisant directement à l'église du Mesnil-au-Val. Les autres côtés sont occupés par des bâtiments très remaniés au cours des siècles mais dont les fondations coïncident, probablement, avec celles du manoir primitif. Seul le côté nord a perdu son bâti et ne perdure qu'un mur, formant limite entre la propriété et un chemin de service conduisant à la ferme voisine. L'exploration de la partie ouest de la cour a été poursuivie pendant plusieurs années, car cet emplacement avait été abandonné depuis longtemps à la végétation sauvage et servait quasiment de dépotoir. Aucune infrastructure significative ne fut découverte et le bilan archéologique se bornait à une récolte de mobilier datant pour sa presque intégralité au 19e et au 20e s. En 1995, le débroussaillage du mur de clôture nord épais de 0,95 à 1 m a permis de faire apparaître, côté sud, des pierres calcaires chanfreinées posées aux extrémités d'une large assise en schiste, avec des blocs en grès verticaux à la partie médiane. Cette découverte motive la campagne de fouille 1996. On se propose le dégagement et l'identification de ces structures, leurs rapports avec l'existence ancienne d'un bâtiment actuellement détruit mais figurant sur un plan du 18e s. et le cadastre de 1813 et la recherche de vestiges ayant appartenu au manoir disparu de Gilles de Gouberville. La dépose du comblement entre les limites marquées par les pierres calcaires chanfreinées s'avère délicate étant donné l'infiltration du mur par des racines. Au terme du dégagement se trouvent mis en évidence :

         - une large ouverture de 2 m correspondant à une porte dont le seuil est constitué de plaques de schiste,

         - le départ de piédroits formés par les pierres calcaires,

         - les parements faits en petit appareil de grès régulièrement disposés.

         La partie centrale de cet ensemble se trouve occupée par deux blocs de grès verticaux qui prennent appui sur un massif appareillé en pierres de schiste, divisant le passage en deux couloirs latéraux, cet aménagement étant manifestement postérieur à la porte. Il apparaît clairement évident que le sens du passage de l'extérieur vers l'intérieur était un axe S.-O., conclusion paradoxale car le sondage a permis le dégagement de l'amorce de l'infrastructure d'un mur en retour orienté N.-S., d'environ 1 m de large à une distance de 3,50 m du parement est de la porte. Il serait donc souhaitable d'en poursuivre le dégagement pour avoir une meilleure perception de l'habitat, le long du côté nord de la propriété. (Responsable de la fouille : C. Bonnet.) » [7]

     

    Ci-dessus, photos extraites de https://www.gouberville.asso.fr/barville

     

    Propriétaires successifs

     

      "Guillaume du Fou

      Jeanne du Fou, fille du précédent

      Guillaume Picot, époux de la précédente (début 16e siècle)

      Gilles Picot de Gouberville, fils du précédent (1544-1578)

      Jacqueline du Grux (1580)

      Anne et Claude Bonnet (2021) » [1]

     

    Protection

     

         « En raison du caractère unique de sa structure architecturale qui unit chapelle et colombier et de son lien évident avec Gilles de Gouberville, le Ministère de la Culture a décidé de procéder le 16 mars 1976 à l’inscription de la tour de Barville à l’Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques et le 10 février 1987 à son classement en tant que Monument Historique. » [2] 

     

    A proximité

     

    LES REMPARTS DE BARVILLE (Manche)     « L'église Notre-Dame, du 15e siècle, remaniée notamment aux 17e et 18e siècles. Elle est aujourd'hui rattachée à la nouvelle paroisse Saint-Gabriel du doyenné de Cherbourg-Hague. Gilles de Gouberville y est enterré. Lors de la première guerre de Religion, l'église est vandalisée le 13 août 1562. Elle renferme deux statues en bois polychrome du 18e siècle : saint Nicolas et saint Gilles. » [1]

     

    Ci-dessus, l’église du Mesnil-au-Val par Xfigpower — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24028325

     

    Sources :

     

    [1] Extrait de Wikipédia

    [2] Extrait de https://www.gouberville.asso.fr/barville

    [3]  Extrait de https://www.cotentine.fr/normandie/la-manche/nes-dans-la-manche/de-gouberville-gilles ou https://www.cotentine.fr/normandie/patrimoine-normand/le-manoir-de-barville-au-mesnil-au-val-50

    [4] Extrait de https://www.ouest-france.fr/normandie/cherbourg-en-cotentin-50100/ce-week-end-gilles-de-gouberville-est-celebre-au-ravalet-4292027 

    [5] Extrait de https://www.wikimanche.fr/Tour_de_Barville 

    [6] Extrait de https://lemesnilauval.fr/category/pages-annexes/ 

    [7] Extrait de Bonnet Christine. Mesnil-au-Val (Manche). Le Manoir de Barville. In : Archéologie médiévale, tome 27, 1997. pp. 161-162. https://www.persee.fr/doc/arcme_0153-9337_1997_num_27_1_905_t1_0161_0000_3

     

    Bonnes pages :

     

    O https://www.gouberville.asso.fr/

    O http://le50enlignebis.free.fr/spip.php?article2317 

    O https://www.vds-phl.fr/article-mesnil-au-val-et-gilles-de-gouberville-le-manoir-de-barville-120194808.html 

    O https://www.cotentine.fr/normandie/patrimoine-normand/le-manoir-de-barville-au-mesnil-au-val-50 

    O https://actu.fr/loisirs-culture/un-ete-avec-gilles-de-gouberville-avec-son-journal-il-est-passe-a-la-posterite_43502616.html 

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  •  LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

    Ci-dessus : à gauche, une photo par Ikmo-ned — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=45112867 ; à droite, une photo par Nitot — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3668729

     

         « Le village d’Aubigny se caractérise par la pierre blanche utilisée pour ses maisons et son château. Elle était autrefois extraite sur place dans des carrières souterraines et dans le village voisin de Saint-Pierre-Canivet. » [1]

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)      « En été, les arbres au feuillage dense cachent une partie du château d’Aubigny. Il faut emprunter l’allée principale pour voir s’élever les grandes façades grises de la demeure de style Henri IV-Louis XII, à l’esthétique austère. (…)

          Cet édifice, construit au début du 17e, siècle est la propriété de la même famille depuis plus de 400 ans. « Nous avons parcouru tous les champs de bataille pour les rois. Dans les années 1520, Thomas, dit le comte d’Aubigny, acquiert ces terres et bâtit le château », explique le marquis Patrick d’Aubigny d’Assy, installé dans l’un de ses salons. Depuis, aussi incroyable que cela puisse paraître, le château entouré de douves a très peu changé, comme en témoigne un plan dessiné au 18e siècle. Seule, l’aile droite est construite sous la Restauration. » [2]  

     

    Ci-dessus, une photo aérienne extraite du site Géoportail.

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)   LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

    Plan de situation du château d'Aubigny ; blason de la famille Morell d’Aubigny, d'or au lion de sinople, armé et lampassé de gueules, couronné d'argent. https://plus.wikimonde.com/wiki/Fichier:Blason_famille_fr_Morell_d%27Aubigny.svg

     

    Histoire

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Les anciens seigneurs d'Aubigny ont été célèbres dans l'histoire de la Normandie, l'un d'eux était bouteiller sous Guillaume le Conquérant, qu'il accompagnait à la conquête de l'Angleterre. Son fils ainé, Guillaume, obtint à la cour d'Angleterre la même charge de bouteiller qui devint héréditaire dans la famille (v. Galeron, Statistique de l'arrondissement de Falaise). Il reçut des biens considérables dans le comté de Norfolk où la famille s'est perpétuée jusqu'à nos jours.

         Le second fils rendit des services à Henri Ier à la bataille de Tinchebray, et reçut aussi des donations considérables en Angleterre et dans le Cotentin.

         M. Galeron a démontré que le plus ancien établissement de la famille d'Aubigny devait être à Aubigny près de Falaise où naquit Guillaume-le-Conquérant ; ses arguments nous paraissent sans réplique. L'ancien château se trouvait, d'après lui, au nord du château actuel et tout près de l'église. » [3]  

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Enfin, M., de Gerville n'a pu découvrir sur la commune qu'il décrit l'emplacement d'un château fort ou d'un manoir, qui pût rappeler la puissance des seigneurs qu'il en fait partir, et il est réduit à chercher, à une lieue de-là, sur une commune étrangère, la motte d'un château de St. Clair, où il croit pouvoir établir la résidence des premiers Aubigny. Nous, au contraire, outre le château d'Aubigny actuel, |qui date de deux cents ans au moins, et qui est encore entouré de douves, nous trouvons, à cent pas plus loin, en nous rapprochant de l'église, l'emplacement d'un autre châtel plus ancien, où se voient encore un petit étang, reste des premiers fossés, une ferme, un jardin enclos de murs, et une petite glacière pour les besoins du château. Là, nous assure-t-on, fut jadis la première résidence des seigneurs ; là, lorsque l'on fouille le sol pour des plantations ou des constructions, on découvre d'anciennes fondations qui remontent à des temps fort reculés. L'église n'était éloignée que de quelques pas, et peut-être se trouvait-elle, comme nous en voyons d'autres ailleurs, renfermée dans l'enceinte fortifiée de la demeure du maître. » [4]

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

    La famille Morell d’Aubigny

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « C'est une ancienne famille noble normande qui prouve sa noblesse depuis l'année 1480. La famille Morel (ou Morell) est originaire des environs de Falaise, en Normandie, où elle a formé les branches des Morell d'Aubigny de Putanges et des Morell d'Aubigny d'Assy. Cette famille a donné à l'armée de nombreux officiers. Parmi ses alliances, on cite celles avec les maisons de Montgomery, de Rohan, de Montmorency, et Luynes, etc. [5]

     

         Pour cette famille voir ici.

     

    Ci-dessus, le blason de la famille Morell d’Aubigny, d'or au lion de sinople, armé et lampassé de gueules, couronné d'argent. https://plus.wikimonde.com/wiki/Fichier:Blason_famille_fr_Morell_d%27Aubigny.svg 

     

    Membres notables de la famille :

    [Les photos des orants ci-après sont celles dans l'ordre ci-dessous]

     

         O Raven de Morell († 1592), sieur et patron d'Aubigny. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

         O Raven II de Morell († 1625), chevalier de Saint-Michel, seigneur d'Aubigny et de Canivet

         O Brandelis de Morell († 1662), chevalier, seigneur d'Aubigny, etc., fils cadet du précédent. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

        O Antoine Achille de Morell († 1673), chevalier, seigneur dit « comte » d'Aubigny, etc., fils cadet du précédent. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

         O Marc Antoine de Morell († 1724), seigneur dit « comte » d'Aubigny, gouverneur de Falaise. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

        O Jean Marc Antoine de Morell († 1775), seigneur dit « comte » d'Aubigny, 1er marquis d'Assy (1766), gouverneur de Falaise, etc., fils du précédent. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

         O Jules Marc Antoine de Morell († 1786), seigneur dit « comte » d'Aubigny, 2e marquis d'Aubigny d'Assy, etc., fils du précédent. Il a son orant dans l’église d’Aubigny.

         O Charles-Alexandre Morell d'Aubigny (1699-1781), comte d'Aubigny, vice-amiral des mers du Ponant. » [5] Pour ce dernier, voir ici.

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

    Photos des six orants de l'église d'Aubigny extraites de https://plus.wikimonde.com/wiki/Famille_Morell_d%27Aubigny

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Le domaine a su traverser les siècles en évitant les bombardements de la guerre. « Pendant la Seconde Guerre mondiale, les obus passaient au-dessus de la maison pour toucher Falaise. Pas de gros dégâts pour nous. En revanche, près de 500 vitres ont explosé avec les détonations », révèle l’aîné d’une famille de trois enfants. Le grand portrait en pied de Louis XIII qui trône dans l’entrée du château aurait, lui, reçu des éclats d’obus. » [2]

     

    Description

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Le château d'Aubigny est l'ancien siège du fief de la famille du même nom, anoblie en 1568. La demeure actuelle, édifiée dans la première moitié du 17e siècle, est le résultat d'un remaniement total d'un logis datant du 15e siècle comme l'atteste la présence de deux des quatre tours en élévation postérieure (bouches à feu dans deux des quatre tours).
          Une « cour d'honneur », balisée à l'ouest par un vaste plan d'eau ainsi que par la grange datant du 15e siècle, précède le château proprement dit. Selon le cadastre de 1811, il apparait que seul le profil de l'allée d'accès a été modifié dans sa largeur. Le corps de logis affiche une structure allongée, avec un rez-de-chaussée en hauteur et un étage à usage de caves. Un fronton triangulaire orne la façade sur cour. Accolés par deux, les pavillons d'angle, manifestement du 15e siècle et munis chacun d'un toit en pavillon achèvent la composition de l'ensemble. »
    [6] 

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Ce fut en 1528 que la famille de Morell acheta la terre d'Aubigny : le château actuel a été construit par cette famille, nous en donnons une esquisse. Il doit remonter au commencement du 17e siècle, sauf le pavillon de droite qui a été rétabli par M. le comte d'Aubigny, dernier possesseur du domaine ; les fenêtres de la partie ancienne (le centre et le pavillon de gauche) doivent avoir été retouchées.

         Des fossés entourent la cour qui précède le château ; aux angles de cette enceinte, se voient deux pavillons, l'un carré, l'autre arrondi. Le pavillon carré renferme une chapelle voutée et, je crois, le chartrier ; l'autre doit avoir été un colombier. » [3]

     

    Ci-dessus, une gravure du château d'Aubigny extraite de la Statistique monumentale du Calvados d'A. de Caumont et/oude Abécédaire ou Rudiment d'archéologie (architecture civile et militaire) par Arcisse de de Caumont, (1801-1873). Éditeurs : Derache (Paris) / Dirdon (Paris) / Dentu [etc.] (Paris) 1853 https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9784904q/f494.item.r=ab%C3%A9c%C3%A9daire%20d'arch%C3%A9ologie%20Caumont.zoom#

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « À l’entrée du château, classé Monument historique en 1948, se trouve une chapelle non consacrée, des bâtiments agricoles ainsi qu’un colombier totalement rénové et tapissé de plus de 1600 boulins, des trous dans les murs servant de nids pour les pigeons. » [2]

     

     

    Ci-dessus, le colombier a été rénové dans les années 90. | Ouest-France https://www.ouest-france.fr/normandie/falaise-14700/pres-de-falaise-le-chateau-d-aubigny-appartient-la-meme-famille-depuis-plus-de-400-ans-6461317 

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « Ce château était précédé d'une belle avenue qui a été abattue il y a quelques années : à cette époque le domaine d'Aubigny qui depuis plus de 300 ans appartenait à la famille de Morell, a été vendu, le dernier possesseur ayant quitté le pays pour habiter près de Paris (M. le comte d'Aubigny, propriétaire du château de Frénouville, est le fils du comte d'Aubigny qui a vendu le château, et la famille existe toujours dans le département du Calvados).

         Pour sauver le château, M. Conrad d'Aubigny d'Assy, cousin des Morell d'Aubigny, l'a racheté avec quelques terres voisines et le fait entretenir sans l'habiter ; nous devons le remercier de nous avoir conservé cet édifice qui allait être abattu. » [3]

     

    Protection

     

         « Le château et ses dépendances (chapelle, pigeonnier, bretèches, communs), les douves qui entourent le château et les allées de hêtres conduisant de la route de Caen au château sont classés au titre des monuments historiques depuis le 30 avril 1948. » [5]

     

    A proximité

     

         O Château de Longpré (16e siècle).

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « La propriété a conservé un joli pavillon d'entrée ; le château de Long Pré, construit au 16e siècle, possède une tour carrée et l'autre cylindrique, l'édifice a été remanié au 18e siècle et nouveaux remaniements et reconstruction des communs dans la deuxième moitié du 19e siècles. On voit la date 1752 gravée au-dessus d'une fenêtre du côté nord ; sur une lucarne le millésime 1770. Toutes les fenêtres ont été élargies à cette époque. Au début du 19e siècle il appartenait à M. Lebourgeois Prébois, qui en a fait restaurer l'intérieur avec soin. Il fut habité au 18e par la romancière Adèle de Souza, mère du général de Flahaut et grand-mère du duc de Momy. C'est dans ces mêmes lieux que naquit sa sœur, la comtesse de Marigny-Ménars, l'amie et la rivale de beauté de Madame de Séran. » [7]  

     

    Ci-dessus, une gravure extraite de Abécédaire ou Rudiment d'archéologie (architecture civile et militaire) par Arcisse de de Caumont, (1801-1873). Éditeurs : Derache (Paris) / Dirdon (Paris) / Dentu [etc.] (Paris) 1853 https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9784904q/f482.item.r=ab%C3%A9c%C3%A9daire%20d'arch%C3%A9ologie%20Caumont.zoom

     

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    Ci-dessus, à droite, une photo aérienne extraite du site Géoportail.

     

         O « Église Notre-Dame-de-la-Visitation (18e siècle). Elle abrite six orants représentant des seigneurs de la famille Morell. Ces statues sont classées à titre d'objets aux Monuments historiques. La clôture de chœur est également classée. » [5]

     

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados) LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)

     

         « Dissimulée derrière l’if centenaire, l’église renferme un cortège unique d’effigies funéraires classées. Ces sculptures religieuses (orants) incarnent six personnages de la famille des Morell d’Aubigny. Elles ont été installées, dans un ordre chronologique, le long du mur Nord du chœur de l’église. Ces statues couvrent deux siècles de 1625 à 1786 et sont d’extraordinaires témoignages de cette époque par la diversité des styles, la variété des expressions, la précision des costumes et des portraits. » [1]

    LES REMPARTS D'AUBIGNY (Calvados)     « L'église d'Aubigny appartient à la période moderne et n'offre par elle-même aucun intérêt, mais elle renferme six statues tumulaires de grandeur naturelle, en pierre du pays, représentant les seigneurs à genoux, les mains jointes, posture adoptée au 16e et au 17e siècles pour les statues placées sur les tombeaux. Placées autrefois dans une chapelle seigneuriale, au nord de l'église, maintenant détruite, ces statues sont aujourd'hui rangées à la file le long du mur du chœur du côté de l'évangile, elles sont d'une très belle conservation. (...)

         Les statues représentent 1. Raven de Morell d'Aubigny, dont nous venons de parler ; 2. Raven de Morell d'Aubigny, chevalier de l'ordre du Roi et lieutenant d'une compagnie de gens d’armes, mort en 1625 ; 3. Bradellis de Morell, commandant de cent gentilshommes, mort en 1666 et trois autres dont l'un Achille Antoine, fils du précédent, mourut en 1673 après s'être signalé dans les guerres d'Italie. Je regrette de ne pouvoir figurer toutes ces statues qui nous donnent la filiation des Morell d'Aubigny, depuis le 16e siècle jusqu'à nos jours... » [3]

     

    Ci-dessus, une gravure extraite de ce même document [3]

     

    Sources :

     

    [1] Extrait de https://www.paysdefalaise.fr/commune/aubigny/

    [2] Extrait de https://www.ouest-france.fr/normandie/falaise-14700/pres-de-falaise-le-chateau-d-aubigny-appartient-la-meme-famille-depuis-plus-de-400-ans-6461317

    [3] Extrait de la Statistique monumentale du Calvados, Volume par Arcisse Caumont - Derache, 1850 https://books.google.fr/books?id=QdwDAAAAYAAJ&pg=PA491&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false

    [4] Extrait de la Statistique de l'arrondissement de Falaise. Tome 2, par MM. Frédéric Galeron (1794-1838), Alphonse de Brébisson (1798-1872), Jules Desnoyers (1800-1887) ; Éditeur : Brée aîné (Falaise) 1826-1829 https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58285599/f226.item.r=%22ch%C3%A2teau%20d'Aubigny%22

    [5] Extrait de Wikipédia

    [6] Extrait de https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00111197

    [7] Extrait de http://www.chateau-fort-manoir-chateau.eu/chateaux-calvados-chateau-a-aubigny-chateau-de-longpre.html

     

    Bonnes pages :

     

    O http://www.chateau-fort-manoir-chateau.eu/chateaux-calvados-chateau-a-aubigny-chateau-d-aubigny.html

    O https://www.creation-personnalisation-web.fr/suisse-normande/plus-loin-/pays-de-falaise/aubigny.html 

    O https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58285599/f218.item.r=%22ch%C3%A2teau%20d'Aubigny%22 

    O https://www.ouest-france.fr/normandie/falaise-14700/pres-de-falaise-le-chateau-d-aubigny-appartient-la-meme-famille-depuis-plus-de-400-ans-6461317 

     

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